Il ne compte que 4 épisodes... Ce drame noté 4,4 sur 5 est clairement l'une des meilleures mini-séries de l'année
Emilie Semiramoth
Emilie Semiramoth
Cheffe du pôle streaming, elle a été biberonnée aux séries et au cinéma d'auteur. Elle ne cache pas son penchant pour la pop culture dans toutes ses excentricités. De la bromance entre Spock et Kirk dans Star Trek aux désillusions de Mulholland Drive de Lynch, elle ignore les frontières des genres.

Grand prix à Séries Mania 2025 et disponible sur arte.tv, la mini-série espagnole "Querer" dissèque avec une sobriété glaçante la fuite d'une mère de famille victime de violence conjugale.

Une œuvre sobre et puissante

C'est une véritable claque. Dans une froideur délibérée – de l'image comme de la mise en scène – et une absence totale de musique, Querer construit son récit sur le silence oppressant d'une famille en implosion.

Miren, interprétée par Nagore Aranburu, vient de porter plainte au commissariat accompagnée de son avocate. Après 30 ans de mariage et deux enfants, elle décide de quitter le domicile conjugal et dénonce son mari pour viols conjugaux.

Querer
Querer
Sortie : 2024-10-17
Série : Querer
Avec Nagore Aranburu, Pedro Casablanc, Miguel Bernardeau
Presse
4,4
Spectateurs
4,2
Voir sur Arte

La scène qui suit résume tout : Miren est sur le point de partir, mais elle se voit préparer un steak pour son mari rentré plus tôt que prévu. Puis son corps se fige, son visage se tend. L'angoisse l'étreint. Ce sont 30 ans de peur cristallisés en quelques secondes avant la fuite en taxi. Et quatre épisodes qui structurent ce chemin de croix (la séparation, les trop nombreuses justifications, le jugement... insupportable avant la reconstruction) avec une rigueur clinique.

La réalisatrice Alauda Ruiz de Azúa et ses co-créateurs optent pour un récit tendu de bout en bout où chaque détail – une porte qui claque, le son des pas dans la pièce d'à côté – devient signifiant. Cette économie de moyens révèle la brutalité des non-dits et des violences invisibles, considérées comme anodines. Car rien n'est montré de la violence imposée par Iñigo (Pedro Casablanc), son mari. Le procès final, épisode où chaque silence est d'une épaisseur à couper au couteau, expose avec une froideur glaçante la mécanique de l'emprise conjugale.

Nicolás de Assas / Movistar Plus+

Une critique unanime

Avec une note presse moyenne de 4,4/5 sur AlloCiné regroupant 11 titres de presse, Querer suscite une adhésion critique exceptionnelle. Pour Télérama, c'est "une mini-série choc, qui laisse estomaqué, triste mais non sans espoir". Elle salue "les premiers balbutiements de reconstruction de son héroïne". Le Point insiste sur sa retenue : "remarquablement écrite [...] sans effets, où rien n'est appuyé, mais dont on suit l'intrigue une boule à la gorge". Les Inrockuptibles soulignent la "finesse de son étude et la clarté de son propos".

Marie Claire promet que la série vous "hantera longtemps", tandis que Télé 7 Jours loue "une justesse implacable" face au thème du viol conjugal. Télé Loisirs reprend les mots du créateur Eduard Sola : "Je me rends compte que cette série peut changer le monde". Le Figaro Magazine souligne le "choix audacieux" de l'absence de musique qui intensifie les émotions. Enfin, Le Parisien encense "les comédiens tous formidables", particulièrement Nagore Aranburu. Il est vrai que son mutisme est incroyablement expressif.

Capture d'écran YouTube

Pourquoi Querer vous hantera

Au-delà de sa maîtrise technique, Querer impose son urgence par son sujet. La série démonte avec précision les mécanismes de la violence patriarcale, notamment à travers le personnage d'Aitor (Miguel Bernardeau), le fils aîné qui reproduit inconsciemment le schéma paternel. On est aussi les témoins d'une Miren qui subit un véritable déclassement.

Social pour commencer. Interdite de travailler durant son mariage, elle doit à présent subvenir seule à ses besoins. Mais elle est déclassée aussi au sein de la famille. Elle devient une mauvaise mère pour avoir dénoncé les agissements de son mari. Une belle démonstration de la façon dont l'emprise se perpétue par le déni collectif.

Nicolás de Assas / Movistar Plus+

Si la série vous a échappé lors de sa diffusion sur Arte, rattrapez ce chef-d'œuvre nécessaire sur la plateforme de la chaîne arte.tv. Portée par la performance sidérante de Nagore Aranburu, cette immersion dans une famille ordinaire en apparence va vous ouvrir les yeux sur les thématiques ô combien importantes des viols conjugaux, de la soumission et de l'isolement, en évitant tout misérabilisme pour tendre vers une forme de catharsis.

Ces sujets qui font souvent l'objet d'un voyeurisme malsain au gré des différentes affaires judiciaires qui font la une de l'actualité sont abordés ici sous un autre angle. Ou comment la série dépasse la fiction pour devenir un outil de conscientisation.

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