Kepler(s) s'inspire fortement de l'univers de Jean-Christophe Grangé, non seulement par son pitch (l'histoire des passagers a donné lieu à un livre très bon de Grangé et une adaptation télé correcte avec Jean-Hughes Anglade) mais aussi son format
(2 enquêtes qui se rejoignent (filles disparues, un migrant recherché); 2 flics opposé et cash; un univers quasi-documentaire par moments (sur les migrants à Calais, une thématique traitée de manière mitigée); un corps mutilé spécifiquement)
. Hélas, n'est pas Grangé qui veut, les 2 premiers épisodes mettent surtout en avant une avalanche de clichés
(l'ado caricaturale, la flic aux méthodes violentes et anti-migrants, sa mère qui est pro-migrants, son père qui est malade)
, des dialogues pas terribles, un aspect mythologique peu creusé, une investigation relativement molle et classique, et un caractère parodique étrange (le rôle de Serge Riaboukine irait parfaitement dans une comédie). Concernant la partie plus originale des "passagers" de Samuel, je regrette qu'elle ne s'exprime guère dans ces 2 premiers chapitres qu'au travers de "transitions" furtives et symboliques
(la cage, l'enfant, le gros violent)
, un bémol qui pourrait être résolu par la suite si on en croit le bon cliffhanger de l'épisode 2. Niveau interprétation, si Marc Lavoine est globalement convaincant dans "ses" rôles, je trouve que Sofia Essaïdi surjoue beaucoup la flic forte. Bref, j'attends mieux de Kepler(s) que la série policière quelconque qu'elle est à l'heure actuelle.
Concernant les 2 épisodes suivants, ils mettent en avant l'incapacité de la série à gérer la partie enquête et la trame de son personnage principal. En effet, on passe d'un épisode 3 entièrement axé sur Sam en potentiel coupable
(tatouage dans le dos, marque de tampon de bar sur le bras)
, tout ça pour délaisser la pauvre Alice (trop en retrait et en manque de réactivité face aux colères de Sam) et aboutir à un révélation pas intéressante du tout
(le médecin de Sam est amoureux d'une des identités de ce dernier)
, et on enchaîne par un épisode 4 uniquement focalisé sur l'enquête assez classique
(projet de port, migrants, corruption, signification des postures de statues) et une Alice déjà pro-Sam (ses doutes n'auront pas duré longtemps)
.
Globalement, ce que je retire de tout cela, c'est que Kepler(s) n'est pas aussi bonne que la série "Le Passager" adaptée de Jean-Christophe Grangé, qu'elle gère mal Alice, la femme de Kepler ou la question des migrants et que certaines répliques sont navrantes
(les c*** et les partouzes, les dialogues grossiers du commissaire)
. Bref, cette série est aussi perdue que son protagoniste principal.
Sur les 2 derniers épisodes, Kepler(s) ne s'améliore pas, l'épisode 5 restant sur des sentiers très balisés
(Sam viré, il enquête en solo et avance plus que les flics; Haddad suit d'autres pistes et tombe sur le meurtrier de manière attendue; des travailleurs clandestins embauchés et des migrants tués)
alors que le 6, libéré de la révélation du coupable (faite dans l'épisode 5), offre un déroulé poussif et ultra-formaté
(la flic tente de s'échapper, son collègue veut l'aider mais se fait tirer dessus, c'est Sam qui résout le tout et en finit avec ses passagers)
, léger sur l'histoire des passagers ou bien sur l'aspect familial, et assez catastrophique sur le personnage de commissaire, grossière caricature aux dialogues pathétiques. Côté casting, Marc Lavoine reste convaincant à défaut de briller, et Sofia Essaïdi continue malheureusement de surjouer.
En bilan, Kepler(s) aurait pu (dû) boucler le tout en 4 épisodes, ça aurait évité les longueurs. Pour le reste, la série utilise très faiblement l'atout originalité de son pitch, au profit d'une enquête aux ramifications souvent prévisibles et très aléatoires sur son traitement de la question des migrants.