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    "Bancs publics" : rencontre avec Bruno Podalydès

    A l'occasion de la sortie, ce mercredi, de la comédie "Bancs publics (Versailles rive droite)", AlloCiné a rencontré son réalisateur Bruno Podalydès. Il évoque le film, mais revient aussi sur les acteurs et actrices qui font son univers.

    AlloCiné : Après la parenthèse "Le Mystère de la chambre jaune" et "Le Parfum de la dame en noir", vous voici de retour à Versailles. Quel rapport entretenez-vous avec cette ville ?

    Bruno Podalydès : Déjà, j'ai un rapport familial avec cette ville puisque ma famille y vit toujours, donc j'y vais régulièrement. Ça a aussi été la ville de mes premiers tournages étant enfant, j'ai vu beaucoup de films qui se tournaient à Versailles. C'est pour moi un grand plateau de tournage avec de très belle qualités cinématographiques. Au niveau de l'éclairage des rues, au niveau de leur géométrie, on y trouve à la fois des recoins et de grandes largeurs... C'est ce qui me plait !

    AlloCiné : Mis à part la présence de votre frère Denis et le fait, justement, que l'action se déroule à Versailles, que relie "Versailles rive gauche", "Dieu seul me voit (Versailles-chantiers)" et "Bancs publics (Versailles rive droite)" ? Avez-vous d'autres choses à creuser dans cette ville ?

    Bruno Podalydès : La petite correspondance, c'est que les films commencent ou se ferment par des gares. Il est très possible que je tourne de nouveau à Versailles, il y a plein d'endroits que je n'ai pas filmés et que je trouve très beaux. Mais je n'ai pas de projet précis pour l'instant. Et si je faisait un nouveau film à Versailles, je ne le relierais peut-être pas à une gare. Maintenant que j'ai fait une trilogie et que j'aime bien le chiffre 3, ce serait sans doute quelque chose de très neuf la prochaine fois !

    AlloCiné : "Bancs publics" n'est-il pas déjà "neuf" ? A l'inverse des deux premiers opus de votre trilogie, où l'action était centrée sur le personnage interprété par votre frère, il n'y a pas, dans celui-ci, de personnage principal. Pourquoi un film choral ?

    Bruno Podalydès : Je n'aime pas le terme "choral", cela sous-entend que les acteurs joueraient tous la même musique, et moi je pense au contraire que chacun joue sa partition solo. Ils sont tous héros de leurs propres scènes, il y a très peu d'effet de groupe, de collectif. Les acteurs, je les ai tous appréhendés les uns après les autres, il y a très peu de scènes où ils étaient nombreux ensemble. Mais c'est vrai que pour ce film, j'ai adopté une démarche contraire. On était avec les deux précédents films dans le cerveau de quelqu'un, alors que là, on est entre plein de gens.

    AlloCiné : Vous avez réuni un casting incroyable pour "Bancs publics". Comment s'est fait le choix des comédiens ?

    Bruno Podalydès : Au coup par coup, pendant la préparation du film, très tardivement. J'ai assez rarement des acteurs en tête en écrivant. Là ou j'ai franchi un cap, c'est que j'ai accepté l'idée que même des petits personnages pouvaient être joués par de grands acteurs. Du coup, ça rééquilibre tout le film. Les petits rôles sont grandis. Quand de grands acteurs jouent des anonymes, ça veut dire que tous le monde est intéressant. C'est aussi, peut-être, en réaction à la "pipolisation" insupportable des temps modernes.

    AlloCiné : Avez-vous rencontré certaines difficultés à coordonner l'emploi du temps de vos comédiens, que l'on imagine très chargés ?

    Bruno Podalydès : Oui, beaucoup. C'était terriblement difficile à organiser, surtout que nous tournions par décors et que nous ne disposions pas d'un très gros budget ! Du coup, certains acteurs n'ont pas pu se libérer, à l'image de Sabine Azéma.

    AlloCiné : Vous avez déclaré dans le magazine Studio que le tournage du film "Le Mystère de la chambre jaune" avait été "le film le plus heureux que vous ayez fait, un film-soleil". Qu'en était-il du tournage de "Bancs publics" ?

    Bruno Podalydès : Celui-la était moins ludique, c'était un éternel recommencement. Je changeais d'acteur quasiment tous les deux jours, c'était un autre principe. Dans Le Mystère de la chambre jaune, on a été comme de grands enfants dans un parc à s'amuser, on dormait tous au même endroit, il y avait un petit côté colonie de vacances. Alors que là, au contraire, c'était un tournage en milieu urbain, très éclaté, un film kaléidoscope.

