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    "Tu viens dans ma ville ?" "Euh... non."

    Si grandir dans une petite ville vous a mortellement ennuyés, réjouissez-vous de ne pas être un personnage de série. Car dans ces univers de fiction, les petites villes sont toujours synonymes de secrets, de problèmes, de mensonges, de présence démoniaque, d'évènements surnaturels et bien sûr de meurtres... Mais pourquoi nous fascinent-elles et nous effraient-elles tout autant ?

    © Fox

    Une petite ville. De grands secrets. C'est la recette de bon nombre de séries américaines. Le 22 octobre prochain, ABC Family prolongera justement la tradition en lançant Ravenswood, le spin-off de Pretty Little Liars. L'histoire d'une petite ville, située non loin de Rosewood (où résident les Pretty Little Liars)  et qui est tourmentée depuis des générations par une malédiction sanglante... Cette saison, la chaîne américaine ne sera pas la seule à s'immerger dans une étrange petite ville aux secrets bien gardés. En 2014, le maître de la fin qui tue, M. Night Shyamalan lui-même, débutera en effet sa carrière sur le petit écran en proposant Wayward Pines, dans laquelle deux agents des services secrets disparaîtront après s'être rendus dans la petite ville de Wayward Pines. Un autre agent, incarné par Matt Dillon, sera alors dépêché sur les lieux et, dès son arrivée, il sera victime d'un accident de la route. Dans les deux cas, c'est donc le mystère, les secrets et le suspense qui seront le moteur de ces séries...

    Ces deux nouveautés sont loin d'être les premières à situer le lieu de leur action dans une petite ville et à lier toute la trame de leur intrigue à cette même ville. Mais pourquoi les scénaristes aiment-ils autant s'engager dans cette direction et pourquoi, nous, téléspectateurs nourris aux séries et aux films, répondons toujours présent à l'appel de la peur et de la fascination ? Au point de parfois, confondre fiction et réalité...

    Pourquoi les petites villes de fiction font peur...

    Raison n° 1 : Leur opposition aux grandes villes

    De nos jours, quand on regarde la télévision et, qu'au détour d'une scène, on découvre des cadavres en train de croupir dans des poubelles de New York, dans des allées sombres de Los Angeles, dans le désert de Vegas, sur un banc à Boston, dans une église à Chicago ou derrière un restaurant à San Francisco, cela ne nous étonne plus guère. En revanche, lorsque les méfaits et le mal (qu'il soit humain ou venu d'ailleurs) investissent une petite ville, c'est bizarrement plus terrifiant. Comme si "ça" ne devrait pas arriver "là". Comme si les petites villes devaient sentir bon le croissant chaud, l'apaisement, l'accueil, la chaleur humaine... la maison en somme.

    Raison n°2 : On plonge dans l'inconnu

    Si les scénaristes aiment autant ces petites villes, c'est aussi parce qu'elles leur permettent de créer un environnement nouveau. La naissance d'une petite ville de fiction est toujours une perspective excitante qui donne lieu à de nombreuses questions : quelle est l'histoire de cette ville ? Quels sont ses secrets ? Qui sont les habitants influents ? Qui partage un passé avec qui ? Des questions dont les réponses nous ont été données à de multiples reprises et qui se ressemblent très souvent, mais étrangement, dès que la ville change, la curiosité renaît. Toutefois, avec cette curiosité vient aussi la perspective de plonger dans un univers inconnu. Et quand tout est à découvrir, les surprises sont nombreuses et pas toujours du meilleur goût...

    Raison n°3 : La sensation d'enfermement

    Vivre dans une petite ville pour les héros de séries, c'est souvent l'occasion de se plaindre du manque de possibilités, de l'enfermement et du cloisonnement (Dawson l'a d'ailleurs bien illustré avec Capeside). Cette sensation d'enfermement donne souvent lieu à un véritable enfermement, au sens propre. La ville de Storybrooke dans la saison 1 de Once Upon A Time en est un parfait exemple : personne ne peut sortir, personne ne peut y entrer. Et ça, si ce n'est pas angoissant...

