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    Westworld saison 3 : à quels films fait référence l'épisode 5 ?
    Maximilien Pierrette
    Journaliste cinéma - Tombé dans le cinéma quand il était petit, et devenu accro aux séries, fait ses propres cascades et navigue entre époques et genres, de la SF à la comédie (musicale ou non) en passant par le fantastique et l’animation. Il décortique aussi l’actu geek et héroïque dans FanZone.

    Diffusé pendant le week-end de Pâques sur HBO et OCS, l'épisode 5 de la saison 3 de "Westworld" a multiplié les clins-d'œil à plusieurs films. Voici lesquels, et ce que leur choix peut vouloir dire pour les personnages et l'intrigue.

    HBO

    ATTENTION - L'article ci-dessous contient des spoilers sur la saison 3 de Westworld, en cours de diffusion sur HBO et OCS, et notamment sur l'épisode 5, le dernier en date. Veuillez donc passer votre chemin si vous n'êtes pas à jour et que vous souhaitez ne rien savoir. Pour les autres, rendez-vous après la bande-annonce.

    Composée de huit épisodes seulement (contre dix pour les deux précédentes), la saison 3 de Westworld est entrée dans sa seconde moitié avec de nouvelles révélations : après l'identité des hôtes dont Dolores (Evan Rachel Wood) a emporté les âmes en quittant le parc, c'est le très ambigu Enguerrand Serac (Vincent Cassel) qui était au cœur de l'attention avec des flashbacks et une voix-off qui nous informent sur son passé, ses motivations et sa place dans l'histoire. Le tout en parallèle d'une intrigue centrale bourrée de références cinématographiques. D'easter eggs même, pour rester dans la thématique du week-end de Pâques pendant lequel l'épisode a été diffusé, ce qui rend la chose encore plus amusante.

    Intitulé "Genre", il s'inscrit dans la continuité directe du précédent. Alors que Liam Payne (John Gallagher Jr.) vient d'être capturé, il pense pouvoir s'échapper en injectant à Caleb (Aaron Paul) une drogue récréative appelée… "Genre". Si la tentative d'évasion est un échec, elle marque pour le complice de Dolores le début d'un voyage pour le moins particulier où sa perception de la réalité est altérée, ce que la mise en scène retranscrit grâce à la photo et des musiques qui renvoient à différents films ou styles qui se manifestent au gré de ses émotions et dont le choix ne paraît pas anodin. Car on peut se demander si, derrière le côté ludique, ces références ne cachent pas des indices sur la suite de la saison 3.

    Tout commence donc en noir et blanc et dans une ambiance de film noir datant de l'âge d'or hollywoodien, sur une réorchestration du thème musical de la série signé Ramin Djawadi, comme pour effectuer un basculement en douceur de l'univers de la série à celui des clins-d'œil. A ce moment-là, Westworld ne renvoie pas à une œuvre précise mais, comme l'a révélé le créateur et showrunner Jonathan Nolan auprès de Business Insider, l'idée était de donner naissance "à l'enfant de La Griffe du passé et Sueurs froides". Réalisé par Jacques Tourneur en 1947, le premier fait de Robert Mitchum un détective privé dont le passé se révèle au gré de flashbacks avant qu'il ne tombe dans le piège d'une femme fatale. Mis en scène par Alfred Hitchcock en 1958 et considéré comme l'un des plus grands films de l'Histoire du cinéma, le second plonge James Stewart dans une histoire de double et d'obsession, où il est également question d'un traumatisme à surmonter.

    Deux références assez peu évidentes (voire pas du tout) mais qui, mises bout-à-bout et prises dans le contexte de cette saison 3 peuvent faire office d'indicateurs sur ce qui attend Caleb, dont le passé nous est dévoilé par flashes, et laisser augurer un destin funeste pour le personnage joué par Aaron Paul, alors que Dolores est clairement la femme fatale de cette histoire. La troisième référence de cet épisode, assez brève, concerne d'ailleurs leur relation, à grands renforts de ralentis pendant que retentit le thème de Love Story signé Francis Lai dans le drame déchirant d'Arthur Hiller centré sur une histoire d'amour tragique puisque racontée en flashback par Oliver (Ryan O'Neal) alors que Jenny (Ali McGraw) est décédée. Au vu des nombreuses morts de Dolores, la logique de ce choix paraît évidente mais il peut aussi s'agir d'une feinte et d'une manière de nous faire comprendre que Caleb est mort, comme Arnold/Bernard (Jeffrey Wright) dans la saison 1, et ressuscité en tant qu'hôte avec des souvenirs implantés.

    Entre ces deux références, Westworld joue la carte du film de guerre lors d'une poursuite en voiture rendue épique grâce à l'utilisation de "La Chevauchée des Walkyries" de Richard Wagner, désormais indissociable de la scène des hélicoptères d'Apocalypse Now : "Je trouve incroyable le fait de pouvoir utiliser une musique de façon si efficace dans un film que cela annihile presque la capacité des autres à le faire", explique Jonathan Nolan à propos du pouvoir d'évocation de ce titre, sans pour autant donner d'indice sur ce que cela sous-entend pour Caleb, au-delà de son passé de militaire qui le hante encore et reviendra de façon plus précise à la fin de l'épisode.

