Jour polaire : secrets de tournage

Jour Polaire est signée par Måns Mårlind et Björn Stein, qui était déjà le duo derrière Bron/Broen, autre coproduction noire nordique qui s’est exportée dans de nombreux pays et a généré plusieurs remakes – The Bridge aux Etats-Unis, Tunnel déjà sur Canal+. Le Nordic Noir est un genre en prise avec les problèmes de la société. Måns Mårlind  explique ainsi que "Bron/Broen était avant tout un commentaire sur les sociétés suédoise et danoise et sur leurs inégalités. Jour polaire évoque la question des origines et du racisme dans l’Europe d’aujourd’hui."

C’est un peu l’homme de tous les succès de la télé scandinave. Parmi les producteurs de Jour Polaire se trouve Stefan Baron, connu en Europe du Nord pour avoir participé à la production de Real Humans, Bron/Broen ou encore Heavy Water War. Véritable  homme de télé, Baron a aussi occupé, pendant plusieurs années, un poste dans le département des programmes de la SVT, la chaîne proposant Jour Polaire aux téléspectateurs suédois.

Pour Leïla Bekhti, le tournage dans le nord suédois a été une expérience proche de celle vécue par son personnage. "J'étais comme une gamine dans un pays que je ne connais pas, à Kiruna, dans une ville que la plupart des Suédois ignorent. Il fait froid, gris, tu entends toute la journée une langue que tu ne comprends pas. C'est déphasant." Mais l’actrice a su profiter de ce tournage sur un plan personnel. "J'ai découvert que j'étais capable d'affronter la solitude et que je n'avais pas forcément besoin des autres en cas de cafard. J'en ai fait une force."

C’est ce qu’on appelle savoir attirer l’attention des diffuseurs. Avant même sa première diffusion originale, Jour Polaire avait été vendue dans neuf territoires en plus la Suède et la France, à l’origine de la série. Le programme est ainsi diffusé sur VRT en Belgique, ZDF en Allemagne, HOT en Israël, ainsi qu'en Australie (SBS), en Norvège (NRK), au Danemark (DR), en Finlande (MTV3), au Benelux (Lumière) et en Islande (RUV).

Depuis son apparition dans Fargo des frères Coen, Peter Stormare (Rutger Burlin) a joué dans de nombreuses productions américaines et notamment une longue liste de séries. Si beaucoup se souviennent de lui pour sa prestation dans Prison Break (il jouait John Abruzzi), il a aussi joué dans Blacklist, Manhattan, Arrow, Longmire ou encore American Gods. Avec Jour Polaire, il signe un rafraichissant retour aux sources sur les terres de ses débuts : il est né en Suède.

Måns Mårlind a découvert la situation des Samis grâce à une chanteuse, Sofia Jannok, qui chante principalement en Same du nord, la plus parlée des langues sames. "Dans ses chansons, elle parlait de sa culture, des problèmes qu’elle rencontrait avec la compagnie minière de Kiruna qui pollue la nature et contrevient aux cycles de transhumance. J’ai gardé ça dans ma tête en me disant que j’allais m’en servir pour un film…" Sofia Jannok apparaît pour la première fois à l’écran dans le rôle d’une chaman.

Les Samis ont été, au vingtième siècle, victime d’une politique assimilationniste très sévère, incluant stérilisations de masse et conversions forcée au christianisme. Pour Måns Mårlind, cette politique d’oppression est "un bon exemple du sort réservé en ce moment aux minorités en Europe." Néanmoins, la télévision suédoise n’a pas eu de problème à voir ce sujet abordé. "Les Suédois se fichent éperdument des Samis, leur histoire inspire plus d’indifférence que de malaise. Ici, quand on parle d’eux, on dit qu’ils ont des vêtements colorés et qu’ils élèvent des rennes. Généralement, ça s’arrête là. Il n’y a eu aucun problème pour produire la série."

Au côté de Canal+, la chaîne publique SVT est le coproducteur suédois de Jour Polaire. La série y a été lancée le dimanche 23 octobre 2016 et cette diffusion a rencontré un très fort succès en rassemblant 1,39 million de téléspectateurs. Cela représente d’excellentes parts de marché de 38.1% auprès des 3 ans et plus, 36.2% auprès des 15-24 ans, et 38.4% auprès des 40-59 ans. Le deuxième programme le plus suivi à cette heure, sur TV4, ne réunissait pour sa part que 541 000 Suédois, soit 14.8% du public.

C’est le premier grand rôle dans une série pour Leïla Bekhti, après quelques apparitions au début de sa carrière. Pourtant, elle a bien failli refuser, à cause de son niveau d’anglais. "A l’époque, je ne savais même pas dire les jours de la semaine en anglais." L’actrice a finalement signé, au grand soulagement des auteurs qui en avaient fait leur premier choix après l’avoir vue dans Un Prophète. Sa préparation est passée par un stage intensif d’anglais, à raison de huit heures par jour. "Mais pour les besoins de la série, je garde l’accent français, au fond, ça m’arrange !"