"Ce film m'a donné raison" : il y a 45 ans, Quentin Tarantino avait une théorie sur le cinéma et elle s'est avérée juste
Corentin Palanchini
Passionné par le cinéma hollywoodien des années 10 à 70, il suit avec intérêt l’évolution actuelle de l’industrie du 7e Art, et regarde tout ce qui lui passe devant les yeux : comédie française, polar des années 90, Palme d’or oubliée ou films du moment. Et avec le temps qu’il lui reste, des séries.

Les films de Tarantino ont pour la plupart un élément en commun : ils sont divisés en chapitres, comme un roman. Et ce choix qui fait la caractéristique de son cinéma ne doit rien au hasard.

A part être signés par Tarantino, quel est le point commun entre Kill Bill 1, Kill Bill 2, Inglourious Basterds, Les Huit salopards, Reservoir Dogs et Pulp Fiction ? Ils sont tous narrativement construits en chapitres, comme un roman. Et ce choix artistique a été fait pour une bonne raison.

Dans l'émission The Director Chair, diffusée pour la première fois en 2014, le metteur en scène Robert Rodriguez recevait son complice Quentin Tarantino pour évoquer sa carrière, et la question de cette habitude de la construction en chapitres des films a donné une réponse passionnante de l'intéressé :

"C'est intrinsèquement cinématographique"

Pulp Fiction
Pulp Fiction
Sortie : 26 octobre 1994 | 2h 29min
De Quentin Tarantino
Avec John Travolta, Samuel L. Jackson, Uma Thurman
Presse
4,4
Spectateurs
4,5
Streaming

"J'ai toujours pensé que si je faisais [un film] de la façon dont on fait des romans, ce serait encore plus cinématographique. Que ce serait excitant, que si on pouvait y arriver ce serait amusant et que la transversalité serait intéressante. (...) Construire un film comme un roman, lorsqu'on [passe d'un personnage à l'autre d'un chapitre à l'autre], ce serait intrinsèquement cinématographique. Et que tout mettre en ordre chronologique serait intrinsèquement anti-cinématographique, terne."

Rodriguez relance alors son camarade réalisateur en lui demandant si c'est un roman précis qui lui avait donné cette révélation. "Aucun roman précis ne m'a fait réfléchir à cela", répond Tarantino, "c'est plutôt qu'à chaque fois que je lisais un roman construit de façon [non chronologique], je cherchais à en faire un film de cette façon. Et je sais que ce n'est pas quelque chose que Paramount autoriserait, surtout au moment où on sortait des années 80, qui était une période très oppressive pour le cinéma. (...) Tout était standardisé."

"Un film m'a donné raison"

"Mais un film m'a donné raison : La maison Russie (1990) de Fred Schepisi, adapté de John Le Carré avec Sean Connery et Michelle Pfeiffer. Je n'ai jamais lu le roman, mais on devine que sa structure a été respectée car elle alternait vraiment les temporalités jusqu'au milieu du film, et c'était excitant ! C'est là que j'ai su que j'avais raison."

Et au cours de sa carrière, Tarantino déviera assez rarement de cette même construction, devenue l'une de ses marques de fabrique de cinéaste.

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