"Je ne veux pas le faire, mais je sais que je dois le faire" : à Cannes 2025, Robert De Niro dévoile un projet secret et intime signé JR
Yoann Sardet
AlloCinéen pendant 25 ans, Rédacteur en chef de 2003 à 2025 - Fan de SF et chasseur de faux raccords et d’easter-eggs, cet enfant des 80’s / 90’s découvre avec passion, avidité et curiosité tous types de films et séries.

Invité et Palme d'honneur du 78e Festival de Cannes, Robert De Niro, si rare en interview, a accepté de participer à un échange public sur la Croisette. L'occasion pour lui et JR de dévoiler un projet documentaire secret, portrait intime du comédien.

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Une leçon de cinéma avec Robert De Niro. L'un des "Rendez-Vous" immanquables du 78e Festival de Cannes, qui a récompensé le monstre sacré hollywoodien d'une Palme d'Or d'honneur remise par Leonardo DiCaprio ce mardi lors de la cérémonie d'ouverture. Dans son mot d'accueil, le Délégué Général Thierry Frémaux lance aux festivaliers présents dans la salle Debussy : "Souvenez-vous de ce moment, vous pourrez dire j'y étais". Nous y étions. Et l'heure passée en compagnie de "Bob" a été aussi surprenante qu'inoubliable.

Un film secret avec JR

Déjà parce que le comédien est connu pour ses prises de parole mesurées. Voire très mesurées. Le modérateur de la rencontre, l'artiste JR, en a fait l'expérience, lui qui a parlé l'essentiel du temps de cette rencontre face à un De Niro parfois mutique, répondant en deux ou trois mots aux questions de celui qui tentait de percer sa carapace. "Je vous laisse imaginer nos journées de tournage", lance JR face à un De Niro amusé.

Et c'est là l'autre surprise de cette rencontre : tout le monde attendait une masterclass avec l'un des plus grands acteurs de l'Histoire (le plus grand ?), revisitant sa collaboration avec Martin Scorsese et ses rôles dans Le Parrain 2, Les Incorruptibles ou Mission. A la place, on assiste à un échange plus personnel, plus humain, plus profond, pour cerner -ou du moins tenter de le faire- la personnalité d'un Robert De Niro que JR a filmé dans le plus grand secret, lui qui a le privilège d'être intégré dans le cercle proche de l'acteur depuis une quinzaine d'années.

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De Niro par Robert

Ce projet artistique et documentaire, dont on a découvert l'existence et dont un premier aperçu a dévoilé par les deux hommes, est unique. Et les images bouleversantes. De Niro, d'ordinaire si secret, a accueilli JR dans l'atelier de son père artiste-peintre, qu'il a conservé en l'état. Au pinceau près. Ce qui devait être un tournage de quelques minutes a d'abord duré cinq heures, puis plusieurs jours, et s'est finalement étalé sur les trois dernières années, au gré des besoins et envies des deux hommes alors que l'acteur cherche à remettre son père dans la lumière, dont il l'a privé malgré lui.

Il découvre à travers JR le journal de son père qu'il n'avait jamais ouvert, des correspondances de ses parents qu'il n'a jamais lues, des oeuvres laissées par son géniteur mais aussi par sa mère dont il ne connaissait pas vraiment le travail d'artiste. Et devant la caméra, il échange avec ses enfants et partage même des images privées filmées par ses soins où on le découvre "papa-gâteau" en plein jeux avec ses enfants. ou souriant le jour de l'échographie de son dernier bébé. Bref, un De Niro comme on ne l'a jamais vu.

Sans maquillage. Sans effets spéciaux. Dans l'atelier regardant son fils atteint d'autisme peindre une toile. Recroquevillé sur un portrait géant de son père sur un bateau au large de New York. Tirant une toile gigantesque dans la campagne verdoyante entouré de moutons. Ou en pleine discussion avec "Marty" Scorsese (Leonardo DiCaprio et Sean Penn, entre autres, participent également au projet) sur un gigantesque échafaudage où est tendue une photo de lui enfant aux côtés de son papa.

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"Je ne veux pas le faire, mais je sais que je dois le faire"

L'approche est expérimentale, presque un film d'étudiant en cinéma. "On ne sait pas où ça va nous mener", explique un Robert De Niro totalement engagé, lui qui n'a jamais abandonné un projet. Même si celui-ci est parfois douloureux. "Je ne veux pas le faire, mais je sais que je dois le faire. Ça prend du temps, des périodes où peut-être que rien ne se passe, puis on y revient. Qui sait où cela ira. On continue, c'est tout. (...) C'est comme ça que j'aime faire. On prend le temps d'assimiler les choses, on reprend, on s'arrête, on revient plus tard... Il y a du concret là-dedans".

"On ne voit pas ça souvent, parce que les gens ont des deadlines, ils doivent finir et rendre les choses dans un certain temps. Mais à mon âge, c'est l'approche qui me semble le plus logique. (...) Le plus important, c'est de persévérer jusqu'au jour où l'on se dit qu'on en a assez dit. Au fur et à mesure qu'on travaille dessus, on le monte, on joue avec... Et si on n'a pas le temps de faire ce genre de choses, alors on trouve l'argent pour financer ça, sans se soucier de la date de sortie".

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"Ce n'est pas essentiel que je vois le résultat"

"Je ne sais pas quand on le verra ni quand il sortira, mais il sortira et il restera là pour toujours. Et c'est important pour mes enfants d'avoir ça. Mais ce n'est pas essentiel que je vois le résultat. Bien sûr, j'aimerais le voir un jour. J'espère. Mais sinon, vous trouverez des choses dans mes archives et vous les montrerez. Et une fois que je ne serai plus là, JR continuera à me filmer, il me posera des questions même dans mon cercueil !" (Rires)

Justement, quel regard porte t-il sur la mort, lui qui fêtera ses 82 ans en août prochain ? "J'ai peur, mais je n'ai pas le choix. Donc à partir du moment où je n'ai pas le choix, je dois l'accepter. On peut ne pas avoir peur, de plein de façons. En apprenant à embrasser la vie, en avançant, en prenant tout ce que la vie vous donne de bon ou de mauvais. Et voilà".

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