La filmographie d’Antoine Fuqua, cinéaste afro-américain contemporain parmi les plus célèbres, n’aura eu de cesse de faire du yoyo. Soyons franc, ce Revenge Movie, adaptation d’une série télévisée des années 80, vient redorer le blason du cinéaste, ayant alterné entre l’excellent, Training Day, le bon, L’élite de Brooklyn, et finalement le mauvais, Le Chute de la Maison Blanche. S’offrant à nouveau les services de Denzel Washington, acteur pour le moins charismatique, dans son genre, le metteur en scène livre une relecture contemporaine d’une œuvre relativement basique. Equalizer, ou l’histoire de Robert McCall, ténébreux justicier au passé trouble qui, à force d’assister à l’injustice, ira jusqu’à démontrer des talents pour le moins meurtriers. Certes, le scénario prend de considérables libertés en regard au modèle, mais l’esprit reste sensiblement le même, sorte de point culminant en termes de divertissement bâtard mais complètement assumé et diablement amusant à découvrir.
Le brave Robert, maniaque, sensible, généreux, se voit confronter, la première demi-heure passée, à la mafia russe, une troupe de Vorys ultraviolents ayant faits l’erreur de passer à tabac la protégée du héros. A partir d’une incursion savamment mise en scène dans l’arrière salle d’un restaurant slave, la guerre est déclarée. Voilà donc l’ami Robert seul face à toute l’industrie criminelle russe, dans un mélange d’effusions de sang, de scènes d’action vitaminées et dialogues crus. Antoine Fuqua, conscient que son film ne s’adresse pas à un public pointu, prend le parti très clair de faire de son personnage un irréductible redresseur de tort. Ce qui pourrait gêner ailleurs, les stéréotypes du héros increvable et si bon, prennent ici une place pourtant savoureuse tant le cinéaste maîtrise ses scènes d’action, l’écriture de ses échanges entres protagonistes et tant il assume ce statut de film vintage bourré d’une certaine forme de complaisance. En somme, malgré les clichés, on adore voir le brave Denzel massacré du vilain méchant, non sans élégance ni charisme.
L’acteur, lui aussi ayant alterné hauts et bas, durant sa faste carrière, semble avoir ici retrouvé un peu de mordant. Oui, après le déplorable 2 Guns, Washington revient en pleine forme, dans toute sa photogénie, s’illustrer comme le pendant afro d’un certain Liam Neeson, cinquantenaire si habile qu’il s’avère imbattable. A la différence pourtant de toute production EuropaCorp, le cinéaste ici met les petits plats dans les grands et livre un film très bien réalisé, succession de séquences rythmées ou non mais toutes très bien abordées. Il suffit donc parfois d’assumer ses choix et de s’appliquer techniquement pour qu’un film bâti sur une montagne de clichés soit convaincant et non pas moqué. C’est le cas ici, notamment du fait que les grands méchants, notamment leur leader, possède suffisamment de charisme pour s’opposer au justicier sans faire figure d’anecdote.
Appréciable, pour ce qu’il est, cet Equalizer démontre que de bons artisans du cinéma sont encore à l’œuvre aux Etats-Unis sur ce type de produit et que le film d’action peut être toute autre chose, à l’heure actuelle, qu’une banale série B façon productions Besson. Pour autant, le film ne serait pas grand-chose sans l’implication de son acteur principal, un vieux roublard des plateaux hollywoodiens qui s’amuse ici mais que l’on espère retrouver dans des rôles à sa mesure, tel que celui du pilote du récent film de Robert Zemeckis. Avis aux amateurs de bastons bruyantes et efficaces. 14/20