Un film de science-fiction suisse, c'est du quasi jamais vu. L'inconnu Ivan Engler se donne les moyens de maintenir à tout prix les liens avec le genre spatial afin d'aborder un bon nombre de thématiques déjà étudiées maintes et maintes fois, ce avec un maigre budget. Il est à noter que chaque nouvelle tentative dans ce domaine, si rares soient-elles, est toujours agréable à découvrir, même si, depuis le temps, la créativité atteint ses limites et les différents terrains abordés peinent à se renouveler.
Cargo situe son action au cours du 23ème siècle. La Terre devenue inhabitable, les hommes se sont réfugiés dans des stations spatiales surpeuplées, en orbite autour de cette dernière, leur objectif étant d'atteindre Rhea, planète paradisiaque située à plusieurs années lumières. Le médecin Laura Portmann, désireuse de rejoindre cette planète, s'engage pour une mission de huit ans qui lui permettra de gagner la somme nécessaire. Cette mission consiste à accompagner un vaisseau spatial vers une station spécifique, dans le but de construire diverses plates-formes de transport.
De là, le sujet ne semble pas faire preuve d'une grande originalité mais il est agréable de noter que malgré un faible budget, le réalisateur suisse met en place un décor efficace destiné à installer une ambiance bien spécifique. En effet, nul ne peut nier une certaine froideur, omniprésente dans le film. Entre l'étendue de l'espace, les couloirs métalliques infinis du vaisseau, tout semble inerte, uniformisé et inanimé. Le spectateur se perd dans cette immensité qu'est l'espace, comme son vaisseau et ressent une certaine angoisse à l'idée de ne représenter qu'une infime fraction au milieu de l'univers. L'aspect visuel, malgré quelques imperfections dues au budget, se présente donc comme un important atout du film.
Le scénario, ne faisant pas preuve de grande nouveauté, a cependant le mérite d'être en parfaite corrélation avec l'ambiance pesante du film. Volontairement étirée, la narration stagne sur un faux rythme permanent, ne laissant que très peu de place à l'action mais favorisant grandement les instants de contemplation. Le tout est d'une platitude qui peut en déconcerter plus d'un comme en réjouir d'autres. Autre point fort, le réalisateur parvient à étendre ses thématiques pourtant simplistes en y intégrant quelques fantaisies certainement pas dénuées d'originalité. En effet, le film gagne en intérêt à mesure que le temps passe grâce au réalisateur qui revendique ses ambitions avec brio.
Cargo n'a peut-être pas l'accessibilité lui permettant de gagner en notoriété mais il n'en est pas moins un bon film de science-fiction, s'adressant principalement aux fans du genre. Sans être le symbole d'un certain renouveau, il a tout de même l'audace de maintenir les liens avec ses aînés plus ou moins notoires. Et même s’il ne peut éviter quelques maladresses et incohérences, il est toujours plus agréable de passer du bon temps devant des productions indépendantes ambitieuses que devants des blockbusters prétentieux...