Quel effet cela fait de revoir une œuvre qui nous a marqué durant notre enfance ? Dès les premières notes de musique, on s'émeut immédiatement, on se remémore, une larme coule...Il s'agit bien de la merveille restaurée de Paul Grimault version 1979 et je ne peux que pleurer de joie durant ses trop courtes 90 minutes. Le roi et l'oiseau est définitivement LE meilleur dessin animé de tout les temps. Point. Comment ne pas être ébahis devant la beauté de sa poésie, le cœur battant au son de sa fabuleuse musique inégalable en synergie absolue avec les images ? Comment ne pas être ébahis devant sa richesse thématique incommensurable qui va bien au de-là de la satire politique (que ceux qui n'y voient pas autre chose ouvrent les yeux) ? Comment résister à cette œuvre si vivante ? Les designs graphiques se croisent et se recoupent avec maestria, allant de la caricature à la dystopie science fictionnelle en passant par l'anthropomorphisme "dysnéen". La palette de Grimault sature ses images de couleurs vives et découpe son film avec une perfection éblouissante : pas un plan de trop ni un qui soit inutile. Tous est chargé d'idées à foison..leur sens ayant parfois une multitude d'interprétation, et le tout aboutissant à un ensemble d'une cohérence et d'une profondeur inimaginable. Le roi est une sorte d'Hitler ou de Mussolini, l'Oiseau le résistant expérimenté de la vie qui se bat pour un idéal, la liberté, quant au jeune ramoneur il se soulève par amour, par désir de vivre. Bien sûr que ce film parle de cette face de la Seconde Guerre Mondiale, mais il va plus loin, dans sa caractérisation des personnages (le roi est, au fond, un freaks dans toute sa splendeur), dans le ton adopté (surréaliste), dans sa façon de magnifier ses propos (en utilisant des éléments tirés de toutes sortes d'art, en introduisant sa fable satirique au moyen d'un rêve qui brouille les repères entre réalité et imaginaire, en revenant au sources du mythe...). Tout s'appuie cependant sur une structure de conte de fée, d'une histoire pour enfants, ce qui revient à graver dans le marbre du mythe les propos tenus, en revenant à ce qui nous à le plus touché dans notre période la plus tendre, à ce qui constitue la base intrinsèque du récit. C'est d'une sensibilité imparable, d'une mélancolie sublime, parsemé de moments éternels, d'une perfection inégalable. Pour en trouver l'équivalent, il faut aller chercher du côté des japonais et piocher dans la filmographie de Miazaki ou d'autres grands. Pour moi qui a grandis avec, le Roi et l'Oiseau continuera d'exercer à mon égard une incroyable fascination tout en gardant intact l'émotion si bouleversante qu'il diffuse, chose si rare qui me rend ce chef d’œuvre vraiment irremplaçable.