Film culte des années 80, "Le loup-garou de Londres" est sans doute le film le plus connu de son réalisateur, John Landis, juste après "Les Blues Brothers". Il faut dire qu’il a su marquer les esprits en offrant, à nouveau, aux spectateurs un vrai spectacle à base de lycanthropie (le genre ne comptant plus de film vraiment marquant depuis "La nuit du Loup-Garou" de la Hammer, avec Oliver Reed) et, surtout, en révolutionnant durablement les effets spéciaux lors de la légendaire scène de transformation qui a ringardisé tout ce qui se faisait avant (mention, donc, à Rick Baker pour son boulot épatant). Sans surprise, cette séquence est, de loin, la plus mémorable du film, avec son animation à l’ancienne (pas d’images de synthèse ici) qui donne une sacrée crédibilité au malheur du héros et, accessoirement, avec ce choix très fort de mettre, en fond musical, le léger "Blue Moon" plutôt qu’un thème oppressant. La séquence en devient inclassable et mérite vraiment son statut dans l’imaginaire collectif. Pour le reste, je suis beaucoup plus mesuré ! Car "Le loup-garou de Londres" est un film particulièrement atypique, empreint de parti-pris courageux (voir suicidaires) qui lui confère un ton auquel j’avoue avoir été un peu réfractaire. Car Landis, qui se refuse à faire dans l’horreur pure, n’a de cesse de truffer son film de touche de comédie, de références ciné (au film d’Universal et de la Hammer traitant du même sujet) et de séquences hautement barrées. Dans un premier temps, j’ai plutôt apprécié ce décalage, qui contribue à une certaine complicité avec le spectateur
(les deux touristes américaines affrontant l’hostilité des locaux, le retour du défunt Jack sous forme cadavérique, l’adjoint de l’inspecteur ou encore l’agacement du membre de l’ambassade américaine, joué par Frank Oz, qui s’offusque de ces jeunes qui n’apprécient pas les efforts qu’on fait pour eux…)
. Malheureusement, Landis va trop loin pour moi
(les scènes avec les zombies nazis m’ont laissé bien dubitatif)
et, surtout, se sert un peu trop de ce ton hybride comme cache-misère. Car, il faut bien admettre que le scénario est des plus basique
(on a droit à l’habituelle rengaine de la pauvre victime mordue qui se transforme en monstre, qui tue et qui finira par se faire tuer)
et que les personnages souffrent d’un manque d’écriture flagrant que le manque de notoriété des acteurs n’aide pas à compenser. Ainsi, le héros David (David Naughton) est un américain moyen qui se remet invraisemblablement vite de son traumatisme en couchant avec l’infirmière (Jenny Agutter) qui, de son côté, n’a visiblement pas peur de tomber sur un tordu en ramenant un parfait inconnu chez elle. Idem pour le Dr Hirsch (John Woodvine), convaincu de l’existence des loups-garous après avoir fait des heures sup’ dans une taverne d’ivrognes ou encore l’inspecteur Villiers (Don McKillop) qui campe un sceptique privé des scènes nécessaires pour nourrir son personnage. Seul le personnage du malheureux Jack (Griffin Dune) bénéficie d’un peu d’originalité avec ses interventions post-mortem. Il s’empare, d’ailleurs, de meilleures scènes du film (exception faite de la transformation, de la première apparition subliminale du monstre dans le métro et du carambolage final à Picadilly Circus) dont celle, étonnante, du cinéma porno, où les victimes du loup-garou sont réunies dans un grand moment d’humour macabre. Ça fait un peu léger, surtout que le film ne brille pas forcément par son efficacité (les cauchemars censés apporter une certaine énergie viennent plomber le rythme), par sa photo (assez moche) ou par sa BO (composée de titres avec "Moon", mouais…). Et puis, il y a, à mon sens, l’erreur du film qui est de montrer le monstre sous une forme aussi basique, ce qui flingue franchement la tension existant jusque-là. Certes, on pourra toujours discuter sur le look des loups-garous d’antan (en gros, des acteurs déguisés) mais ils avaient le mérite de bien faire comprendre qu’il s’agissait d’une créature démoniaque et non d’un simple animal. Ici, Landis nous montre son loup-garou sous la forme d’un gros loup méchant aux yeux jaunes… et aux déplacements statiques. Il aurait mieux valu, à mon sens, travailler davantage le montage pour limiter les apparitions à de simples ombres ou des plans lointains (comme dans le métro). Ce défaut majeur achève de m’empêcher d’apprécier le film à hauteur de son statut culte… au point que je ne lui reconnais qu’une portée technique, via l’avancée qu’il a représenté en matière d’effets spéciaux.