Un grand vent de romanesque souffle sur ce très beau mélodrame italien de Ferzan Ozpetek. Habitué à nous offrir de tels films, entre « Tableau de famille » au début de sa carrière ou plus récemment le très beau « Pour toujours », il signe ici sa première réalisation pour une plateforme et on regrette de ne pas avoir découvert ce beau film sur grand écran. Le cinéaste d’origine turc et exilé en Italie a toujours laissé poindre une sensibilité gay qui imprègne une bonne partie de son œuvre et « Nuovo Olimpo » ne fait pas exception à la règle. En nous contant, sur une bonne trentaine d’années, l’histoire d’amour manquée entre deux hommes à la sexualité libre (l’un comme l’autre ont une sexualité ambivalente où les femmes ne sont pas exclues, rendant le tout moins ancré dans le film de niche gay), il nous subjugue durant près de deux heures. Enfin, surtout dans le premier tiers qui est le point fort du film. Et qui en devient aussi conséquemment sa petite faiblesse. En effet, les quarante premières minutes qui narrent la rencontre de ces deux jeunes hommes dans un cinéma interlope de la fin des années 70, le Nuovo Olimpo, convoque aussi bien le « Cinema Paradiso » de Guiseppe Tornatore que tout un pan de l’âge d’or du cinéma italien. Les deux acteurs sont sublimes et leur alchimie est palpable sur chaque coin de la pellicule. On croit en leur coup de foudre qui transpire à l’écran et les scènes de sexe sont aussi belles, simples et pudiques que pouvaient l’être celles de l’autre superbe romance gay, plus axée sur la comédie, de l’an passé : « White Red and Royal Blue ». Le cadre de ce cinéma où les hommes gays se draguent est rare et précieux et la Rome d’antan est filmée de manière sublime. On est conquis, c’est beau, c’est fort, c’est puissant et on frémit de les voir se mettre ensemble. Puis, le scénario les sépare et le reste du long-métrage passe son temps à concevoir des rendez-vous manqués pour nous conter une belle histoire d’amour – toute aussi manquée - qui perd (un peu) de sa force originelle.
Dix ans plus tard, puis sur différentes périodes jusqu’à 2015, on suit donc ces deux hommes que la vie a séparé se louper à différentes reprises. « Nuovo Olimpo » évolue dans le milieu du cinéma et dans une Rome flamboyante et chic mais qui ne verse pas non plus dans le cliché de carte postale. En partie autobiographique, le film nous imprègne d’un certain goût de nostalgie qui culmine lors d’un final rêvé magnifique et troublant, de l’acabit du début et que n’aurait pas renié un certain Sorrentino du monstre « La Grande Bellezza », tout en évitant le happy end, ce qui le rend encore plus intense. Les seconds rôles féminins sont également impeccables, de la meilleure amie à la femme aimante qui finit par tout comprendre. C’est juste mais parcouru aussi d’une force tragique indéniable. Mais celle qui attire tous nos suffrages est celle qui joue Titi, la caissière du cinéma. Un personnage que n’aurait pas renié Almodovar (à qui l’on pense beaucoup en version italienne et un peu moins colorée ici). Ce personnage, Ozpetek lui dédie d’ailleurs son film, preuve qu’elle l’a marqué. On aurait aimé que les deux hommes se retrouvent un peu avant mais sans cela ce ne serait pas un mélodrame mais une comédie romantique. En tous les cas, « Nuovo Olimpo » nous touche, nous bouleverse et se suit avec grand plaisir, preuve du renouveau récent d’un cinéma italien en pleine possession de ses moyens. Et que dire du charme incandescent de Andrea Di Luigi et surtout Damiano Gavino qui irradie cette histoire filmée avec élégance et raffinement. Dommage donc que les meilleurs moments se situent au début, relâchant un tout petit peu notre passion en cours de route.
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