Un Hitchcock fort appréciable mais assez différent des autres... Enfin, tous ses longs-métrages sont différents, mais pour son avant-dernier, le cinéaste se libère de certains codes et décide de retourner en Angleterre. Bien que l'histoire prenne place à Londres, Hitchcock n'a pas souhaité nous servir une ambiance londonienne macabre baignant dans le brouillard au milieu des ruelles glauques, même si cet archétype est effectivement évoqué à un moment dans le film. C'est pourtant ce genre d'ambiance à laquelle on pourrait s'attendre en s'imaginant un tueur maniaque qui étrangle des femmes avec une cravate... Mais ce film n'est pas centré autour du meurtrier, en fait, on suit d'abord le parcours de l'homme innocent qui se fera accuser à sa place. C'est d'ailleurs l'occasion de constater là aussi que l'archétype du héros ( ou personnage principal ) et du méchant est inversé: l'homme innocent est loin d'être un individu aimable, il est plutôt grossier, colérique et assez porté sur la boisson, tandis que le vrai tueur affiche un comportement beaucoup plus courtois, il se fait passer pour un brave type... Excepté aux yeux du spectateur qui, occasionnellement, devient complice du meurtrier en suivant son parcours, car tout le film ne tourne pas uniquement autour du principal anti-héros, loin de là ! D'ailleurs, le premier meurtre auquel on assiste est filmé avec une certaine audace perverse, c'est comme si on y participait, comme si on tentait de violer la victime... Hitchcock s'est permis d'afficher une certaine nudité dans "Frenzy". Cependant, on ne nous montrera pas d'autres meurtres au moment où ils seront commis, le film ne cherche donc pas à choquer sur toute la ligne. Arrive un moment dans le film où l'on sait pertinemment qu'une nouvelle victime va y passer, mais plutôt que d'assister au meurtre, la caméra préférera s'éloigner à reculons du lieu où il va être commis, comme le ferait une personne ne souhaitant pas assister à la scène. Et cette caméra avait déjà eu un comportement similaire lors d'une découverte macabre, restant en-dehors du lieu, mais laissant entendre un simple cri d'effroi depuis la rue. C'est cet ensemble de petits détails sur la forme du film et le fond des personnages qui donnent à "Frenzy" son identité un peu décalée, de même que ses quelques touches d'humour. Et pour ceux qui sont surtout à la recherche de suspense et de tension, il reste ce passage assez savoureux où le tueur retourne chercher un indice qu'il a laissé sur sa dernière victime... Je n'ai pas du tout trouvé le film mauvais bien qu'il paraisse un peu long et que la fin demeure trop expédiée. Mais je dirais que "Frenzy" n'est pas le film le plus représentatif de la carrière d'Hitchcock.