Après Meryl Streep et George Lucas l'année dernière, c'est l’acteur, réalisateur et producteur américain Robert De Niro qui reçoit une Palme d’or d’honneur pour l’ensemble de sa carrière, lors de la cérémonie d’ouverture de la 78e édition du Festival de Cannes.
Quatorze ans après avoir été Président du Jury, l'une des plus grandes stars du 7ème Art qui a marqué de son empreinte le milieu du cinéma par son jeu subtil, ses répliques culte et son visage mythique se voit remettre cet honneur au Festival du Cannes, et pas des mains de n'importe qui !
Leonardo DiCaprio remet la Palme d'honneur à Robert De Niro
Pour remettre la Palme d'honneur à Robert De Niro lors de la cérémonie d'ouverture de ce 78ème Festival de Cannes, c'est l'un de ses récents partenaires de jeu qui s'est déplacé : Leonardo DiCaprio avec qui il a partagé l'affiche dans Killers of the Flower Moon, présenté à Cannes en 2023.
Les deux acteurs fétiches de Martin Scorsese s'étaient déjà donné la réplique dans Blessures secrètes en 1994 mais n'avaient jamais travaillé ensemble pour Scorsese avant Killers of the Flower Moon, alors qu'ils auraient pu à plusieurs reprises jouer ensemble sur le plateau de Marty !
Le 78ème Festival de Cannes est l'occasion d'une nouvelle réunion des deux acteurs fétiches de Martin Scorsese. Leonardo DiCaprio a rendu hommage à "Bob", son oeuvre, sa carrière, son héritage et l'admiration qu'il inspire.
"Ce soir, j'ai l'insigne et l'honneur d'être là, devant vous, pour rendre hommage à quelqu'un qui, pour moi, et pour toute une génération d'acteurs de ma génération, a toujours été un modèle. Il était notre idole, Robert De Niro. L'œuvre de Robert De Niro. Là, vous le regardez dire: Ce n'est pas simplement le rôle qu'il a interprété, mais se décline aussi dans la façon dont il a inspiré les acteurs à traiter notre métier non pas comme une performance seulement, mais comme une transformation.
Je l'ai entendu à Los Angeles et comme tous les jeunes acteurs, bien sûr, nous le suivions, nous l'observions sous toutes les coutures. Essayons de comprendre comment il faisait à s'immerger complètement dans ses personnages. Il a été un modèle. Ça n'était pas juste un autre grand acteur, c'était l'acteur. Et j'ai fait partie de ces jeunes acteurs bénis qui ont eu l'incroyable chance de travailler avec lui, déjà très, très tôt, sur Blessure secrètes.
L'audition était difficile. Il y avait beaucoup de concurrence et personne d'entre nous ne savait qui aurait le rôle. Et quand on a 15 ans, on essaie de se différencier. Et la seule chose que j'ai trouvée à faire est que je me suis levé et j'ai hurlé vers lui du fond de mon âme et ça a été un concert de fou et âme.
C'est là, au cours de la journée, Bob, comme nous l'appellions, Robert De Niro, part et son producteur, Art Lundson, lui dit: 'Tu veux qui pour le rôle ?' Et typiquement, Robert De Niro, il répond: 'Je veux l'avant-dernier lors de l'audition'. Et fort heureusement, c'était moi. Et c'est là que ma vie a pris un tournant. Ça a été le début de ma carrière cinématographique.
Et ça s'est reproduit plus tard, lorsque Robert De Niro a dit à Martin Scorsese: 'J'ai fait ce film, tu devrais travailler avec ce gamin'. Ce qui a entraîné tout un tas de coopérations, de projets. Et voilà, c'est comme ça, Robert De Niro, Bob, comme nous l'appelons, il ne dit pas grand-chose, mais lorsqu'il parle, on l'écoute. Qu'il s'adresse à ses amis, à sa famille, qu'il s'engage pour la démocratie ou qu'il soutienne le cinéma, il est là et bien présent.
Bien sûr, Bob, comme nous l'appelons, n'est pas tombé dans la potion magique. Il a grandi et baigné dans les arts. Son père était peintre, un artiste sérieux qui était engagé vis-à-vis de la vérité par la créativité. Et on sent son influence dans le travail de Robert De Niro. Parce que tout ce qui était faux était écarté pour raconter la vérité, quelle que fut la complexité de ces vérités.
Il a appris à toute une génération d'acteurs comment se regarder dans un miroir et comment se parler. Ne mentez pas, vous l'avez tous fait.
Et puis, il y a ce partenariat légendaire avec Martin Scorsese. Ensemble, ils ont raconté les histoires les plus légendaires du cinéma des histoires sans compromis. Ils n'ont pas simplement fait des films, ils ont redéfini ce que le cinéma pouvait être. Ils ont élevé la relation entre acteurs et réalisateurs au stade d'un creuset, d'un partage des risques. Quelque chose d'inimaginable.
Lorsque mon père m'a fait voir les premiers films de Bob, Taxi Driver, Le parrain II, Voyage au bout de l'enfer, Raging Bull, etc., ce qui m'a impressionné, ce n'était pas simplement sa puissance apportée, c'était son calme, cette méticulosité dans l'interprétation des caractères, cet état d'esprit qui s'exprime parfois dans des moments silencieux. Et parfois, les scènes sans mots sont les plus fortes.