    Avant cela, le trip du personnage se poursuit au sens propre : alors que ses partenaires et lui s'apprêtent à prendre le train dans lequel Dolores décidera de révéler aux humains leurs profils générés par Incite (la société de Serac), la photo prend des allures plus hallucinogènes alors que rententit la chanson "Nightclubbing" d'Iggy Pop, co-écrite avec David Bowie en 1977 et associée à Trainspotting, puisque Danny Boyle l'avait utilisée dans son film culte de 1996 (voir la scène ci-dessus), où il était grandement question de drogue. Et de train. Au-delà du fait que Peter Mullan a joué dans le long métrage et la série d'HBO, ou que le célèbre monologue d'ouverture d'Ewan McGregor au cinéma renvoie à la notion de choix, centrale dans le show, la présence de ce titre ressemble davantage à un clin-d'œil en attendant la référence suivante.

    Et c'est sur une plage que le cinquième et dernier genre se révèle. Il s'agit de l'horreur, accompagnée par le très glaçant thème de Shining, adaptation de Stephen King par Stanley Kubrick à laquelle l'épisode semble faire référence, puisque l'écume de la mer rougie par le sang de Liam alors qu'il agonise dans les bras de Caleb, rappelle la scène de l'ascenseur restée célèbre pour ses flots d'hémoglobine. Et c'est là que s'achève cette partie du cheminement du personnage, que Jonathan Nolan compare à "une film de M. Night Shyamalan", metteur en scène spécialisé dans le twist, les apparences trompeuses et dont deux des plus célèbres longs métrages, Sixième sens et Incassable, suivent des protagonistes qui ne sont pas ce qu'ils pensent être. Comme Jack Nicholson dans Shining.

    Un sentiment renforcé par les flashes qui assaillent Caleb pendant cette séquence, qu'il s'agisse d'images déjà vue (la mort de son partenaire Francis, la mer vue depuis un ponton en pleine nuit…) ou de nouveaux plans. Comme cet homme joué par Enrico Colantoni, de retour chez Jonathan Nolan après avoir tenu un rôle clé dans Person of Interest. Ou le mystérieux Dr. Greene (Bahia Haifi), qui apparaît alors qu'Aaron Paul nous est montré dans une pièce entièrement blanche et particulièrement intrigante, car elle rappelle le centre de rééducation dans lequel Serac a interné des personnes qui, telles son frère, ne cadrent pas avec la société qu'il tente de mettre en place avec sa machine omnisciente Rehoboam. Le complice de Dolores en a-t-il fait partie, lui dont Incite ne semble pas pouvoir lire le profil, comme pour l'ex-hôte du parc ? Des expérimentations ont-elles été réalisées sur lui ? A-t-il vraiment été envoyé à la guerre ? Quelle part de ses souvenirs est vraie, lui que Liam accuse d'avoir tué Francis ? Et qu'en est-il de lui ?

    Capture d'écran

    Pensé par Jonathan Nolan comme un hommage à la scène du Charlie et la chocolaterie de 1971 dans Violette essaye l'un des prototypes de Willy Wonka (Gene Wilder), un chewing-gum contenant les goûts de trois plats distincts qui se révèlent au fur et à mesure pour recréer l'expérience d'un repas complet, cet épisode de Westworld fonctionne également comme une métaphore du parc au cœur des deux premières saisons, où les genres liés à la drogue prendraient la place des mondes. Beaucoup plus fun que d'habitude grâce aux références qui font appel à notre cinéphilie de façon ludique, il ressemble à un tournant pour le personnage de Caleb, dont le passé se dévoile un peu plus alors qu'il ne maîtrise rien, ce qui sous-entend que certains de ses souvenirs ont été réprimés. Il paraît fort peu probable que sa vraie nature ne soit révélée avant le huitième et dernier épisode de cette saison 3, mais ce "Genre" va sans doute accélérer son introspection pour lui faire prendre conscience de son rôle dans l'histoire.

    Surtout que le plan de Dolores n'est pas exactement celui que l'on croyait : tout portait à croire que son but était de pirater les données d'Incite pour les dévoiler aux humains qui, comme les hôtes du parc, sont réduits au statut de pantins dont les vies sont dirigées, mais il ne s'agissait en réalité que d'une étape sur sa route vers Serac. Le fait d'avoir choisi une victime de ses agissements comme partenaire ne serait donc pas étonnante et, en plus de lui permettre de renouer avec son passé, qui sait si Caleb ne se révèlera pas être la clé pour atteindre le boss d'Incite en plein cœur. Quitte à découvrir que son destin avait été programmé par avance, ce qui nous renverrait vers le thème de la manipulation, que l'on retrouve dans La Griffe du passé et Sueurs froides, les deux films qui ouvrent cette balade à travers un demi-siècle de cinéma. Nouveaux éléments de réponse dans le prochain épisode, "Decoherence", attendu à partir du lundi 20 avril sur OCS ?

    La saison 1 de "Westworld" en musique :

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