
Si nombre d'anecdotes sur Walt Disney, ses oeuvres et son empire sont connues, certaines le sont nettement moins, en tout cas par le grand public. Saviez-vous par exemple qu'un film d'horreur a été tourné clandestinement dans le parc DisneyWorld ? Qu'une bombe dévastatrice créée durant la Seconde guerre mondiale a carrément porté son nom ? Ou encore la féroce et hallucinante bataille menée par la firme pour garder à tout prix les droits concernant la mascotte de l'empire, Mickey Mouse, menacée de tomber dans le domaine public ?
En voici une autre : durant un an, Walt Disney fut le seul au monde à pouvoir utiliser un nouveau procédé qui révolutionnera le cinéma, et lui permettra même de gagner son tout premier Oscar. Le premier de ses 22 trophées (!) qu'il remportera au cours de son immense carrière, faisant de lui le plus grand récipiendaire de l'Histoire de l'académie des Oscars.
Une symphonie en couleurs
Le Magicien d'Oz, Ben Hur, Autant en emporte le vent, Les Aventures de Robin des bois, Les 55 jours de Pékin jusqu'à Apocalypse Now... Sans compter une liste longue comme un répertoire téléphonique de westerns, pour ne citer que ces quelques exemples. Leur point commun ? L'usage du procédé Technicolor, connu pour ses couleurs flamboyantes.
Série de procédés de films en couleurs lancés par la Technicolor Motion Picture Corporation, fondée par Herbert Kalmus, Daniel F. Comstock et W. B. Westcott en 1915, le premier procédé de cette série fut mis au point en 1916. Mais il faudra attendre 1928 pour que Herbert Kalmus créé un procédé qui permette enfin de reproduire toutes les couleurs : le Technicolor trichrome, celui auquel on fait référence aujourd’hui lorsque l’on parle d’ "âge d'or du Technicolor".
Echaudés par les succès mitigés des débuts du procédé et de sa qualité imparfaite, les studios ne se bousculent pas au portillon pour tester le technicolor trichrome. La crise de 1929, qui plonge le pays dans l'abîme pendant un long moment, n'arrange pas les affaires de la société. Les studios de cinéma et créateurs de Cartoons doivent eux aussi faire des économies : faire des films coûte déjà asez cher; la couleur devient un luxe dont on peut se passer.
Une rencontre déterminante
En 1932, Herbert Kalmus rencontre Walt Disney, et lui propose alors son invention. Si Disney s'était montré peu convaincu par les premières versions du technicolor, il pressent que ce procédé de technicolor trichrome va dépasser tout ce qui a été fait auparavant.
C'est ainsi qu'il utilise pour la première fois le procédé dans un Cartoon d'animation intégralement en couleur, Des arbres et des fleurs, de la série des Silly Symphonies. Problème : ce 29e court est déjà presque terminé. Walt Disney insiste pour le refaire intégralement avec ce procédé, en dépit des vives réserves de son frère Roy et des équipes du studio, qui trouvent cette décision incroyablement risquée et stupide. Walt a eu raison de tenir bon : le succès est non seulement au rendez-vous, mais il lui permet même de glaner son tout premier Oscar en 1932 pour ce court animé.
Ci-dessous, le Cartoon en question...
Kalmus et Disney signent alors un deal de cinq ans, au cours duquel ce dernier aura l'exclusivité du procédé Technicolor. Mais devant la pression grandissante des autres studios qui veulent avoir leur part de succès, la durée de cette exclusivité fut ramenée à un an.
Si dans les années qui suivent, les oeuvres (courtes ou longues) produites par d'autres studios ne rencontrent pas vraiment le succès escompté, parce que le public trouve les couleurs trop saturées et manquant de naturel, c'est véritablement avec Blanche-Neige et les sept nains, en 1937, et Une étoile est née, sorti la même année, que le technicolor décolle véritablement auprès du public.