Le film, dont le titre renvoie à une chanson du Brésilien Tom Zé, né en 1936, déroule des histoires de vies contrariées, exposées à la violence, qui essaient toutefois de toucher le sublime par instants. On l’atteint, justement, lors d’une scène fusionnelle au bord de la mer, où Sergio, Diara, Gui et les autres partagent un moment apaisé, à côté de vaches immobiles.
Si la caractérisation des personnages est parfois simpliste, l’action est suffisamment bien tenue tout au long du film, avec son lot de rebondissements, pour que l’on passe un bon moment.
Il est dommage pourtant que le film ne se réduise finalement qu’à cette unique idée de transgression scénaristique et paradoxale d’un modèle d’origine, dopé par des trouvailles visuelles et des situations de plus en plus extrêmes. Ce qui n’évite pas une certaine monotonie.
Si le film comporte son lot de scènes comiques jouant sur la cohabitation impromptue entre ces personnages au fort caractère, Mamie Sitting dresse surtout le portrait doux-amer d’un romancier dont le dévouement aux autres cache d’abord une difficulté à vivre pleinement sa propre vie.
Si le résultat n’est pas exempt d’effets trop poussés et de maladresses, Rapaces séduit par son casting éclectique et ce regard aussi aiguisé que stylisé sur la réalité d’un métier autant que d’une société.
Gerster plonge ainsi le film dans l’évanescence d’un moment de vacances, dans le suspens du réel, où tous les espoirs, tous les rêves, semblent permis. Il se montre en même temps parfaitement conscient de l’illusion solaire, paradisiaque, d’un endroit qui n’est jamais qu’une usine à touristes.
Rêves est l’histoire tendre d’un éveil sentimental autant qu’artistique, une réflexion sur notre besoin de garder les traces de ce que l’on vit de plus intense, sur la joie à partager ce que l’on a de plus beau et sur la manière dont le regard d’autrui peut aussi nous déposséder de nos propres histoires.
Comme dans son précédent film, Past Lives. Nos vies d’avant (2023), Celine Song met en scène une femme partagée entre deux hommes, moins pour exacerber la tension dramatique que pour explorer les thématiques qui lui sont chères, propres à la complexité des relations humaines.
La force du film est de faire sentir ce désordre à la fois comme loi du groupe et comme détresse de chacun. Fatigue accumulée de la mère, dérobades répétées du père, jalousies de l’aînée, embrasements du petit, tous se distendent d’être si proches.
Comme d’habitude, ce cinéaste, qui s’abrite derrière l’apparence d’une nonchalance foutraque, se révèle un contempteur minutieux, à la drôlerie féroce et absurde, des mœurs et travers contemporains.
Difficile de se passionner complètement pour la rencontre entre Ange et Solea (Suzanne Aubert), la jeune femme qui l’accompagne dans la quête de son ami Marco (Mathieu Amalric) et dont il comprend très vite qu’elle est en réalité sa fille tant la fiction leur laisse peu d’espace pour exister.
Science-fiction, comédie, mélo, film d’intervention, tout y passe, dans un flux continu où la parodie et l’esprit de sérieux ne se départagent pas toujours.
A l’heure où les studios, dans l’ombre du second mandat de Trump, mettent en veilleuse leur politique « woke », ce film célèbre en fanfare le retour du vieil homme blanc à la virilité charmeuse.
Le film restitue l’émotion propre au livre de redonner vie à ceux qui ont compté et ne sont plus là. D’honorer ceux qui ont façonné ce que l’on est devenu. Il dit l’importance de la mémoire pour amplifier la richesse de son monde intérieur.
Par moments, Sous hypnose ressemble à un dérivé burlesque de Scènes de la vie conjugale (1973), de Bergman. Comment traduire, dans un plan, l’idée que l’héroïne semble se détacher en pointillé de sa propre vie ? Ernst De Geer y parvient lors d’une scène surréaliste, d’une cruauté et d’une drôlerie inouïes.
Vous imaginez, sans doute, le film qu’on peut en tirer ? Eh bien, Martin Bourboulon l’a fait. Sur l’action et le suspense. L’histoire, sèche, d’une exfiltration en milieu hostile. Pour l’histoire longue de l’occupation du pays par l’Alliance atlantique, pour le contexte politique afghan, pour l’évacuation américaine, pour la profondeur des personnages, on repassera.
Année après année, jusqu’au départ de la réalisatrice à Berlin, au début des années 2020, pour une résidence artistique, Farahnaz Sharifi filme ou collecte des vidéos. Et ravive la mémoire de la militante, pédiatre et psychiatre Homa Darabi, qui s’est immolée par le feu en 1994, après avoir déchiré le foulard qu’elle portait.
Ce mélange de tonalités entre l’arc narratif qui oppose Ossama et Abou Sami, et celui du tournage rocambolesque du film d’action, qui offre à Once Upon a Time in Gaza ses scènes les plus savoureuses, dessine le portrait d’un territoire où cohabitent fort esprit de résilience et mélancolie propre aux vies empêchées.
Et c’est ce qui devient rapidement obsédant pour le spectateur de ce film qui, Singapour oblige, multiplie écrans et regards : savoir, jusque dans la fuite du temps, qui au juste regarde qui, du rêve ou de la réalité, du polar ou du mélo, lequel procède de l’autre ? Au risque de découvrir qu’à l’ère d’une si grande profusion des images, tout le monde se voit, mais plus personne ne se regarde vraiment.