La Petite Dernière de Hafsia Herzi remporte la Queer Palm 2025 ! Cette distinction permet de mettre en lumière des films pour leur traitement des thématiques LGBTQIAA+ (homosexuels, bisexuelles, ou représentation de personnes transgenres, intersexes).

Ce film en compétition officielle à Cannes est l'adaptation du roman de Fatima Daas, également titré La Petite dernière.
La Queer Palm a notamment récompensé, dans le passé, Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma, Les Amours imaginaires de Xavier Dolan, ou encore Beauty d'Oliver Hermanus.
L'histoire de La Petite dernière suit Fatima, 17 ans, la petite dernière. Elle vit en banlieue avec ses sœurs, dans une famille joyeuse et aimante. Bonne élève, elle intègre une fac de philosophie à Paris et découvre un tout nouveau monde. Alors que débute sa vie de jeune femme, elle s’émancipe de sa famille et ses traditions. Fatima se met alors à questionner son identité. Comment concilier sa foi avec ses désirs naissants ? Le film sortira au cinéma le 1er octobre 2025.
Le jury était présidé par Christophe Honoré, entouré de Marcelo Caetano, cinéaste (Brésil), Faridah Gbadamosi, programmatrice (U.S.A), Léonie Pernet, compositrice et interprète (France), et Time Zoppé, journaliste (France).
Le jury courts métrages de la Queer Palm était composé des talents de la première promotion du Queer Palm Lab, Josza Anjembe (France), Nicolasa Ruiz Mendoza (Mexique), Andre Del Sur (Colombie), Andrea Segarra Bueno (Espagne) et Anthony Doncque (France). Il a choisi de récompenser Ananth Subramaniam pour Bleat !
La Queer Palm fête ses 15 ans
Créée en 2010, la Queer Palm fête cette année ses 15 ans. Avant la remise du prix, nous avons rencontré Christophe Honoré, réalisateur le plus souvent nommé pour la Queer Palm, et Franck Finance Madureira, fondateur du prix.
Comment s'annonce le prix pour ces 15 ans ?
Franck Finance Madureira : D'un point de vue cinéma, ça s'annonce bien parce qu'on a du choix. On a des films très différents. Les débats du jury vont être très excitants. On a un beau jury, il y a vraiment une diversité de points de vue, de regard.
Par ailleurs, il y a le point de vue viabilité de nos actions. On est dans une passe difficile parce qu'on ressent déjà les effets de ce que Trump laisse planer sur le monde, de la de façon dont les sujets LGBT ne sont plus à la mode quelque part, avec un engagement complexe, même au niveau du cinéma. On sent que ce sont des sujets sur lesquels on marche sur des œufs, maintenant. On y arrive grâce à tous les producteurs et distributeurs qui participent à ce pot commun. Je leur rends grâce car nous dépendons vraiment d'eux.
Quel est votre film queer préféré de toute l'histoire du cinéma ?
Christophe Honoré : Ça change tous les jours. Je vais vous citer un film de Pina Bausch, La plainte de l'impératrice. Il est fait par une chorégraphe qui, à un moment, se risque au cinéma. C'est un long métrage que j'adore, qui est à la fois dansé et qui est un très grand film queer. Il y a un côté hybride. C'est un film du début des années 80, d'une très grande liberté dans l'identification des personnages. Avec des thèmes qui traversent toute l'œuvre de Pina Bausch.

FFM : C'est un film que j'avais récompensé lorsque j'étais dans le jury des Teddy Awards à Berlin il y a quelques années. Un film brésilien qui s'appelle Tinta Bruta (Hard Paint) de Filipe Matzembacher et Marcio Reolon, sorti en 2019. C'est un film que je trouve absolument sublime. Leur nouveau film était à Berlin, ça s'appelle Night Stage. C'est aussi assez incroyable. Je crois que ça sortira en début d'année prochaine.

Un mot sur le Lab que vous avez lancé ?
FFM : Pour faire un peu l'historique, nous avons lancé un appel à projets l'année dernière. Lukas Dhont (réalisateur de Girl, Close) était le parrain de cette première promotion du Lab. Nous avons reçu énormément de projets. Nous en avons sélectionné cinq, qui ont été annoncés en septembre. Nous les avons emmenés en résidence au Mexique grâce au partenariat que nous avons avec le Festival de Morelia. Ils ont fait des rencontres avec des professionnels. On a eu une master class privée d'Ira Sachs, des rencontres avec Antoine Chevrollier, avec Nahuel Perez Biscayart. C'était vraiment un moment extraordinaire.
On a une productrice qui a dirigé la Quinzaine de réalisateurs, Marie-Pierre Macia, qui est un peu leur référence en script - scénario, qui leur fait des consultations. Ils ont aussi des consultations avec Lukas Dont sur leur dernière version de scénario.A Cannes, ils sont invités pour la deuxième semaine. Ils ont pitché leur projet, chacun. Il y a un Colombien, une Mexicaine, un Espagnol, une Française, un Français. Ils sont en quête de coproducteurs, de partenaires. On a l'appel à projets pour la deuxième édition du Lab qui est en cours, qui va se terminer la fin mai, sur le site queerpalm.org. On peut s'inscrire et on attend encore des projets. C'est Charlotte Wells, la réalisatrice d'Aftersun, qui sera notre marraine pour cette seconde promotion.
D'avoir un Lab comme celui-là fait encore plus de sens par rapport à ce contexte de frilosité dont vous nous parliez.
FFM : Ce lab est né du besoin qu'on a ressenti. On est un peu le référent queer au Festival de Cannes. C'est vrai qu'il y a plein de cinéphiles du monde entier, aspirants cinéastes, qui à la fois viennent au Festival de Cannes, qui à la fois le suivent de chez eux. On était très sollicités par des questionnements, notamment d'aspirants cinéastes qui se posent la question de savoir s'ils peuvent proposer un projet queer, une histoire qui est proche d'eux et savoir comment ça va être reçu par le milieu. Ils savent que c'est plus compliqué.
Je crois qu'il y avait un vrai besoin de créer une forme de communauté en forme de "safe space", une espèce d'endroit où on peut se parler. On sait qu'on peut se parler ouvertement de ce à quoi nos vies sont confrontées. Je pense que ça donne une liberté aussi extrêmement importante. En même temps, on essaye de leur offrir un cadre, de leur donner les armes pour qu'ils puissent mener à bien leur projet. Ce n'est pas parce qu'on va passer à une autre promotion qu'on va abandonner nos projets. C'est une communauté qui est en train de se former.
Propos recueillis à Cannes le lundi 19 mai 2025