Suivre le quotidien de la BPM, unité négligée par les scénaristes et les réalisateurs, voilà qui promettait de l'inédit et du passionnant. Las ! Maïwenn, l'idole des bobos et autres gogos, a encore frappé, et ce "Polisse" est des plus ratés. La "réalisatrice" (et co-"scénariste") se contente d'agiter dans un shaker les ingrédients obligés : pédophiles de tout poil (grand-père, pères - dont un des beaux-quartiers pour faire bonne mesure, et même une mère aux méthodes d'endormissement originales, sans oublier un entraîneur sportif - ne manquent à l'appel qu'un prêtre ou deux, faute de temps sans doute), marmots roumains exploités, fugueuse gothique, mère droguée kidnappant son bébé, Africaine venant façon Misérables abandonner son enfant pour lui éviter la rue, père maghrébin qui a corrigé sa fille qui ne veut pas se laisser marier de force, tournantes, ado violée accouchant d'une pauvre crevette mort-née...et aussi une pincée de cybercriminalité. A noter, ces mineurs ne sont que victimes - battus, abusés de toutes sortes, en aucun cas délinquants (sauf quelques pickpockets sous influence et deux ou trois gamines complices de crimes ou délits sexuels commis par plus âgés qu'elles, et excusables parce que violentées elles-mêmes)... version plutôt angélique, voire manichéenne - bien sûr le mineur coupable, c'est moins vendeur. Côté représentants de l'ordre, figures imposées aussi : stress, mesquineries de la hiérarchie et petites rivalités (et même un suicide en apothéose), problèmes de couples, surtout... Le tout pimenté d'essais assez pitoyables à l'humour pour casser la tension causée par le sordide et l'ignoble des cas traités (voir ainsi le sketch du comment récupérer son "très beau" portable). Et pour n'oublier personne - tout ce petit monde s'exprimant volontiers avec un langage de charretier : hommes, femmes (dont une lesbienne alcoolisée), "beurette" féministe et Antillais bougon et sentimental - tout cela est très politiquement correct. Pas d'enquête unique qui pourrait intéresser, mais une succession de saynètes (voir ci-dessus) plus ou moins pertinentes et finalement répétitives, des grosses ficelles mélodramatiques et une romance insipide entre une photographe arrivant comme les cheveux sur la soupe (Maïwenn elle-même, qui n'a pu résister au plaisir de se mettre en scène, en dépit d'un talent d'actrice encore plus mince que celui de réalisatrice) qui abandonne un séduisant et fortuné compagnon (Francesco, alias Riccardo Scarmacio - nécessité d'une quelconque coproduction pour justifier cette quasi-panouille transalpine ?) pour l'inénarrable Fred (Joeystarr, qui n'a rien d'autre à faire ici qu'être lui-même, une racaille de banlieue touchée par la grâce du service public dans la fiction quand il l'a été par le rap et les gros sous dans la vraie vie - et dire qu'un concert de louanges salue sa "performance", on marche sur la tête !).
Il y a heureusement, le rappeur et la pseudo-réalisatrice prognathe mis à part, de bons interprètes, parmi lesquels je retiens personnellement Karin Viard (Nadine) et Frédéric Pierrot ("Balloo"). D'où la petite étoile que j'accorde à ce grandement immérité "Prix du Jury" du dernier Cannes.