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    3 Billboards, rencontre avec Martin McDonagh : "Seule Frances McDormand pouvait interpréter ce rôle"

    "3 Billboards, Les Panneaux de la vengeance", favori dans la course aux Oscars, sort dans les salles ce mercredi. Nous avons rencontré son talentueux réalisateur Martin McDonagh et discuté de mise en scène, de Frances McDormand et de ses influences.

    Fox

    AlloCiné : Comment vous est venue cette incroyable histoire, très difficile et aussi très américaine ?

    Martin McDonagh : La première chose, c'est que je voulais écrire un personnage féminin très fort, car mes autres films, Bons baisers de Bruges et 7 Psychopathes ne prenaient pas du tout ce parti, et je voulais aussi vraiment travailler avec Frances. J'ai également vu quelque chose d'assez similaire à ce que l'on peut lire sur les panneaux dans le film lorsque je voyageais en bus à travers les Etats-Unis il y a environ 18 ans. C'est passé à la vitesse de l'éclair, mais j'ai eu le temps de saisir le message et je me suis demandé qui était la personne qui avait pu écrire un message si plein de colère et de douleur. Quand j'ai décidé que c'était une mère, le personnage de Mildred s'est presque écrit de lui-même. Même si l'intrigue commence dans la colère et la douleur, elle est tellement acharnée et sans limite qu'il y avait beaucoup de joie dans l'écriture de ce personnage.

    C'est la première fois que vous écrivez un rôle principal pour une femme, pourquoi cette envie et pourquoi Frances McDormand ?

    Je pense que c'est important de trouver un moyen pour s'éloigner de ce qu'on a tendance à faire naturellement. Beaucoup de scénaristes hommes, et c'est mon cas, écrivent des personnages dans la peau desquels ils s'imaginent en quelque sorte, qui deviennent donc des personnages masculins : un tueur à gages, un psychopathe, etc., mais je trouve cela vraiment bien d'essayer de sortir de sa zone de confort. Il y avait aussi quelque chose de très libérateur dans le fait que ce personnage soit une femme. Si c'était un homme qui entreprenait tout ce qu'entreprend Mildred, il y aurait un côté presque évident, mais comme c'est une femme, les réactions à ce qu'elle fait sont très différentes et vraiment intéressantes.

    2017 Twentieth Century Fox

    C'était très excitant à écrire, mais je l'ai vraiment écrit pour Frances et je savais que personne ne pourrait s'emparer du personnage de la manière dont elle l'a fait, parce qu'elle est très honnête, très franche, elle n'est jamais dans la facilité, elle est très intelligente et elle connaît la comédie, mais, tout comme dans les films des frères Coen par exemple, elle ne surjoue pas la comédie. Elle n'en fait pas des tonnes, et je savais que personne d'autre qu'elle ne pourrait interpréter Mildred ainsi.

    Vous parliez des frères Coen, on retrouve beaucoup des frères Coen dans Three Billboards et je crois que le bandana de Mildred était directement inspiré de Voyage au bout de l'enfer de Cimino. Pouvez-vous nous parler des influences qui traversent le film ?

    3 Billboards est très inspiré par les films américains des années 1970. Le bandana est en effet un clin d'oeil de Frances à celui porté par Christopher Walken dans Voyage au bout de l'enfer. Sam et moi sommes également de grands fans de Christopher Walken, d'ailleurs, on a travaillé ensemble sur 7 Psychopathes. On avait en tête La Balade sauvage, Paris, Texas également, pour les paysages, les rouges, les couleurs. C'était de faire vraiment une histoire américaine et pas un regard européen porté sur l'Amérique. J'ai beaucoup voyagé aux USA, j'ai beaucoup étudié les gens, beaucoup écouté la manière dont ils parlent et j'espère que cela se ressent dans le film.

    2017 Twentieth Century Fox

    On peut dire, à l'écoute des dialogues qui sont admirablement écrits, que vous venez du théâtre, mais il y a aussi de purs moments de cinéma. Comment s'émancipe-t-on du théâtre pour devenir véritablement cinéaste ?

    Je pense que le changement s'opère dans la mise-en-scène. La phase d'écriture du scénario est encore assez proche de l'écriture théâtrale, il s'agit de déterminer le ton, les personnages et l'intrigue. Au début, les images ne sont pas encore présentes, donc lorsque je termine le script, je storyboarde tout ça moi-même, avec des bonhommes super moches qui ressemblent à Monsieur Patate, mais c'est le premier moment où je visualise vraiment le film. J'espère que je progresse au fur et à mesure des projets, car je n'aime pas vraiment le théâtre filmé, les films qui consistent simplement en des conversations à huis-clos. Le paysage américain a aidé en cela, trouver cette route isolée, trouver la bonne ville était important pour construire un environnement suffisamment cinématographique. Pour le moment, les choses se passent vraiment en deux temps, peut-être qu'un jour j'arriverai à faire ça d'un seul tenant !

    Peut-être que la musique aide aussi ? Elle apporte, du moins elle souligne, la dimension de western. Comment avez-vous travaillé avec Carter Burwell [qui est aussi le compositeur attitré des frères Coen, par ailleurs] ?

    J'avais travaillé avec lui sur les deux autres films. Je crois que je lui ai envoyé un premier montage du film et on a commencé à en discuter. La manière dont Frances agit, la façon qu'elle a de se tenir, rappellent un peu John Wayne, elle l'a cité comme une de ses influences. Elle marche dans la ville, qui est un véritable trou paumé, comme un héros de western et elle se charge de régler leur compte aux méchants. Carter s'en est aperçu et il m'a joué quelques extraits en demandant si cela pouvait me plaire pour certains personnages et un ou deux d'entre eux étaient très influencés par les western spaghetti et j'ai trouvé que c'était parfait. Ce n'est pas nécessairement à cela que j'aurais pensé de moi-même, mais ça fonctionnait à merveille ! 

    Retrouvez la bande annonce de 3 Billboards, Les Panneaux de la vengeance :

     

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