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    En Thérapie saison 2 sur Arte : "on est au service d'un projet plus fort que nous" selon Emmanuelle Bercot
    Julia Fernandez
    Julia Fernandez
    -Journaliste Séries TV
    Elevée à « La Trilogie du samedi », accro aux séries HBO, aux sitcoms et aux dramas britanniques, elle suit avec curiosité et enthousiasme l’évolution des séries françaises. Peu importe le genre et le format, tant que les fictions sortent des sentiers battus et aident la société à se raconter.

    Nouveaux scénaristes, nouveaux interprètes mais aussi nouveaux réalisateurs : la série d'Olivier Nakache et Eric Toledano a fait peau neuve pour cette seconde saison. Rencontre avec les cinéastes qui ont relevé le défi de réaliser les 35 épisodes.

    Dans la nouvelle saison d'En Thérapie diffusée chaque jeudi soir depuis le 7 avril sur Arte, le psychiatre Philippe Dayan (Frédéric Pierrot) reçoit chaque jour de la semaine un nouveau patient, et chaque séance dans son cabinet équivaut à un épisode. Pour prendre en charge la mise en scène de ces 35 (!) nouveaux épisodes, Eric Toledano et Olivier Nakache ont fait appel à 4 nouveaux réalisateurs pour succéder à Mathieu VadepiedPierre Salvadori et Nicolas PariserAgnès Jaoui (Place publique), Emmanuel Finkiel (La Douleur), Arnaud Desplechin (Tromperie) et Emmanuelle Bercot (De son vivant).

    Jacques Weber, qui incarne  Alain, le "patient numéro 4" de Dayan, a été dirigé par cette dernière pour ses épisodes. Il connaissait la réalisatrice comme un admirateur lointain, en tant que comédienne et metteuse en scène, et appréhendait leur rencontre. "Je me disais qu'elle allait me prendre pour un théâtreux", s'amuse-t-il.

    Il décrit alors un véritable coup de foudre professionnel. "Les choses se sont faites le plus naturellement du monde, sans heurts, sans timidité, comme si c'était une évidence (...) Il m'est arrivé d'avoir la sensation d'être devant un véritable psychanalyste, et ça, ça ne peut se faire que s'il y a un texte fort et un metteur en scène suffisamment pudique, élégant et sensible qui vous accompagne."

    Il décrit une réalisatrice franche et directe, avec qui on ne s'arrange pas.  "Pendant le tournage, il m'est arrivé des moments douloureux dans mon existence, et [Emmanuelle] a témoigné d'une élégance, d'une pudeur... Elle n'a pas cherché à me réconforter. C'est terrible, les gens qui vous lèchent comme des chiens affectueux. Je me souviens d'un moment où, sentant que je n'étais pas bien avant de tourner, elle a juste pressé sa main sur ma cuisse en me disant : "on y va, tu es prêt ? Moteur." Ca a été très important pour moi.

    "J'ai la sensation d'être un peu un canard boiteux dans cette aventure", confie la réalisatrice de La Tête haute et La Fille de Brest, qui n'avait jamais travaillé auparavant sur un scénario qu'elle n'avait pas écrit et ne connaissait rien à la psychanalyse. "Dans mes propres longs-métrages, si j'ai une scène de deux personnes assises et qui parlent, c'est juste un cauchemar pour moi, je ne sais pas quoi en faire !" s'amuse-t-elle. 

    Ayant énormément d'affection pour Eric Toledano et Olivier Nakache, la réalisatrice déclare qu'elle n'aurait sans doute pas rejoint l'aventure si la proposition ne venait pas d'eux, elle qui a l'habitude de décider de tout sur ses tournages. "Je me suis alors raccrochée à la question que leur avait posée : pourquoi faire appel à moi, Emmanuel, Arnaud et Agnès ? Qu'est-ce qu'on pouvait apporter à un concept qui était déjà suffisamment fort et n'avait pas besoin de nous ?" interroge-t-elle.

    "J'étais inquiète de ne pas pouvoir inventer grand-chose en matière de mise en scène car c'est ça qui m'amuse quand je fais des films, et ils m'ont dit qu'ils pensaient à nous pour la direction d'acteurs. C'était ça l'enjeu principal de leur proposition, et on était comme des invités dans le salon."