    AlloCiné : Bien que "Bancs publics" se déroule en partie en extérieur, vous imprimez au film une unité de lieu qui lui confère une atmosphère très théatrale. Verra-t-on, un jour, une pièce de théatre signée Bruno Podalydès ?

    Bruno Podalydès : Peut-être. Ce n'est pas exclu. C'est vrai que, parfois, je me dis que vu l'unité de lieu, ça aurait très bien pu être conçu pour le théatre. Mais j'aime tellement le cinéma que je ne suis pas convaincu d'y arriver. Je suis vraiment attaché à des choses propres au cinéma comme le cadre ou le mixage. Avec le théatre, une fois que ça s'arrête, ça disparaît, sans laisser de traces. Alors qu'un film continue à vivre une fois terminé.

    AlloCiné : Votre frère a joué dans tous vos films. Pensez-vous, un jour, faire un film sans lui ?

    Bruno Podalydès : A mon avis non, mais je ne suis pas du tout dans l'automatisme par rapport à ça. Mais c'est un très bon acteur, que je connais très bien. Donc, pourquoi me priver ?

    AlloCiné : On ne peux s'empêcher de voir une certaine filiation entre vos oeuvres et celles d'Alain Resnais. Qu'en pensez-vous ?

    Bruno Podalydès : Ce n'est pas à moi de le dire. En tous cas, j'ai une grande admiration pour Alain Resnais, qui a toujours fait en sorte qu'un film soit une expérience cinématographique nouvelle. Je trouve ça très stimulant. Il a des partis pris formels à chaque fois passionants. On peux prendre chaque film de Resnais sous l'angle du défi, de l'expérience.

    AlloCiné : Quelques mots sur des acteurs-clés de votre univers. Pierre Arditi...

    Bruno Podalydès : Pierre, j'adore à la fois sa précision en tant qu'acteur et sa capacité dans l'instant. Il est très perméable à l'instant. C'est à la fois une boule de billard dans sa régularité et sa précision, mais en même temps perméable à une petite phrase qui aurait été dite juste avant la prise. Il joue avec les gens.

    AlloCiné : Michel Vuillermoz...

    Bruno Podalydès : C'est un vieux pote. Michel est fascinant dans sa façon de regarder les choses, il a toujours un regard qui s'échappe un peu, qui lui donne beaucoup d'étrangeté. Je suis toujours surpris de l'existence qu'il donne à ses personnages.

    AlloCiné : Jean-Noel Brouté...

    Bruno Podalydès : Lui, c'est vraiment un acteur fait pour le burlesque, il a une précision avec son corps phénoménale. C'est le couple formé entre Jean-Noël et Denis dans Dieu seul me voit qui m'a donné envie de faire les Rouletabille et de les associer de nouveau à l'écran.

    AlloCiné : Isabelle Candelier...

    Bruno Podalydès : Isabelle possède un grand pouvoir de métamorphose. J'aime beaucoup la scène qu'elle a joué dans Bancs publics. Elle m'a enormément ému. Elle a toujours été considérée à juste titre comme une actrice comique, mais elle est capable de beaucoup d'autres choses.

    AlloCiné : Les Inconnus...

    Bruno Podalydès : C'est marrant parce qu'ils forment un trio tout en étant chacun très différent les uns des autres. Pour moi, c'est ce qui fait leur force. Ce sont trois très grands acteurs de cinéma, très fins, très dans le détail.

    AlloCiné : Un dernier mot sur Tintin, dont vous êtes un grand fan. Que pensez-vous du projet de Steven Spielberg d'adapter la BD au cinéma ?

    Bruno Podalydès : Pour moi, Tintin c'est très abstrait, c'est une forme d'art aboutie dans la bande dessinée et je ne pense pas qu'une adaptation cinématographique s'impose. Ni en dessin animé, ni avec des acteurs. Mais avec la 3D, Spielberg peut faire quelque chose de très beau visuellement : effet de profondeur dans l'espace, sous l'eau... Mais il y a aussi une dimension très européenne, voire belge, dans ces BD, que les Américains risquent de ne pas voir. A mon avis, on va perdre avec les personnages et gagner en action.

    Propos recueillis par Romain Pacchiele

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