Voilà un film reposant tout entier sur les épaules d’un acteur, symbole de toute une génération, acteur excessif comme d’hab, mais comme c’est un premier violon, on lui pardonne. Il est clair qu’il habite l’écran comme peu savent le faire. Il crève tellement l’écran qu’on ne voit que peu ou pas ce que font les autres, risque assumé par le réalisateur. Film sombre, crépusculeux dans tous les sens du terme, banlieue sordide, la bande-son c’et les morceaux qui passent à la radio. Une histoire banale, mais des dialogues tellement hallucinés de naturel, qu’on a l’impression que c’est improvisé. Cela sent le Jim Tompson et le Georges Perec bien corsé. On peut n’avoir que peu de moyens, et en mettre plein la vue, la preuve. Il suffit de commencer par un solo de danse ou de mime dans un terrain vague, et le ton est lancé. Solo complètement hors de propos, et complètement génial. Marie Trintignant est mignonne et muette d’admiration pendant tout le film, mineure ? Blier reste aussi statique que Dewaere est en mouvement. Son personnage est tellement négatif qu’il arrive à le rendre sympathiquement désespéré, ce rôle lui permet de rendre un partition au jeu baroque, riche et bluffant. Le film n’a rien eut à Cannes, normal. Ne pleures pas Patrick, un publicitaire disait que les prix sont des certificats de médiocrité. Pas le moindre espoir en vue, l’amour étant corrompu comme le reste. Un des meilleurs films noirs, difforme et simple, d’une liberté de ton qui frise l’anarchie, c’est sans doute pour ça que c’est culte.