Vraiment bof.
Le film est très beau visuellement et fait montre d'une pertinence dans sa créativité plastique, qui reste néanmoins accoutumée et assez ordinaire chez Monsieur Selick.
La musique est bonne et colle bien avec l'univers. Ce dernier est en fin de compte loin d'être dénué de charme...
Malheureusement, le scénario condamne ce long métrage à une certaine médiocrité, qui moi m'empêche de m'ouvrir totalement à cette œuvre pourtant alléchante.
Déjà, le personnage principal, Coraline donc, est soit totalement stupide, soit totalement dépourvu d'intuition ou de bon sens. Côté intuition, heureusement que le chat est là, avec son instinct animal et son altruisme (générosité injustifiée), même s'il arrive assez tard ; parce que la petite n'a aucun flair vis-à-vis des situations qu'elle rencontre. Le genre de situations grotesques que nous servent les films d'horreur à deux balles lui paraissent totalement sécur et tout à fait normales. Pour expliquer son inconscience, on dit qu'elle croit que c'est un rêve et puis après on nous expliquera que non, finalement elle se doutait bien de quelque chose de louche, mais ça lui paraissait cool quand même. Elle n'a même pas l'ambition de se sortir de ses problèmes et a l'air de subir la tournure positive de son histoire. C'est clairement une nulle : elle est maladroite et n'arrive à rien. Au moins cette aventure aura su combler un manque certain d'éducation, qui aurait pu lui permettre de se méfier un peu plus (des gens qui ont les yeux cousus et boutonnés par exemple).
Mais bon, à la limite, on peut faire un personnage volontairement maladroit, débile et énervant car déconnecté de la réalité - mais dans ce cas là, il faut convaincre avec un scénario solide. Sauf que vous verrez par la suite que ce n'est pas ce que j'appelle un scénario "solide".
L'héroïne est au départ un personnage très peu complexe et antipathique. Au fil du film, aucune profondeur ne s'établit dans sa personnalité. Et la seule évolution qu'elle aura subit lors de cette aventure est celle-ci : elle ne verra plus jamais de la même façon la réalité puisqu'elle connaît désormais sa véritable valeur. Désormais, même quand la vie sera moche, elle sera belle car elle sera vraie. Finit les moments où l'on échappe à une réalité, où l'on fuit la vérité, où l'on se permet cette folie déraisonnable, mauvaise et dangereuse...
Or ce qui est intéressant sur ce genre de sujet, c'est justement l'équilibre que l'on peut trouver (ou du moins chercher) - que cela se solde par un échec ou non - la dose de mensonge que l'on peut se permettre. Ce sur quoi il aurait été intéressant de donner matière à réfléchir, c'est le curseur de la raison qui oscille entre hédonisme et ascétisme. En fait le problème de cette histoire c'est son message radical : la solution donnée est le refus total et absolu. Alors ce radicalisme est justifié me direz-vous. Oui, il est justifié par la méchanceté elle même radicale de la fausse mère. C'est là que l'on voit que le manichéisme pose problème dans une histoire, car il donne l'inverse de ce que que l'on attend : aucune nuance, aucune finesse, aucune profondeur. Si la méchante eut été raisonnable, cela aurait été beaucoup plus intéressant. Or elle ne laisse pas le choix à Coraline. C'est soit elle va dans le monde parallèle et elle y reste définitivement, soit elle n'y va jamais. Ce postulat de base pourra convenir à certains, moi il me désintéresse totalement de l'œuvre entière dès lors qu'il est définitif.
La fin c'est du grand n'importe quoi : la méchante laisse une chance incroyablement ridicule à Coraline en acceptant un défi complètement démesuré qui sort de nulle part. Le happy end n'est, par conséquent, pas convainquant pour un sous vu la manière dont elle se sort de ce bourbier.
Au final, on a eu le droit à plus d'une moitié de film basé sur l'inconscience d'une jeune fille hyper monolithique. Elle n'a aucun doute et plonge tête baissée dans sa certitude - autrement dit, droit dans le mur. Le reste c'est la phase de conscience, de regrets, de désespoir. Elle ne semble pas plus impliquée que ça mais s'en sort par chance. Enfin bon, tout cela n'est pas très exaltant tout de même.
En plus de ça, le film ne propose aucune piste de réflexion alors que l'idée de base en offre de très très riches. Cette œuvre semble avoir été créée uniquement pour faire comprendre aux enfants que quelque soit la réalité, elle est toujours mieux que tout autre chose. Car on nous dit bien en filigrane que Coraline n'aurait pas dû tenter de fuir la réalité, qu'elle aurait dû y faire face et l'aimer (parce que c'est finalement pas si mal d'être dans une condition qui se rapproche plus de la mort que de la vie). Avec cette morale, c'est sûr qu'il y a de quoi construire des enfants sérieux, exemplaires, irréprochables... déprimés.
Somme toute, si tout cela vous passe au dessus de la tête, vous trouverez certainement ce long métrage super.
Un film qui ne peut donc satisfaire que les jeunes enfants ou les adeptes d'une propagande moralisante - mais surtout démoralisante.