Mieux vaut ne pas regarder ce film si vous avez le cafard, parce que c'est noir de chez noir. Réalisation impeccable avec une caméra qui bouge tout le temps, décors inspirés par l’expressionnisme allemand, photographie très réussie (il n'est qu'à voir ce plan magnifique du profil de Madeleine Ozeray). Interprétations magistrales de Pierre Blanchar et d'Harry Baur dans des registres complétement différents. Présence lumineuse de la très belle Madeleine Ozeray, musique d'Honegger. Bref un chef d'œuvre !
14 979 abonnés
12 680 critiques
Suivre son activité
4,0
Publiée le 26 septembre 2022
Les romans de Dostoïevski sont le reflet de sa vie : ses hèros sont rèvoltès, tiraillès entre le Bien et le Mal cherchant la vèritè et la paix de l'esprit! C'est le cas de "Crime et châtiment", l'une des oeuvres maîtresses de l'ècrivain russe qui connut - comme Rodion Raskolnikov - une vie de souffrances tant physiques que morales, vivant aussi dans la pauvretè! Un roman qui avait dèjà fait l'objet de nombreuses adaptations au cinèma! Mais celle de Pierre Chenal est sans doute la plus satisfaisante de toutes! La mise en scène est virtuose, très proche de l'expressionnisme allemand, de par son atmosphère onirique et sa musique angoissante! Et pour incarner l'inquiètant Raskolnikov à l'ècran, il fallait un acteur extraordinaire...et quel acteur que nous avons là! Pierre Blanchar livre une prestation hallucinante dont la ressemblance avec le tennisman Fabrice Santauro saute aux yeux! Seul le visage de Madeleine Ozeray illumine ce monde de noirceur...
La connaissance du roman de Dostoïevski est bien utile pour distinguer les idées de l'auteur (la misère humaine, la conscience, la culpabilité), que la réalisation de Pierre Chenal ne parvient que très partiellement à signifier. Précisément, la mise en scène est sans inspiration. Ce n'est pas elle qui formule, par la technique ou par le style, le sens de l'oeuvre, notamment les tourments de l'étudiant Raskolnikov après qu'il a assassiné la vieille usurière Aliona. Chenal s'en remet essentiellement à la composition hallucinée et expressionniste de Pierre Blanchar. Chargé d'exposer et d'expliciter les états d'âme de Raskolnikov face à sa conscience, face à l'inquisition doucereuse du juge Porphyre (Harry Baur), l'acteur fait un numéro étonnant et excessif, tout en grimaces et regards exorbités...dont parfois on ne devine même pas la signification! De fait, le jeu d'Harry Baur, dans les scènes que les deux acteurs ont en commun, apparait serein et léger. Ces scènes, auxquelles s'ajoutent celle du crime initial, sont les séquences éminentes du film. Les autres, avec la prostituée Sonia, avec la famille de Raskolnikov et son peut-être futur beau-frère honni, ne sont guère significatives du roman en raison, comme je l'ai dit, de l'incapacité de Chenal de nous en indiquer le sens, les motifs. Dès lors, les déambulations de Raskolnikov, des uns aux autres, finissent par ennuyer.