    En thérapie
    En thérapie
    Sortie : 2021-02-04 | 26 min
    Série : En thérapie
    Avec Frédéric Pierrot, Charlotte Gainsbourg, Jacques Weber
    Presse
    3,9
    Spectateurs
    4,3
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    Il fallait ensuite trouver l'acteur qu'elle aurait envie de filmer, avec qui elle voudrait passer du temps. "Je me fiche complètement du personnage, ce qui m'intéresse c'est la personne que je filme. Il faut pouvoir amener le personnage vers la personne que je filme, plutôt que l'inverse, et que j'aie envie de raconter des choses de cette personne plutôt que du personnage."

    Un exercice qu'elle décrit comme extrêmement difficile, et un tour de force pour les acteurs. "Au cinéma, ils n'ont jamais à faire cette longueur de texte. C'est un travail qui ressemble beaucoup à celui du théâtre. Avec Jacques, on a fait des répétions comme on en aurait fait pour le théâtre, en mettant les choses au point très précisément avant de tourner. Au final, on est au service d'un projet qui est plus fort que nous."

    Eye Haïdara, qui joue Inès, la patiente qui ouvre le bal cette saison en devenant la patiente du lundi de Dayan, a été dirigée par Agnès Jaoui, comédienne, scénariste et réalisatrice. "Avoir Agnès pour vous accompagner, je peux vous dire que c'est du luxe", s'enthousiasme-t-elle. "J'étais entre de bonnes mains. C'est quelqu'un qui dirige beaucoup, et j'adore ça être accompagnée, savoir que je ne suis pas toute seule dans le bateau."

    L'actrice souligne la passion de la réalisatrice issue du théâtre comme elle pour la direction d'acteurs, et son expérience empirique des problématiques et "noeuds" dans lesquels les comédiens se retrouvent parfois. "Elle a vraiment été au plus près de moi, parfois assise à mes côtés pendant que ça tournait. on pouvait même se donner la main", se remémore-t-elle en riant. "J'étais vraiment à l'aise dans son regard, elle a réussi à rentrer dans ma tête."

    Arnaud Desplechin avait quant à lui la responsabilité des épisodes avec la jeune Lydia, interprétée par Suzanne Lindon. "J'ai été bouleversé par le rapport aux attentats dans la première saison. Quant à la psychanalyse,  l'objet de la série, je me suis dit que je ne pouvais pas rater ça, ni rater Nakache et Toledano, il en était hors de question. Je savais que je voulais apprendre avec ces deux hommes-là." Hasard de la vie, le réalisateur n'avait jamais tourné avec Frédéric Pierrot. "Je ne pouvais pas passer à côté d'un tel acteur et de cette collaboration."

    Pour le rôle de Lydia, le réalisateur et les deux showrunners voient de nombreuses actrices lors du casting, mais le choix de Suzanne apparaît comme une évidence. "Dans l'histoire de Lydia, il y a quelque chose qui va toucher au mélodrame, à la question des larmes. Je pensais à des cinéastes japonais comme Mizoguchi ou Naruse, en me disant que c'était quelque chose qui pourrait m'aider à dessiner ce rapport entre l'analyste et sa patiente, qui échappe à un rapport de séduction, à un rapport paternel, et qui s'approche peut-être plus d'un rapport d'amitié."

    "Regarder Arnaud diriger les acteurs m'a énormément appris sur ma façon de jouer et sur ce qu'un metteur en scène attend précisément de quelqu'un, mais aussi sa façon de se laisser porter avec son acteur", souligne l'actrice. "J'ai l'impression qu'il n'avait pas de point de vue précis sur la thérapie de mon personnage, et je pense qu'on a découvert ensemble la façon d'aller en thérapie. Ca a été extrêmement libérateur pour moi de voir qu'il n'y avait pas de bonne ou de mauvaise réponse, seulement une direction qu'on a prise ensemble avec Frédéric Pierrot."

    "L'éventail de ce qu'on a pu rencontrer comme réalisateurs, voir ce niveau d'exigence, de cinéphilie, d'échange qu'on a pu avoir avec chacun des réalisateurs c'est un luxe inouï pour nous", conclut Eric Toledano.

     

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