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    Lumière 2016 : Masterclass de Park Chan-Wook, le réalisateur qui a redéfini le cinéma coréen

    C’est devant la salle pleine du Comédie Odéon que Park Chan-Wook a donné sa masterclass au cours de laquelle il a parcouru sa carrière, de l’échec de ses premiers films à Mademoiselle, qui sort le 1er Novembre 2016 en France.

    Gauthier Jurgensen

    Si un cinéaste coréen déchaîne toujours autant les passions en France, c’est Park Chan-Wook, le réalisateur d’Old Boy, venu au Festival Lumière présenter Mademoiselle, son dernier film reparti bredouille du Festival de Cannes. Avant cet échec, le metteur en scène avait été récompensé en 2004 par le Grand Prix pour Old Boy (remis par Quentin Tarantino, président du jury), ainsi qu’en 2009 par le Prix du Jury pour Thirst, ceci est mon sang (remis par Isabelle Huppert).   

    Pour sa masterclass au Grand Lyon Film Festival 2016 présentée par le critique et cinéaste Yves Montmayeur, de jeunes admirateurs de tous horizons sont venus écouter le metteur en scène, y compris le slameur Abd Al Malik. La conférence s’est ouverte sur l’utilisation de la violence dans les films de Park Chan-Wook, une violence qui vient toujours déstructurer un univers peut-être trop civilisé.

    "Je vous assure que je ne joue pas avec la violence. Je dirais plutôt que je n’évite pas la violence, parce qu’elle est inévitable lorsqu’on veut parler de la société. Je pense plutôt que l’humain peut être élégant comme il peut être bas et violent. Et je m’applique à décrire l’être humain dans son intégralité."

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    S’il est un thème récurrent chez Park Chan-Wook, c’est bien celui de la vengeance qui lui a inspiré une trilogie, initiée en 2002 par Sympathy For Mr. Vengeance, et suivi de Old Boy en 2004 et de Lady Vengeance en 2005. Cette vengeance semble toujours dirigée contre les puissants, oppresseurs des classes sociales défavorisées.

    "Les vengeances dont je parle vont au-delà de l’aspect moral. Je veux surtout montrer la sympathie qu’il faut témoigner à celui qui veut se venger. Un enfant de dix ans sait déjà que, lorsqu’on veut se venger, on ne cherche pas à savoir à qui le crime profite, ni aux conséquences de son acte vengeur. Quand on perd sa fille, par exemple, on sait parfaitement que la vengeance ne ramènera pas l’être perdu. Pourtant, la personne qui cherche à se venger mettra toute son énergie à assouvir sa vengeance. C’est ce qui différencie l’homme de l’animal, selon moi. C’est un acte de désespoir."

    Dans Mademoiselle, dernier film de Park Chan-Wook, les deux personnages principaux sont des femmes liées par une passion dévorante. Le cinéaste a tenu à rappeler à quel point il s’est intéressé tout au long de sa carrière aux héroïnes à fort tempérament autant qu’aux hommes pour emmener ses films.

    "Je suis souvent attiré par des héroïnes au caractère fort. C’était déjà le cas dans Lady Vengeance, ainsi que dans Stoker. Sauf que dans ce dernier cas de figure, les deux héroïnes étaient ennemies. Pour Mademoiselle, ce sont deux amantes. J’ai tout de même préféré tourner Mademoiselle car l’histoire d’amour a facilité le dialogue avec les actrices. Je vis avec mon épouse et ma fille, donc je suis plus habitué à parler de relations apaisées que de conflits. En plus, ma comédienne Kim Tae-ri était fan de sa partenaire à l’écran, Kim Min-hee, qui est une star en Corée. Elle l’a donc prise sous son aile."

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    Le réalisateur coréen est aussi revenu sur son expérience américaine, puisque son film Stoker s’est tourné aux Etats-Unis en 2012 avec Nicole Kidman et Mia Wasikowska dans les premiers rôles. Une aventure qui lui a appris de nouvelles méthodes de tournage.

    "Mon travail aux Etats-Unis m’a influencé pour ce nouveau film, mais pas forcément sur le plan artistique. J’y surtout appris à tourner beaucoup plus vite. Presque deux fois plus que d’habitude."

    Même si Park Chan-Wook n’aime pas travailler dans l’urgence, il sait s’adapter aux contraintes et a pu appliquer cet enseignement à son dernier film, sans pour autant sacrifier le travail de mise en scène au scénario, mais en réajustant ses priorités.

    "Pour moi, la mise en scène est un élément qui peut aider à mieux exprimer la psychologie des personnages. C’est important, mais c’est surtout les dialogues et le contexte qui comptent. Je ne veux pas dire que la façon de tourner les scènes soit secondaire, mais que les deux sont essentiels. C’est par la mise en scène qu’on sublime un scénario. D’ailleurs je mets beaucoup de temps à étudier mes mises en scènes, à dialoguer avec le chef décorateur et le directeur de la photo. Ensuite, je fais mon storyboard et tant qu’il est précisément respecté, je n’ai pas à me plaindre."

    Le metteur en scène a quitté la salle sous un tonnerre d’applaudissement après avoir répondu à quelques questions du public, dont une posée par une étudiante en cinéma, actuellement plongée dans la rédaction d’un mémoire consacré à la Trilogie de la Vengeance. Park Chan-Wook s’est permis de lui glisser un conseil : ne jamais demander à un cinéaste de s’expliquer sur ses œuvres, car il est toujours le moins bien placé pour analyser objectivement son travail…

    La bande annonce de Mademoiselle, dernier long métrage signé Park Chan-Wook

     

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