Choron dernière : les secrets du tournage

Le Professeur Choron, de son vrai nom Georges Bernier (il est le père de la comédienne Michèle Bernier), est le co-fondateur, en 1960, de la revue satirique culte Hara-Kiri (qui allait devenir Charlie Hebdo), exemple d'une presse libre et provocatrice. Une revue exempte de tabous sans qui toute une génération de comiques impertinents n'auraient jamais pu exercer, tels les Nuls, les Guignols ou l'équipe de Groland. Personnage haut en couleurs, insaisissable, tout aussi bien adulé que détesté, le grand provocateur Professeur Choron décède le 10 janvier 2005 à Paris d'une leucémie.

Le coréalisateur Eric Martin revient sur les projections de Choron dernière et sur les réactions du jeune public : "Ce qui nous fait plaisir avec Pierre Carles, c'est quand on voit des jeunes venir nous dire qu'en leur faisant découvrir Choron- qu'ils ne connaissent généralement pas -, on leur fait prendre conscience qu'ils vivent dans un monde remplit d'interdits et de morale dégoulinante. La liberté de ton de Choron les fait bander."

Eric Martin, coréalisateur de Choron dernière, explique que Choron n'était pas que le grand provocateur connu de tous. "Le film est aussi là pour rappeler que Choron n'était pas, comme certains aiment à le penser, qu'un provocateur. Choron a été l'un des plus grands patrons de presse français. En publiant Hara-Kiri et Charlie Hebdo, il a donné un écho national à une nouvelle forme d'humour dont tout le monde s'inspire aujourd'hui. (...) Sans lui, pas de Nuls, pas de Guignols, pas de Groland. A Groland, on revendique complètement sa filiation, on en est même fiers. (...) Notre but n'était pas de hissr Choron sur un piédestal, car on montre aussi ses mauvais côtés dans le film. Finalement, c'est Choron lui-même qui emporte l'adhesion du public. Parce qu'il est naturellement drôle, touchant, même."

Benoît Delépine, acteur, réalisateur et membre historique de la troupe de Groland, voit Professeur Choron comme un modèle. "... il avait la classe. Le panache. L'esprit vif. La grande gueule qui cogne", explique-t-il. "Les autres étaient bien gentils de dessiner et d'exprimer leurs idées, mais qui leur fournissait le papier ? C'était bien lui. Escroc, menteur, voleur, peut-être. Mais qui avait les couilles d'être leur directeur de publication ? D'aller jusqu'au procès ? D'endosser les dettes ? Toujours lui. Sans lui, aucun des artistes devenus aujourd'hui célèbres ou morts ou les deux n'aurait pu sortir la moindre blague, le moindre dessin. Ils lui doivent tout. Et par ricochet, nous, les Grolandais, aussi. Car si hier le Prof n'avait pas ouvert le ventre de la société à la hache, jamais nous ne pourrions aujourd'hui la finir à l'Opinel !"

Produire le documentaire Choron dernière a été difficile. Aucune chaîne de télévision française n'a en effet souhaité le préacheter. Il a donc fallu présenter le film dans de nombreux festivals en attendant de trouver l'argent nécessaire pour le sortir en salles.