Le côté obscur de la presse est-il à ce point puissant qu'il nous fasse avaler que JJ Abrams a été à la hauteur de nos enfances? Et que dire de la salle, au générique final qui applaudissait, j'ai eu l'impression qu'on enterrait la république du rêve par une dictature sans plus aucune résistance, mon dieu que ça fait mal d'entendre une foule satisfaite d'avoir été à ce point insultée... INSULTE c'est le mot, car il n'y a rien à sauver, rien, dans cet opus cynique et lâche. Dès le générique, on se prend à frissonner d'une médiocrité qui pointe déjà le bout de son nez : un texte qui d'habitude est un peu "écrit", répète 4 fois la même phrase, mais passons. Puis, l'espoir dure dix minutes, le temps que les nouveaux "acteurs" ouvrent la bouche, et là, catastrophe, un concours de transparence, de dialogues ridicules, de regards bovins, de lissage tout azimut, le parfum de Jurassic world plane sur Jakku... Comment est-il possible que ces ombres de comédiens aient été choisis parmi certainement pléthore de talents qui ne demandait qu'à? Incompréhensible. Et ce n'est malheureusement pas les anciens qui sauvent ce naufrage, entre un Han solo à la cataracte baveuse et Leia Organa liftée à la truelle, on s'interroge sur le recul dont ne font plus preuve les équipes de casting dès lors qu'il s'agit de vendre de la madeleine... Bref, tout cela n'aurait pas été bien grave si le scénario, les intrigues, la tension dramatique soient, comme à l'accoutumé dans un Star Wars, propres à creuser le sillon d'une histoire qui nous fasse oublier le style grossier d'une saga qui ne s'est jamais vraiment embarrassée de direction d'acteurs et de dialogues torchés. Scénario? Il n'y en a pas, tout simplement, désespérément, scandaleusement. A ce point, qu'on peut rester admiratif d'un tel renoncement : l'univers de Lucas était si vaste, ses héros si nombreux, ses recoins si riches qu'il était presque impossible de ne pas pas pondre quelque chose d'un tant soit peu excitant, et pourtant ils ont réussi à construire un "non-film", sans aucun chemin, aucun enjeu, aucune épaisseur, aucune finesse, un vide brouillon de plus de deux heures, un néant abyssal où ne sommeille rien d'autre que le rire suraigüe d'une petite souris... Pourtant, sur l'exemple des succès planétaires de séries comme GOT qui vantent notre souci de profondeur, de complexité et d'écriture on aurait pu croire que Hollywood avait enfin compris : compris qu'on peut aussi faire du fric avec un peu d'intelligence, mais non... On ne demandait certes pas qu'ils remettent tout en cause, prennent des risques inconsidérés, réinventent un casting complet, non on ne demandait pas ça, nous aurions même compris, avec les yeux de Chimène, qu'ils en fassent le quart de la moitié du commencement, mais de là à considérer que nous serions suffisamment aveugles pour accepter ce pillage de tombe, ce viol en bande organisée, quel cynisme... Star Wars c'est un peu Sophocle qui demanderait à Beethoven de lui faire une bande son, mais ni l'un ni l'autre n'ont accepté cette fois de jouer le jeu, et on les comprend, reste ce film d'une tristesse infinie, oui : inconsolable je suis...