    Raison n°4 : Personne ne vous entendra crier

    Une petite ville de série, c'est plus petit qu'une grande (constat de l'année), mais c'est surtout beaucoup plus désert. En cas de pépin : pas de flics à l'horizon, pas de bouche de métro où se réfugier, pas de réseau pour appeler (c'est également toujours comme ça dans les films d'horreur), pas de badaud vers qui se tourner. Juste des rues pas éclairées, des bois qui font peur et les mêmes et éternels visages croisés depuis toujours.

    Raison n°5 : Et s'ils vous entendent, ils ne viendront pas vous sauver

    Ces mêmes visages qui se connaissent depuis toujours, c'est aussi ça le problème. Car si dans les grandes villes, on se retrouve noyé dans la masse, dans les petites villes, tout est beaucoup plus personnel. Tout le monde se connait, les secrets sont plus ou moins bien gardés, les rumeurs vont bon train et tout ça a de nombreuses répercussions. Du coup, lorsqu'un inconnu débarque, les habitants semblent plus enclins à se serrer les coudes qu'à tenter d'empêcher un truc super grave de se produire ou à livrer des informations. La mentalité insulaire des petites villes dans la fiction est très présente, on se méfie, on se protège...

    Raison n°6: C'est la faute à Stephen King

    Si les petites villes de fiction nous angoissent, c'est aussi la faute à Stephen King. Le maître de l'horreur a réussi l'exploit de pratiquement confondre le concept de petites villes avec ses oeuvres. Du coup, quand, dans la vraie vie, on s'arrête dans une petite ville américaine, on a désormais toujours l'impression qu'il y a vraiment un truc qui cloche dans les parages : un clown cauchemardesque, un chien enragé, une fille douée de télékinésie... Et que tout le monde nous fixe bizarrement. Avec ces Castle Rock et ces Derry, Stephen King nous a fait un lavage de cerveau.

    Raison n°7 : C'est la faute à Twin Peaks

    Stephen King n'est pas le seul à avoir marqué au fer rouge notre approche des petites villes. Car rayon ville étrange où tout le monde est bizarre et a plus de secrets que tous les new-yorkais réunis, Twin Peaks se pose là. La ville fictive créée par David Lynch est le terreau de fantasmes aussi terrifiants que séduisants. Twin Peaks nous effraie, nous fait rire, nous cajole, nous terrorise, nous charme, nous sidère, nous fait reculer...

    Raison n°8 : Les Urban Legends

    Si l'on a tous en nous quelque chose de Stephen King et de Twin Peaks, on a également tous en nous des sales histoires sanglantes qu'on prétend ne pas croire mais auxquelles on repense quand on tombe en panne sur une route déserte. Des légendes urbaines qui contribuent, elles aussi, à alimenter notre paranoïa en nous racontant comment des mecs trop cools tombent en panne de voiture, sortent l'un après l'autre voir ce qui se trame dehors (il fait nuit bien sûr) et disparaissent les uns après les autres. Le dernier entend un clic cloc clic cloc. Et forcément, c'est toujours du sang.

    Raison n°9 : Les faits divers

    Et même pas besoin d'entendre des légendes urbaines pour se méfier des petites bourgades américaines. A force d'entendre tous ces faits divers qui nous font entrevoir le pire de l'humanité... puis de les voir portés à l'écran dans nos séries (dans TOUTES les petites villes qui font déjà peur), il y a de quoi se sentir mal....

    A l'instar des scénaristes qui semblent toujours aussi inspirés par cette matière, nous sommes nombreux à être aujourd'hui autant fascinés que rebutés par les petites villes et par l'atmosphère qu'elles dégagent. Evidemment, la "malédiction" des petites villes dans les séries revêt toutes sortes de formes. On a bien entendu la ville qui cache un lourd passé, la ville dont les habitants ne sont pas ce qu'ils paraissent, celle où le surnaturel vit au grand jour ou encore celle, plus proche du réel, qui donne une vision peu glorieuse des Etats-Unis... Exemples !

    La petite ville aux monstres

    C'est certainement la catégorie qui accueille le plus d'exemples. Qu'ils soient des loups garous, des vampires, des créatures non identifiées et surnaturelles, ils viendront systématiquement demander l'exil dans ces villes-là. Les frères Winchester de Supernatural en sont des témoins privilégiés et ont écumé des centaines de petites villes comme celles-ci chassant des monstres ultra flippants. De leur côté, Mulder et Scully ont également visité de nombreux petits "coins de paradis" pleins de gens charmants dans X-Files. Quant à la ville d'Haven, elle est le repère de tous les évènements les plus étranges. Mais, même à l'intérieur de cette catégorie, les cas sont donc bien différents...

