"J'aurai tellement voulu.. Nous élever tels deux anges, et comme par magie... Disparaître…", comment boucler magistralement un magnifique final, par une réplique aussi belle qu'elle ne résume le film à elle seule, cette histoire à la foi fantastique, périlleuse et unique racontant un sujet tabou pour le remplir de mystère.
C'est l'histoire de Brian Lackey, il se réveille dans une cave, saignant du né, ne sachant pas comment il est arrivé là. Depuis ce jour il se répète les mêmes cauchemars, il a peur du noir, il s'évanouit … En parallèle Neil McCormick vit une vie de gigolo pour effacer son traumatisme d'enfance, mais il ne supporte plus de vivre dans un "trou". Mais c'est à cause d'un mystère dont Brian veut la clé qu'ils vont être amené à se rencontrer.
"Mysterious Skin" c'est une oeuvre glauque et dérangeante. Avec un rythme sans faute son réalisateur Gregg Araki plonge dans la torpeur de l'inconnu cessant les provocations. C'est un film sur deux jeunes âmes perdues, ne sachant quoi faire et sans échappatoire à une vie frôlant la misère. Araki, avec une maturité impressionnante, filme cette histoire d'une façon construite et linéaire, ajoutant une voix off pour rendre encore plus crédible un cadrage des plus ingénieux et sophistiqués exploitant le hors champs à la quasi perfection comme notamment pendant la scène du viol ou les acteurs jouent en réalité séparément. Le film qui aborde plusieurs questions sexuelles, l'homosexualité, le sida, le viol, la pédophilie.. mais naturellement pour ces enfants le sexe est aussi inconnu que les extraterrestres le sont pour un adulte d'ou leur peur nourrissant un traumatisme à base d'énigme servant également à nourrir une histoire captivante, une histoire pratiquement chorale, au départ on ne sait pas ce qui lie les deux protagoniste qui ressemblent à un duo masculin de Diane et Camilla dans "Mulholland Drive" hanté par le ciel mystérieux et une mythique lumière bleue, ils n'ont rien en commun, l'un est une sorte de timide, misanthrope tandis que l'autre est un gigolo incarnant la jeunesse rebelle des années 2000, la vie de Neil et Brian a un impact géant, Araki ne cherche pas à les sublimer, il ne cherche pas le tape à l'oeil, il cherche la profondeur, rencontrer les personnages et les observer dans leur intimité, pourquoi ? Comment est-ce arrivé ? Le film prend tout son temps pour répondre jusqu'à son filant d'une beauté colossale .
"Mysterious Skin" c'est un peu le film "ça passe ou ça casse", coup esthétique ressemblant à une satire de la pédophilie par MTV, plus sentimental qu'un Larry Clark, plus psychologique qu'un Gus Van Sant. Poétique, mélancolique, romanesque, pop… déflagration émotionnelle nouant avec un scénario impossible.