C'est un rôle qui lui a apporté la renommée internationale, mais que, les années passant, elle regrette avoir fait. En 2011, l'actrice Viola Davis incarnait dans La Couleur des sentiments le rôle d'Aibileen Clark, une gouvernante noire dans les années 60 qui prenait la décision de publier son témoignage contre la décision de son employeuse. Un récit se déroulant évidemment avec en toile de fond la douloureuse question de la ségrégation raciale aux Etats-Unis, et le mouvement de lutte pour les droits civiques.
Ce drame, signée par Tate Taylor et également emmenée par les comédiennes Jessica Chastain, Emma Stone, Bryce Dallas Howard, Sissy Spacek et Octavia Spencer, a reçu en 2012 quatre citations aux Oscars. C'est cette dernière actrice qui repartira auréolé de l'Oscar du Meilleur second rôle, pour une oeuvre qui fut un beau succès au box office international, avec plus de 221 millions de dollars récoltés pour un budget d'à peine 25 millions.
"Au bout du compte, ce n'était pas les voix des domestiques qu'on entendait"
Ceci posé, pour quelle raison Viola Davis regretterait-elle d'avoir fait ce film ? Elle s'en expliquera en 2018, dans un entretien accordé au New York Times. "Il m'a semblé qu'au bout du compte, ce n'était pas les voix des domestiques qu'on entendait." expliquait-t-elle. "Je connais Aibileen. Je connais Minny. Elles sont ma grand-mère. Elles sont ma mère.
Et ce dont je suis sûre, c'est que si on veut faire un film dans lequel le postulat principal est de comprendre ce que ça faisait de travailler pour des Blancs et d'élever des enfants en 1963, j'ai envie d'entendre ce que ça faisait vraiment. Je n'ai jamais entendu ça au cours de ce film" poursuivait-elle. Ce qui ne l'empêchait pas de saluer ses collègues dans le film : "les amitiés que j'ai nouées sont celles que je chérirai toute ma vie. J'ai vécu une expérience formidable avec ces autres actrices".
"Il a été créé avec le filtre d'Hollywood dans un contexte de racisme systémique"
En 2020, Viola Davis évoquera à nouveau le film au micro de Vanity Fair, revenant plus en détail sur sa précédente déclaration. "Il y a une partie de moi qui pense toujours que je me suis trahie, et que j'ai trahi les miens, parce que j'ai joué dans ce film qui n'était pas prêt à dire toute la vérité. Il a été créé avec le filtre d'Hollywood dans un contexte de racisme systémique. Ils [NDR : les producteurs] sont investis dans le combat de raconter ce que c'est d'être noir, mais toujours en adéquation avec les attentes du public blanc".
Des déclarations qu'il faut mettre à la lumière d'un contexte particulier; celui du mouvement Black Lives Matter; mouvement social et politique né en 2013 aux États-Unis au sein de la communauté afro-américaine, qui milite contre le racisme systémique envers les Noirs.
The Walt Disney Company France
En 2020, année de la nouvelle prise de parole de Viola Davis, le mouvement occupera une place importante dans les manifestations et émeutes de l'été 2020 aux États-Unis et dans le monde, après le meurtre de George Floyd, qui seront ensuite ravivées par la mort d'autres hommes noirs lors de leur arrestation par des policiers blancs.
Dans un message posté sur Facebook cette année-là, Bryce Dallas Howard admettait que La Couleur des sentiments n'était peut-être pas le meilleur film pour apprendre ce qu'était le Mouvement pour les Droits Civiques.
"J'ai entendu dire que La Couleur des sentiments était le film le plus regardé sur Netflix en ce moment. Je suis tellement reconnaissante pour les amitiés exquises qui sont nées de ce film - notre lien est quelque chose que je chéris profondément et qui durera toute ma vie. Ceci étant dit, La Couleur des sentiments est une histoire fictive racontée du point de vue d'un personnage blanc et a été créée par des conteurs majoritairement blancs. Nous pouvons tous aller plus loin".
