Du grand Clint Eastwood qui fait du Clint Eastwood, cela donne une belle histoire qui parvient à tenir la route de bout en bout malgré que tout soit pratiquement cousu de fil blanc. C'est mon point de vue, évidemment. En effet, Clint Eastwood n'en finit pas de nous servir ses mimiques cabotines et ses rictus classiques de grand méchant. Il n'oublie pas de nous offrir quand même quelques sourires tout à fait détendus dans les moments souriants du film. Parce qu'on sourit parfois de bon cœur au cours de ce drame social et culturel où se mêlent les conflits raciaux de voisinage - cousus de fil blanc eux aussi... -, les états d'âme d'un vétéran de Corée malade qui s'y replonge sans cesse, les frictions et malentendus avec le curé qu'il fait semblant de ne pas supporter, sa famille qu'il a du mal à supporter et les bandes de loubards du quartiers qu'il supporte moins que tout le reste. Ceux-ci ont eu le tort d'ignorer que, tout vieillard ronchon et acariâtre qu'il soit, c'est à Clint Eastwood qu'ils s'en prennent. Alors, après qu'ils aient eu menacé, harcelé et brutalisé son jeune voisin asiatique devenu son ami, tiré sur la maison de ces voisins asiatiques devenus gentils une fois la glace (vite) brisée et même, suprême malfaisance, roué de coups et violé la sœur asiatique de son jeune ami, tout est en place pour que le héros en finisse une bonne fois pour toutes. Aussi bien avec les loubards qu'avec lui-même. N'allez finalement pas croire que je n'ai pas trop apprécié ce film, au contraire. Clint, c'est une présence et un talent que j'ai toujours admiré parce que, comme tous les grands, il est un genre à lui tout seul. Un genre comme acteur et un genre comme réalisateur, et il excelle encore une fois dans les deux catégories ici. Ses voisins asiatiques (des Hmong, pour être précis) sont joués pour la plupart par des comédiens amateurs d'origine hmong: les jeunes Bee Vang (17 ans) et surtout Whitney Cua Her (15 ans), frères et sœurs dans la famille des voisins, sont remarquables dans des rôles pas si simples que ça. Pas mon meilleur Eastwood, mais un très bon moment quand même.