Et ça, c'est quelque chose que seuls les plus grands acteurs savent faire, c'est-à-dire vous emmener dans le fort intérieur d'un caractère sans un mot. Et soyons honnêtes, il a appris à toute une génération d'acteurs comment se regarder dans un miroir et comment se parler. Ne mentez pas, vous l'avez tous fait. Si vous connaissez Robert De Niro, et je pense que la plupart de vous, vous le connaissez, bien sûr, vous savez que oui, il aime se mettre sous les feux de la rampe, mais il aime aussi parfois un petit peu son intimité.
Et peut-être que si ce soir, il m'offre un tout petit sourire, pour moi, ce sera comme une innovation. Mais de temps en temps, même les plus grands monuments ont besoin de leur moment d'intimité et ont besoin de moments de reconnaissance, pas simplement pour le travail, mais aussi pour l'influence durable, l'attente qu'ils ont eue sur tellement de vies comme sur la mienne. Sans vouloir parler de l'univers de la planète cinéma, je dirais tout simplement, il n'y a personne d'autre qui mérite plus cette palme d'or d'honneur que monsieur Robert De Niro. Bob, félicitations et merci pour tout."
Palme d'honneur pour l'un des acteurs mythiques du cinéma
Quand on pense à Robert De Niro, on a évidemment sa réplique culte "C'est à moi que tu parles ?" ("You're talking to me ?", en version originale) de Taxi Driver de Martin Scorsese, qui deviendra avec les années un ami et un collaborateur de longue date.
Tantôt voyou ou grand gangster, antihéros ou figure paternelle tendre, compagnon de comédie ou second rôle touchant, Robert De Niro s'est illustré dans divers registres au cours de sa longue carrière durant laquelle il a collaboré avec les plus grands.
Brian de Palma, Francis Ford Coppola, Elia Kazan, Sergio Leone, Agnès Varda, Quentin Tarantino, James Mangold, Alfonso Cuarón, Barry Levinson, David O. Russell et Nancy Meyers ont eu la chance de faire tourner Robert De Niro.
À 81 ans, l'acteur peut se targuer d'avoir figuré dans 110 films, d'avoir remporté 2 Oscars et d'être l'un des plus grands acteurs de sa génération, qui a inspiré les générations suivantes, qu'il essaie toujours de guider à travers son discours de remerciements ouvert sur le changement, la diversité et le futur.
"Merci Léo d'être là avec moi et pour moi en cette soirée très particulière. Merci beaucoup au Festival de Cannes pour cette Palme d'or d'honneur. Merci infiniment au Festival de Cannes pour avoir créé cette communauté, cet univers, ce chez soi, pour tous ceux qui aiment raconter des histoires sur le grand écran.
Je suis venu pour la première fois en 1973 avec Martin Scorsese pour Mean Streets. Et 50 ans plus tard, avec Killers of the Flower Moon de Martin Scorsese également. Et entre les deux, pour ainsi dire, je suis venu avec des films de Bertolucci, Roland Joffé, Sergio Leone, John McNaughton, Irwin Winkler, Barry Levinson. Et puis ensuite, de nouveau avec Marty.
J'étais président du jury. Je suis venu en tant que fan cinéphile. C'est mon chez moi, ma communauté. C'est ici que j'aime réseauter avec les gens qui sont au festival. C'est une plateforme d'idées. C'est la célébration de notre travail et ça booste nos nouveaux projets. C'est ici que Paul Zimmerman, l'ancien critique de Newsweek, m'a donné à moi, à Martin Scorsese, le scénario qu'il avait écrit. On trouvait ça super et on l'a fait.
Et Cannes, ça a été vraiment un point de rencontre avec Jane Rosenthal, d'ailleurs, à l'époque, et avec Craig Hatkoff. Nous avons lancé le Festival de Tribeca en 2002. Notre but avant tout, c'était de réunir de nouveau les gens après les atrocités survenues au World Trade Center.
L'art est inclusif, il réunit les gens comme ce soir. L'art est en quête de la liberté. L'art inclue la diversité et c'est pourquoi l'art est menacé. C'est pourquoi nous sommes une menace pour les autocrates et les fascistes de ce monde. Le président philistin Américain, s'est nommé comme à la tête d'une de nos institutions culturelles. Il a tout simplement coupé les fonds pour les sciences humaines, pour la formation supérieure.
Il a annoncé maintenant 100% de droits de douane sur les films produits à l'extérieur des États-Unis. Mais dit-on, là-dessus à un moment, la créativité n'a pas de prix. Mais visiblement, on peut mettre des tarifs douaniers sur la créativité, ce qui est inacceptable. Et toutes ces attaques sont inacceptables. Et ce n'est pas simplement un problème américain, c'est un problème de portée globale. Contrairement à un film, nous ne pouvons pas nous détendre et nous asseoir.
Nous devons agir et nous devons agir aujourd'hui, tout de suite, sans violence, mais avec passion, avec détermination. Le temps est venu. Tout un chacun qui aime la liberté doit organiser, protester. Et le moment est venu aussi de voter lorsqu'il y a des élections. Voter, c'est très important. Ce soir, et dans les 11 jours à venir, nous allons montrer notre engagement en rendant hommage aux arts dans ce festival, la liberté, l'égalité, la fraternité."
Après cette Palme d'honneur, les festivaliers les plus chanceux pourront assister à une Masterclass de Robert De Niro donnée sur la scène de la salle Debussy du Palais des Festivals le mercredi 14 mai.
Le 78ème Festival de Cannes se tient du 13 au 24 mai 2025.