La Reine Margot est adapté d’un roman historique d’Alexandre Dumas. Pourtant lorsque Claude Berri s’adressa à Patrice Chéreau pour lui proposer une adaptation, c’est à un autre roman de l’écrivain qu’il songeait, Les Trois mousquetaires. Mais un projet concurrent développé par Jean Becker, projet qui ne vit pas le jour, amena Chéreau à y renoncer pour s’intéresser à La Reine Margot, jusqu’à réaliser le film (finalement produit par Claude Berri), lui qui connaissait plutôt bien le sujet de la Saint-Barthélémy pour avoir mis en scène au théâtre Le Massacre de Paris de Christopher Marlowe.
Avant que Patrice Chéreau ne s’en empare, le livre d’Alexandre Dumas avait déjà été porté à l’écran quarante ans plus tôt, en 1954, par Jean Dréville. Jeanne Moreau interprétait le rôle-titre du film, dont Abel Gance avait signé l’adaptation. Une version muette de 1910, réalisée par Camille de Morlhon l’avait précédé, précédant de peu une deuxième adaptation dirigée par Henri desfontaines en 1914. En 1961, le roman de Dumas fit également l’objet d’un téléfilm. Tous ces films ont pour titre La Reine Margot, mais on peut encore citer une autre adaptation, intitulée cette fois Henry, King of Navarre, et réalisée en 1924 par Maurice Elvey.
Si tous les acteurs du film, et notamment les deux têtes d’affiche (Isabelle Adjani et Daniel Auteuil, qui retrouvera cependant son réalisateur passé acteur dans Lucie Aubrac) ou Virna Lisi, ne sont pas des "habitués" de Patrice Chéreau, d’autres interprètes de La Reine Margot ont débuté au théâtre des Amandiers de Nanterre à l’époque où le cinéaste officiait comme directeur : Jean-Philppe Ecoffey, Bruno Todeschini (qui tourna dès 1986 dans Hotel de France) ou Vincent Perez sont ainsi issus de cette formation. Jean-Hugues Anglade, qui a travaillé à Nanterre (mais n’est pas passé par son école), a pour sa part connu son premier rôle important au cinéma dans L'Homme blessé et retrouvera par la suite Chéreau en 2009 pour Persécution. Quant à Pascal Greggory, il est l’intime et l’acteur fétiche de Chéreau, au cinéma et plus encore au théâtre.
Parmi les influences que cite Patrice Chéreau, « il y a eu évidemment les cinéastes que j’admire, Welles, et surtout Scorsese, Coppola, dans la mesure où par moments, pour chasser certaines images périlleuses, trop historiques ou trop téléfilm que j’avais de Catherine de Médicis, de ses frères, de l’histoire de France, j’essayais de me demander, dans Le Parrain, quelle était la situation correspondante, par exemple. Cela me permettait de rajouter une scène où les personnages mangeaient tous autour d’une table, comme dans Le Parrain, quand ils sont dans la cuisine. Le Parrain nous a aussi inspiré la fête du mariage, Le Parrain et Dumas mélangés. En fait si Dumas existait [encore], il écrirait peut-être des scénarios pour Coppola… »
Toujours sur les bonus DVD du film, le réalisateur explique en ces termes la part d’invention qui fonda le film : « La compassion est un mot magnifique et il définit Margot à la fin du film, de la même façon que j’ai employé le mot arrogance pour la définir au début. L’invention du film, qui est une invention dédiée à Isabelle [Adjani], une invention de Danièle Thompson et moi qui n’est ni dans le roman de Dumas ni dans l’histoire de France, c’est la transformation de ce personnage de Margot [...]. On a inventé ce passage, [...] un personnage qui se transforme [...], reçoit de plein fouet la Saint-Barthélémy, le massacre, l’horreur, l’intolérance, qui se découvre faisant partie de cette famille d’assassins, refusant cela et en même temps ne pouvant refuser l’appartenance à cette famille. Il y a donc un passage qui est notre invention à nous, notre contribution à l’histoire de Margot, de l’arrogance à la compassion. C'est l’invention qui nous a fait écrire et filmer le film. »