Je note 5/5 parce que ce film est incroyable. D’une nullité prodigieuse, évidemment, mais c’est absolument fascinant. En m’installant devant la télé qui le repassait pour la sortie du dernier Batman, je ne m’attendais pas du tout à ÇA.
Petite mise au point préliminaire, et autre raison de mon 5/5 : beaucoup s’acharnent contre ce film pour les mauvaises raisons, le condamnent selon des critères externes (comics, autres films…) et regrettent ce qu’il n’est pas. Ce n’est pas comme ça qu’on juge un film. Ce n’est pas un tome des comics. Ce n’est pas un film de Tim Burton. C’est un film de Pitof, l’héroïne s’appelle Patience, elle est jouée par Halle Berry, et même qu’elle est noire. Et c’est très bien. Fin de la mise au point.
Et le réalisateur est la première surprise de ce film ! Voici donc une œuvre de notre Pitof national, qui reprend sa caméra numérique après son remarquable « Vidocq » (2001). Vidocq était un balbutiement numérique du tournant du millénaire, une gigantesque vomissure visuelle dont il faut reconnaître l’audace expérimentale (et 100% française, s’il vous plait). Vous seriez-vous attendu à ce que les gros bonnets d’Hollywood confient leur nouvelle production super-héroïque hyper-formatée à un zigoto pareil ? Moi pas ! Et Pitof s’en donne à cœur joie. On retrouve dans « Catwoman » (2004) les mouvements de caméra complètement fous qui font mal aux yeux, ces fameux zooms qui traversent en cinq secondes dix kilomètres de panorama urbain jusqu’à un appartement au sommet d’un gratte-ciel. Le numérique dégouline de nouveau. En revanche, les effets spéciaux tant décriés font le taf, j’ai même été bluffée par l’animation en gros plan du chat lors de la scène de résurrection (séquence qui n’a probablement pas eu le dixième du budget qu’a eu Peter Jackson l’année suivante pour animer chaque poil de son King Kong ; mais évidemment, quand on veut critiquer…).
Au milieu de tout ce glossy, on découvre une Halle Berry adorable de gentillesse et de timidité. Deuxième surprise du film, et une surprise plutôt agréable ! Pas du tout le type de personnage auquel je m’attendais… Et pourtant, c’est bien elle qu’on suivra pendant l’essentiel du film. Ce dernier est à l’image de notre héroïne nommée Patience. C’est sucré et coloré comme un sachet de bonbons, accompagné par du R’n’B commercial, tout est lisse et gentil, les scènes de bureaux sont de la sitcom non inspirée, tout est surjoué. C’est rythmé, ça passe tout seul, c’est indolore. Il y a une certaine forme de beauté là-dedans, je suis définitivement fascinée.
L’intrigue se met vite en place. On a dû demander à Pitof de toucher un public plus féminin qu’avec les bêtises super-héroïques habituelles, et il l’a pris au pied de la lettre. Donc, tandis que Superman et Batman sauvent le monde des super-méchants, Patience découvre un complot industriel dans une boîte de cosmétique et lutte pour que des millions de femmes ne se fassent pas tragiquement rouler dans la farine. C’est très bien aussi, on a juste un tout petit peu de mal à comprendre pourquoi il faut une super-héroïne pour venir à bout de PDG crapuleux.
Puis viennent les déblatérations sur la féminité et le pouvoir des chats à travers les siècles, et tout à coup surgit un nouveau personnage impulsif et coquin nommé Catwoman. Celle-ci alterne dès lors à l’écran avec Patience (à qui on s’est attaché !) sans qu’on parvienne à croire qu’il s’agisse de la même personne. Cette bipolarité est sans doute l’un des propos du film mais elle n’a pas la moindre motivation et on n’y croit pas une seule seconde. Bref, quelques prouesses gymnastiques absolument gratuites pour notre fille de l’air, chassé-croisé sexy avec le policier et néanmoins intérêt amoureux de notre héroïne, dénouement au sommet, emballez c’est pesé.
Conclusion ? Je m’attendais à un navet sans âme façon « Elektra », mais j’ai vu un bel OVNI avec le charme du nanar. Un de ces ratages sublimes dont la rareté, venant des gros studios aux productions aseptisées, fait toute la saveur. Alors oui, excellente surprise et qui vaut le coup d’œil !
PS : à propos de nanars, les amateurs de travelings numériques extrêmes et d’héroïnes botte-fesses peuvent également aller voir « Ultraviolet » (2006), ils ne seront pas déçus. ;-)