Une vaste fresque historique à la française, où les décors se remarquent, les maitres artificiers se régalent et les acteurs se croient sur les planches. A ce jeu Torreton est loin devant les autres. Très concentré, il s’échine à singer Gabin, voire Depardieu, dans un argot ancienne mode difficilement interprétable par nos oreilles d’aujourd’hui. Le Bihan essaie tant bien que mal de le suivre, en vain. Au moins comprend-on ce qu’il dit. Malgré tout, malgré l’intrigue tardive, la guerre illisible, la mayonnaise finit par prendre. La reconstitution fonctionne, et on se prend au destin de ces hommes courageux, volontaires, qui ont donné leur âme à l’armée, qui ne vivent plus que par elle, quand les soldats traditionnels évitent les risques et se planquent dès qu’ils peuvent. Le fier Conan l’affirme : ce sont eux qui ont gagné la guerre, les autres ne l’ont que faite. Mais aujourd’hui c’est l’heure de payer la note, de répondre des crimes – car il y en a eu, beaucoup – on n’arrête pas une tête brûlée. L’occasion d’assister à une belle opposition de vues : le fougueux capitaine, le raisonné Norbert, le droit De Scève, le blasé Pitard, tous autant de manières d’aborder l’enfer. Et en cela quoi qu’on dise, l’enseignement de Tavernier joue son rôle.