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    Nicole Garcia au Festival du Film Britannique de Dinard : "je suis étonnée par la qualité de ce que je vois"

    Entre deux projections, la présidente du jury Nicole Garcia a accordé un entretien à AlloCiné. Elle y évoque son affection pour le cinéma d’outre-Manche ainsi que pour la sélection 2017.

    Denis Guignebourg / Bestimage

    AlloCiné : Saviez-vous qu’un film sur cinq qui reçoit le Hitchcock d’Or à Dinard ne sort malheureusement jamais en France ?

    Nicole Garcia : C’est vraiment désolant qu’ils n’arrivent pas tous à trouver un distributeur. On voit bien à ce chiffre que, selon les goûts des différents jurys, il y a des films qui plaisent énormément mais qui n’arrivent pas à séduire sur le plan commercial. C’est tout de même rassurant de se dire que, même si un long métrage ne convainc pas un distributeur, il peut tout de même être considéré comme le meilleur. Il faut que les deux concordent, mais ça n’arrive pas toujours.

    Vous êtes la douzième présidente du jury. Il y a aussi eu quatorze présidents. Belle parité, non ?

    C’est vrai que c’est étonnant et exemplaire. Ce n’est pas à Cannes qu’on pourrait revendiquer une telle parité !

    Par contre, une seule réalisatrice a décroché le Hitchcock d’Or, malheureusement. C’était Clio Barnard en 2013 pour Le Géant Egoïste.

    Comme à Cannes, avec Jane Campion en 1993. Mais je ne pense pas qu’il y ait de misogynie de la part des sélectionneurs. Il y a encore aujourd’hui moins de femmes metteurs en scène que d’hommes. Ce matin, on a justement vu un film de femme : Pili de Leanne Welham. C’est la seule réalisatrice de la compétition sur six films. On en trouve simplement moins. Hussam Hindi, le sélectionneur du Festival de Dinard, n’a certainement pas mis une barrière aux femmes. Cette récolte 2017 est comme ça, il ne faut pas y chercher un ostracisme. On dit ça chaque année de Cannes aussi, en accusant Thierry Frémaux le premier.

    Un seul cinéaste récompensé à Dinard a été, plus tard dans sa carrière, sélectionné en compétition officielle à Cannes : Michael Winterbottom. Est-ce qu’on a du mal à s’ouvrir au cinéma britannique en France ?

    On aime beaucoup Ken Loach et Mike Leigh, mais on a peut-être eu le tort de s’arrêter à ça. Ce sont deux cinéastes qui "ont la carte", comme on dit. Quoi qu’ils fassent, ils vont à Cannes. Ils font passer les têtes de série en premier.   Est-ce qu’on sait bien regarder dans le cinéma britannique tout ce qui s’y trouve ? Moi, je suis étonnée par la qualité de ce que je vois. C’est très surprenant qu’on ne voie pas davantage de jeune cinéma anglais à Cannes. La qualité des comédiens notamment, dans ce cinéma, est extraordinaire.

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    Pourquoi le cinéma britannique est-il si particulier ?

    Ils abordent les questions sociales tout à fait différemment qu’en France. Chez nous, quand on va voir des films sociaux, on a toujours l’impression de voir quelque chose de presque journalistique, souvent pesant, un peu didactique… Chez eux, il y a toujours le regard d’un artiste. Ils choisissent un angle particulier. Ce n’est jamais un procès social comme pourrait le faire un essayiste ou un documentariste. Eux, ils parviennent à prendre un angle fictif et à dire les mêmes choses, mais de manière beaucoup plus profonde, plus émouvante, avec le regard d’un artiste. Et puis le cinéma britannique est très varié ! Il peut être cocasse, mélancolique… Et quand ces qualités viennent en complément d’un thème social, ce cinéma me touche davantage que lorsque cela vient de chez nous, ou même de Belgique (pour ne citer personne).

    Avez-vous un film britannique qui vous a particulièrement marquée ?

    Pour des raisons très personnelles, j’avais un jour vu Family Life de Ken Loach et je n’ai pas pu rester dans la salle tant j’étais assaillie d’émotions. Le moment où l’héroïne perd sa dernière chance d’échapper à sa famille et où elle va une dernière fois se faire récupérer par sa mère… C’était trop dur pour moi.

    Qu’avez-vous vu jusque maintenant et avez-vous eu un coup de cœur ?

    On peut le dire ? Non, je ne crois pas. (Rires) Ce que je peux vous affirmer, c’est que je ne pensais pas me retrouver devant une aussi belle sélection. J’ai vu des amis ressortir des festivals de Deauville ou d’Angoulême cette année, qui avaient trouvé la sélection faible. Je suis arrivée ici en pensant que je m’installerais dans mon fauteuil et que je penserais à autre chose. Au contraire : on a vu cinq film sur les six et j’y ai découvert un véritable intérêt, un univers, des personnages, des caractères… C’est très vivant ! Daphne et England Is Mine m’ont beaucoup plu, Pili a beaucoup divisé le jury... La délibération ne va pas être aisée du tout.

    Travaillez-vous actuellement sur un film ?

    Oui : ce sera une histoire contemporaine, contrairement à Mal de Pierre. Ça se passera en trois actes, dans le 94, en banlieue parisienne. L’histoire emmènera les héros en Océanie, puis à Genève, sur les bords du Lac Léman. Ça concernera trois personnages : il y aura encore une femme qui hésite entre deux hommes, mais pas du tout de la même façon que dans mon précédent film. Il y a une histoire d’amour, une intension meurtrière… Ça pourrait être tiré d’un roman noir, mais c’est un scénario original. Pour l’instant, il porte pour titre le nom du personnage principal : Lisa Redler. Mais c’est presque un peu trop "modianesque", non ? Mais si vous aimez bien, je le garde comme ça. (Rires)

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