Film sélectionné aux festivals du Sundance, de Deauville, et de Cannes ; c'est aussi un titre édité par Diaphana... un studio que j'apprécie tout particulièrement.
C'est l'histoire tragique des Winters. Lors d'un tragique incendie, le père décède ; et les deux enfants que sont Johnny et Jashaun se retrouvent sans lui, seuls avec leur mère.
Pourtant, Johnny veut partir. Il veut partir de là où il est ; et sa jeune compagne, une serveuse de restaurant, veut l'amener avec elle. Johnny ne craint pas de se déraciner, jusqu'à ce moment là.
Mais alors, quelles sont les raisons qui motivent Johnny et sa jeune compagne ? Pourquoi cette volonté ? Johnny ne se le confiera que lors des toutes dernières minutes du film.
Dernières minutes qui clôturent avec maestria les toutes premières ; celles qui font figure d'introduction, comme par exemple la toute première où Johnny se tient sur un cheval, se confiant par voix-off là-aussi, sur ce qu'il pense de l'intégrité des chevaux, et de comment ils sont dans leur fort intérieur.
Et cette première scène est sublimée par une photo renversante, pas un bruit qui comble le reste, pas de mise en scène spéciale. Le personnage principal est au centre de toute attention, pendant qu'on distingue, derrière l'hennissement, à peine le son du paysage amérindien, territoire où le film se déroule. Cette scène se pose là, d'emblée, comme un cheveux sur la soupe, les pieds dans le plat, en même temps. La scène va prendre appui pour faire s'envoler le (télé)spectateur et le transporter à travers une histoire initiatique, quelque chose d'assez sensoriel, quelque chose de pesant comme le plomb et léger comme l'air. Quelque chose de transcendant... devrais-je dire, plutôt.
Ce n'est pourtant pas la seule scène renversante du titre. Car le titre immense et grandiose de Chloé Zhao, en regorge. Que ce soit les moments filmés dans la paroisse, ou que ce soit les espérances prophétiques de l'homme "tout en vert", ou que ce soit même encore la prière lors du lancement des épreuves de Rodéo, chaque mot est si fort qu'ils ont tous la puissance suffisante pour subjuguer n'importe qui à quiquonque sais considérer ce film à sa valeur juste (et la valeur de ce film là, je peux affirmer qu'elle est très haute).
Le film ne parle d'ailleurs que peu, très peu même. Le scénario principal n'est pas quelque chose d'inédit, mais la réalistrice explique plusieurs choses dans les options supplémentaires, qui permettent de comprendre complètement ce qu'est le film et comment il a été tourné il y a maintenant quelques années. Il s'agît là d'un récit réel (ou à peine détourné, nuancé) d'après une histoire vraie. Il n'y a presque pas, ou pas du tout d'acteur professionnel, et pourtant, la moindre gestuelle et leur jeu est une claque visuelle, le tout d'un naturel bouleversant.
Le film ne parle que peu, mais suffit pour comprendre ce qu'il se passe dans la vie des Winters et la communauté de la Réserve, en cette époque si obscurcie de cette décénnie 2010. Le film ne donne jamais la leçon, mais la quasi totalité des personnages, si (et que ce soit une leçon de vie, ou une leçon d'acteur).
Mené par une remarquable maîtrise de la caméra, ponctué avec de nombreux plans cadrés sompteusement bien, que ce soit dans les Rocheuses, sur les côteaux ou même dans les abords des plaines ; et soutenu par une musique tout bonnement parfaite magnifiant l'image, cette histoire tragique est relatée parfaitement, avec sobriété et avec pudeur ; faisant de ce titre un chef-d'oeuvre grandiose et majestueux, dans la biographie de cette très talentueuse réalisatrice qu'est Chloé Zhao.
Dans ce chef-d'oeuvre, il est question de chansons, il est question de danse, et du vent. Il est aussi question de Fin et du Début. C'est ici le premier long-métrage de cette réalisatrice, capable d'avoir realisé un film merveilleux avec de l'indépendance et liberté.