Les femmes de ma génération, surtout si elles aiment le football, savent qui est Marinette Pichon. Mais les autres, les plus jeunes amateurs ou amatrices de ballon rond, connaissent-ils sont nom ? Je pense que non, je considère que c’est bien dommage et du coup, l’arrivée sur les écrans de cinéma de son biopic va peut-être y remédier un petit peu. La réalisatrice Virginie Verrier nous offre donc le biopic de cette joueuse hors-norme, inspirée de son autobiographie. Quand on fait un biopic, généralement, on n’a pas en tant que réalisateur une très grande marge de manœuvre. Le film suit donc chronologiquement, sagement, consciencieusement l’itinéraire de cette championne. La reconstitution est soignée, la musique sympathique et même un peu plus que cela. La musique originale de Jean-Fabien Dijoud côtoie les tubes de l’époque, de Téléphone ou de Tears For Fears (ça fait toujours plaisir…). La réalisation est propre, assez scolaire pour tout dire mais là où évidemment Virginie Verrier était attendue au tournant, ce sont les scènes de match. On le sait, filmer le sport au cinéma c’est très difficile, et le football encore plus. Il faut éviter ce que je pourrais appeler le côté « Olive et Tom », filmer les longues cavalcades vers le but comme si le football n’était qu’un sport individuel au milieu d’une équipe. Alors ici, on peut dire que le pari est à moitié réussi, les scènes de match sont, si on n’est pas trop regardant, pas mal filmée. Je ne connais pas suffisamment les matchs de l’équipe de France féminine de l’époque (1991-2007) pour savoir si tout a été parfaitement respecté mais au fond ce n’est pas bien grave, les scènes de matchs même si elles sont nombreuses, ne constituent pas l’essentiel du film. Au moins on va dire que les scores sont respectés, ce qui est le plus important. C’est Garance Marillier qui incarne Marinette Pichon et la comédienne a dû méchamment s’entrainer pour paraitre crédible. Déjà rien que pour cela, je lui tire mon chapeau car incarner une championne quand on en est pas une, et sans que cela se voit, c’est déjà une belle performance. Garance Marillier trimballe son air buté et volontaire pendant tout le film, elle est de toutes les scènes, doit plus ou moins passer par toutes les émotions et elle fait très bien le job. Elle est épaulée par des comédiens connus qui sont venus faire ici des seconds rôles plutôt bien croqués : Alban Lenoir, Fred Testot, Emilie Dequenne, Caroline Proust et Sylvie Testud. Si certains rôles sont un tout petit sous-écrit, ils tirent tous assez bien leur épingle du jeu, avec peut-être une petite mention spéciale pour Fred Testot en entraineur de junior bienveillant. « Marinette », grâce à son scénario, permet de souligner combien le combat de Marinette Pichon pour être qui elle voulait être a été difficile. Son enfance a été marquée par le manque d’argent mais surtout l’alcoolisme et la violence de son père (un vrai détraqué pour le coup), déscolarisée tôt (trop tôt) elle a connu les petits boulots et les déclassement entre deux sélections en Equipe de France, aussi étrange que cela puisse paraitre. Les passages les plus intéressants sont d’ailleurs ceux qui concernent l’Equipe de France où elle déboule du jour au lendemain. L’ambiance délétère de l’Equipe, qui mine Marinette et plombe les résultats. Quand on regarde ces scènes à la lumière de ce qui s’est passé ces derniers mois, on comprend pas mal de choses. Le scénario, qui prend bien soin de ne jamais nommer réellement certaines protagonistes (comme la sélectionneuse ou la joueuse surnommée Titi ), pêche parfois un tout petit peu par naïveté. Marinette ne semble pas réellement rencontrer de sexisme chez les juniors en équipe mixte, pas de problème d’ego ni de soucis de vestiaires pour les garçons, ce qui est quand même difficile à croire quand on n’est pas naïve. J’ai vérifié quelques détails après le film sur lesquels j’avais des doutes (sur le statut des filles qui jouent en Division 1, sur l’étoile sur le maillot des filles, sur les records), il n’y a grand-chose à redire et quand il y a matière c’est sur des détails sans importance. Hors des terrains, la vie sentimentale de Marinette est évoquée sans faux semblant, en plus d’être footballeuse à une époque où c’était difficile, elle était aussi homosexuelle quand il n’était pas si aisé de l’être publiquement. Ce fut donc une pionnière dans son sport mais pas que, puisqu’elle sera une des première à se marier grâce à la loi Taubira et à devenir mère avec son épouse. « Marinette » dresse le portrait complet d’une femme courageuse et opiniâtre. Même si le film n’est pas flamboyant et exempt de petits défauts, de raccourcis un peu faciles, il mérite d’être vu, et pas que par les amateurs et amatrices de football.