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    Voyoucratie de FGKO : "Les films qui nous ont le plus influencés sont Pusher et Un prophète."

    A l'occasion de la sortie de "Voyoucratie", AlloCiné a rencontré FGKO, ce duo de réalisateurs à l'origine de ce thriller sec et réaliste se déroulant en banlieue parisienne.

    AlloCiné : Voyoucratie est votre premier long métrage. Qu'est ce qui vous a donné envie d'aborder le thème de la délinquance ?

    FGKO : Voyoucratie est avant tout une envie de cinéma, l'envi de parler d'un personnage isolé, en marge, que la société a mis sur le banc. Quelqu'un d'assez solitaire, qui se fait tout seul et qui ne respecte rien. La voie de la délinquance représente alors pour lui le seul moyen d’accession rapide à un « statut », des moyens financiers pour subsister et assouvir ses envies.

    C'est un voyou qui vit de ses délits mais il n'est pas l'archétype du dealer de cité qui évolue dans un réseau. C'est un électron libre, assez nihiliste, égoïste mais qui va prendre conscience qu'il a un gamin et cela va l'amener à changer son regard sur la vie. Il nous a semblé intéressant d'opposer la violence, qui pouvait être issue de cette délinquance, à l’innocence qui se dégage du monde de l'enfance.

    Parler de la cité ou des quartiers n'était pas notre but initial. Ce n'est qu'un décor qui nous a inspiré. Nous avons côtoyé des personnes qui avaient choisi cette voie. Certains en sont revenus, d'autres ont mal tourné. Chacun a sa propre expérience de la délinquance, chaque "voyou" est différent.

    Ce qui nous a intéressé, c'est d'être dans l'intimité d'un petit délinquant qui subitement se retrouverait face à une responsabilité dont il ne veut pas. Puis petit à petit, lorsqu'il va se retrouver confronter à de gros ennuis, à un danger imminent, la vie va le ramener vers ce qu'il y a de plus essentiel et il va prendre conscience de cette paternité qu'il ne pourra plus ignorer. Finalement, il va comprendre que c'est sa seule porte de sortie.

    La Vingt-Cinquième Heure

    Le film a-t-il été difficile à financer ?

    Oui. Il n'a pour ainsi dire pas été financé car il sort du cadre normal de la fabrication d'un film. Notre envie était de commencer à tourner tout de suite, sans l'approbation de personne alors on a commencé seuls, avec nos propres économies. On a par la suite monté notre structure juridique pour conserver les droits du film. La rencontre avec une productrice puis un producteur nous a permis de financer Voyoucratie à hauteur de 100 000 euros, ce qui est dérisoire quand on sait ce que coûte normalement ce genre de film.

    On voit beaucoup de scènes qui ont été tournées en extérieurs, que ce soit dans Paris-même ou en banlieue. Quelles ont été les principales difficultés de tournage ?

    Pour nous, notre envie principale était de faire émerger une vérité de cette histoire et ce personnage. Nous étions constamment dans cette recherche et n'hésitions pas à improviser des scènes avec les comédiens selon nos ressentis et notre instinct sur les lieux de tournage. Nous étions dans un opportunisme constant, prêt à saisir ce qui nous apparaissait pertinent ou intéressant au moment de shooter. Mais pour aller au bout de cette recherche, de cette exploration, il faut du temps. Et comme le matériel de tournage coûte cher et qu'une équipe de techniciens ne peut pas nous servir éternellement si on a pas de quoi les payer, il fallait aller très vite, un peu dans la précipitation. Mais cette urgence permanente, cette situation de crise fait que l'on mobilise une capacité d'adaptation créatrice assez incroyable, alors ce n'est pas complètement une mauvaise chose. Ce fut l’énergie de ce film, qui lui donne ce caractère fort et singulier.

    Nous avions cette envie de faire un film coup de poing, à l'épaule, proche du docu-fiction, pour lui donner un caractère authentique, avec une sensation de réalisme très forte.

    Quels ont été vos choix de mise en scène et pour quelles raisons ?

    Avant même d'aborder les problématiques de tournage, nous avions cette envie de faire un film coup de poing, à l'épaule, proche du docu-fiction, pour lui donner un caractère authentique, avec une sensation de réalisme très forte. Nous voulions encrer cette réalité dans de la fiction pour lui donner un style unique. La caméra portée permet d'être très proche du personnage et de rentrer dans son intimité. Nous avons privilégié les courtes focales toujours dans cette idée de réalisme, pour ne rien occulter à l'image et ne pas donner un caractère trop esthétisant qui irait à l'encontre du réalisme.

    Avez-vous eu des références (cinématographiques ou autres) en réalisant Voyoucratie ?

    Nous avons grandi et baigné dans les films de gangsters américains de toute la période « 70-90 » comme L'Impasse de Brian De Palma, Scarface, les films de Scorsese comme Mean Streets, donc nous avons forcément des influences que nous ne pouvons nier mais je dirais que les films qui nous ont le plus influencés pour Voyoucratie sont Pusher de Nicolas Winding Refn et Un prophète de Jacques Audiard. Pusher possède cette identité de film proche du docu-fiction, dans l'intimité chaotique de petits délinquants au Danemark. Un prophète pour cette sensibilité à fleur de peau, cette quête de lumière dans l'obscurité. Nous pensons qu'on retrouve un peu des deux dans le film.

    La Vingt-Cinquième Heure

    Voyoucratie est-il un film à message ?

    Ce serait prétentieux de dire que c'est le cas car on a pas fait le film dans le but d'avoir un discours sur la délinquance ou les quartiers. Après chacun peut y voir le message qu'il veut. Il est question de rédemption, de paternité, de seconde chance, alors qui sait...

    Le film est presque entièrement centré sur le héros Sam. Pourquoi avoir choisi Salim Kechiouche dans le rôle principal ?

    Au départ nous voulions que notre personnage ait une apparence passe-partout avec une gueule qui dénote un certain vécu, un regard intense, qui laisse présager du vice mais aussi une forme de détermination. On a pensé à plusieurs comédiens français puis nous avons envisagé un personnage issu de l'Europe de l'est. Les circonstances ont fait que nous avons rencontré Salim Kechiouche. En plus d'avoir un vrai feeling pour lui, ayant grandi dans une cité sensible de la banlieue lyonnaise (Vaulx-en-Velin), il nous a convaincus qu'il était l'homme de la situation et qu'il saurait apporter une part de vécu au personnage.

    Quels sont vos futurs projets ?

    Nous avons plusieurs projets de long-métrage en développement, l'adaptation d'un roman de Rémy Lasource qui s'intitule "Du crépitement sous les néons". Il y a une nouvelle fois un lien avec la banlieue, les quartiers difficiles mais les thématiques abordées ne sont pas exactement les mêmes. Il s'agit de la cavalcade sauvage de deux jeunes adolescents traqués par des mafieux, s'éveillant à la liberté et à l'amour. En plus de cela, nous finissons d'écrire un scénario qui plante son histoire dans le culturisme féminin et suit la descente aux enfers d'une athlète.

    Et pour terminer nous avons un autre projet qui s'intitule Second Souffle et qui suit le parcours d'une ancienne gloire de la boxe thaï, l'histoire d'un retour à la vie, de la rédemption d'un homme confronté à la violence du monde extérieur et à la nostalgie du temps qui passe.

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