La folie des grandeurs devait à l'origine réunir une nouvelle fois le duo De Funès-Bourvil à qui l'on doit les succès tonitruants du Corniaud et de la Grande Vadrouille dans les années soixante. Mais la mort fauche en 1970 l'auteur de la tactique du gendarme obligeant Oury à réécrire le rôle de Blaze car il a dans l'idée de le proposer à Yves Montand. Le film, plutôt la superproduction devrais-je dire avec son budget de vingt millions de francs soit trois millions d'euros (une fortune pour l'époque), mêle à la fois western (le film est tourné en Espagne, terre du western-spaghetti et la musique épique de Polnareff rappelle celle d'Ennio Morricone), film d'aventures, comédie, action. Difficile de le dire. De Funès est littéralement monté sur ressorts et comme souvent les autres comédiens paraissent être plus spectateur de ses pitreries. Les scènes cultes s'enchaînent (la collecte des impôts, le réveil) tout comme les dialogues hilarants et sonnant toujours juste encore aujourd'hui ("les pauvres, c'est fait pour être pauvre et les riches très riches, ne vous excusez pas, ce sont les pauvres qui s'excusent. Quand on est riche, on est désagréable ! Je suis ministre, je ne sais rien faire"). Forcément, il est impossible pour n'importe quel film de tenir ce rythme durant au moins une heure trente. La deuxième partie du film, la conspiration de Don Salluste pour retrouver le pouvoir, est plus poussive. Néanmoins, La Folie des grandeurs, adapté librement d'un classique de la littérature française (le Ruy Blas de Victor Hugo, il fallait oser), fait partie des plus grandes comédies françaises d'après-guerre. Celles qui traversent les décennies en faisant marrer des générations de spectateurs. C'est bien le mérite que je peux accorder à Gérard Oury bien que je ne sois pas fan de toute sa filmographie. Loin de là (je considère même qu'à partir de L'As des as, ses films deviennent très moyens). Quant à De Funès, il est alors au sommet de sa gloire. Entre la saga des Gendarmes et ses collaborations avec Oury, tout lui sourit à cinquante-cinq ans. En clair, tout était réuni pour un immense succès populaire.