"Fosse/Verdon" propose une biographie documentée et lyrique du couple artistique et tumultueux que formèrent Bob Fosse et Gwenn Verdon des années 1960 à 1980. Le propos même du film pourra sembler incongru à nombre de téléspectateurs européens. Pour les américains, le souvenir laissé par ces deux là est en revanche tout autre. Ensemble ou séparément, ils ont régné sur Broadway pendant près de vingt ans , lui à la mise en scène et à la chorégraphie, elle en qualité de danseuse. A eux deux, ils récolteront pas moins de 16 Tony Awards (équivalent des Oscars pour les spectacles musicaux). Seul, Bob Fosse entamera une courte carrière de réalisateur qui produira trois chefs d'œuvre sur une filmographie composée de seulement cinq films. L'idée de monter la série a germé dans l'esprit de Thomas Kail et de Steven Levenson, deux jeunes directeurs artistiques et scénaristes musicaux qui ne pouvaient qu'être sensibles à l'empreinte sur leur métier laissée par le couple. Bob Fosse en qualité de réalisateur n'est sans aucun doute pas assez reconnu même si "Cabaret" (1973), "Lenny" (1975) et "All that Jazz" (1980) ont trusté nominations et récompenses aux Oscars, à Cannes et autres cérémonies ou festivals. En quelques 8 épisodes, la vie du couple prenant pour axe central la carrière de Bob Fosse est présentée chronologiquement mais avec le recours judicieux aux flashbacks destinés à poser l'évolution de chacun et de leur relation chaotique rythmée par les egos insatiables des deux artistes qui s'expriment certes différemment mais qui convergent pareillement vers la prédominance absolue de l'accomplissement sans compromis de leurs carrières respectives. Le personnage de leur fille Nicole est d'ailleurs illustré à propos pour symboliser les dégâts collatéraux de cette course éperdue au succès qui pour quelques-uns peut se révéler une drogue mortifère. Le casting est on ne peut plus idoine avec Sam Rockwell , acteur caméléon par excellence, dans rôle de Bob Fosse et la toujours parfaite Michelle Williams parvenant à rendre toute l'ambiguïté de Gwenn Verdon qui malgré ses récriminations, exploite le plus souvent possible les addictions de Bob Fosse. Mais la grande trouvaille des scénaristes est d'avoir pris le parti d'adopter en le sublimant, le style cinématographique de Bob Fosse, allant même jusqu'à placer métaphoriquement au moment du tournage de "Lenny", le réalisateur dans la peau de Lenny Bruce sur scène pour narrer sur le mode du sketch comique les aléas de sa vie privé qui commence alors à partir en lambeaux. Visuellement magnifique et admirablement agencée afin de ne jamais faire perdre le fil au spectateur malgré les montages audacieux jamais gratuits, cette série qui s'adresse à une minorité, rend un hommage vibrant à un très grand réalisateur des années 1970. A voir absolument.