    Mystic Falls, par exemple, a une riche et essentielle histoire dans Vampire Diaries. La ville est née grâce aux Familles fondatrices et est le foyer depuis des siècles de sorcières, vampires et loups garous. A Beacon Hills, ville fictive où se déroule Teen Wolf, les créatures de la nuit font également légion, tout comme à Sleepy Hollow ou encore Bon Temps (True Blood), petite ville de Louisiane fort sympathique mais qui cache de nombreuses choses beaucoup moins sympathiques. Ne parlons même pas de Point Pleasant qui cache l'Antéchrist ou bien de notre exception à la française, Les Revenants, qui abrite dans sa petite ville de montagne... et bien des revenants.

    A Sunnydale, la vie se déroule autrement. Située dans une banlieue à proximité de Los Angeles, la ville de Buffy abrite la bouche de l’enfer et, du coup, attire toutes les bêbêtes du monde et tous les évènements bizarres (on peut devenir invisible à Sunnydale par exemple). La plupart des adultes de Sunnydale sont d’ailleurs totalement aveugles à tous ces évènements étranges… Dans Marshall et Simon, c'est un peu la même affaire. Seuls les deux héros sont au courant que leur ville, Eerie (en Indiana), est le théâtre d'étranges évènements. A Smallville, petite rurale qui sent bon le maïs, tout était normal et paisible jusqu'à ce qu'une pluie de météorites ne la transforme en théâtre d'évènements inexplicables...

    La petite ville du "réel irréel" où il se passe décidément  trop de choses

    Il y a des villes où les monstres n'existent pas mais où le mal, dans sa version humaine, est particulièrement présent. Elles ressemblent donc au réel mais en font beaucoup trop rayon rebondissements pour que cela soit réel (pour notre plus grand plaisir). Cet exemple convient parfaitement à la ville de Neptune (Veronica Mars) où des meurtres sont parfois commis et où c'est toujours Logan qui est accusé. Les habitants sont presque tous des pourris, des menteurs et des voleurs professionnels. De la même manière, la petite ville dans laquelle viennent s'installer Norman Bates et sa mère, White Pine Bay, est elle aussi le théâtre de plein de délits et de crimes, d'un genre beaucoup plus glauques, Veronica Mars ayant toujours réussi à nous ramener le sourire sur le visage. La Charming des Sons of Anarchy est différente dans le sens où elle ne nous est pas présentée dans un aussi large éventail que Neptune. De Charming, on voit essentiellement le club des Sons of Anarchy, ce qui suffit amplement à nous faire passer l'envie d'emménager.

    Dans Desperate Housewives, ça sent bon le frais, le bonheur, la famille parfaite, c'est plein de petites barrières blanches, de jolies tulipes sur des parterres fraîchement arrosés... Mensonge ! A Fairview, ça sent surtout le cadavre dans le placard, les médisances et les secrets. C'est bien simple, les habitants auraient pu être très heureux mais, non, ils ont toujours préféré leurs sales petits secrets...

    La petite ville du réel qui fait peur

    Mais, parfois, il n'y a même pas besoin de loups garous, de vampires ou de sorcières, il n'y a même pas besoin de l'élement surnaturel ou d'exagérer le tableau pour créer la méfiance. Un exemple avec la dernière série en date à livrer une vision brillante mais terrifiante d'une petite ville américaine : Rectify. A Paulie, nous avons droit à une peinture qui semble tellement authentique qu'elle en devient glaçante. Ici, un homme innocenté pour un meurtre commis 20 ans plus tôt sera toujours coupable. La bêtise et l'intolérance font légion, la communication n'est pas recommandée. Et la violence est partout. Même lorsque personne ne semble être dans les parages, elle est totalement assourdissante et terrifiante... Et finalement, c'est ça qui fait presque le plus peur.

    Raphaëlle Raux-Moreau

    --- PROCHAINEMENT LA SUITE DE NOTRE FEUILLETON SUR LES PETITES VILLES ---

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