Quand on a aimé, adoré le célèbre dessin animé des studios Disney, il parait difficile d’apprécier de la même façon cette nouvelle version. Quand on connait la qualité et la renommée incontestées et incontestables de ce chef-d’œuvre, tenter de revisiter le recueil de nouvelles écrit par Rudyard Kipling était un pari risqué, voire impossible à relever. Disons carrément suicidaire. Ce n’est certes pas la première fois que les grands classiques disneyens devenus on ne peut plus populaires sont revisités à la sauce vivante. Le défi était néanmoins de taille pour donner vie à tous les animaux emblématiques que Mowgli rencontre. Toutes les bêtes sauvages de la jungle présentées ont été recréées de façon numérique, en utilisant la motion capture mêlée à d’autres effets visuels de façon à ne pas trop humaniser les animaux. Ces derniers ayant été joués par des marionnettistes, le résultat final est plutôt moyen car les mouvements ne sont pas toujours très naturels (notamment chez Bagheera), et les regards semblent parfois vides d’expression jusqu'à en paraître voilés par moments. En outre, les mouvements de Shere Khan et du Roi Louie le sont (je veux dire naturels), mais c’est bien le singe qui est le plus réussi physiquement parlant. De plus, je crois qu’on ne pouvait pas mieux choisir qu’Eddy Mitchell pour le doubler en version française, pour interpréter avec un sens du rythme incroyable la chanson définitivement indissociable du primate. Bien sûr, on retrouve les grands traits de caractère de la plupart des animaux, à commencer par la sagesse de Bagheera, et le côté bon vivant de l’inimitable Baloo. Ceci-dit, pour la plupart d’entre eux, ils perdent plus ou moins de leurs couleurs par rapport à l’œuvre des studios Disney, et c’est le cas pour Baloo et le Roi Louie. Il faut cependant reconnaître qu’il est toujours difficile de retranscrire le formidable pouvoir imaginaire d’un bouquin ou d’un dessin animé. Malgré tout, on a droit quand même à des moments savoureux, le plus souvent amenés par l’inimitable Baloo, lequel bénéficie de quelques répliques truculentes, dans l’esprit que nous avons connu sous la version disneyenne. A cela on rajoute de somptueux décors, lesquels offrent au spectateur un bon moment de dépaysement. Les mouvements de caméra y sont pour quelque chose, puisqu’ils mettent en valeur la forêt luxuriante. Le jeu de lumières n’y est pas pour rien : le milieu tropical tantôt pleinement éclairé quand tout va pour le mieux, tantôt sombre quand le danger guette. On redécouvre les chansons Disney qui nous ont tant fait swinguer, et dont certains titres ont été superbement réorchestrés sous les instruments à vents et à cordes. Point de vue scénario, on retrouve la même histoire, malgré quelques menues modifications faites ici et là, soit dans l’ordre de la narration, soit par des suppressions et rajouts de faits, ce qui permet d’amener quelques petites surprises dans une narration que nous connaissons tous (ou presque). Et qu’en est-il de Mowgli dans tout ça ? Son personnage a été respecté, et le jeune Neel Sethi a bien compris la psychologie du personnage, ce qui fait que nous retrouvons bon nombre d’attitudes. Cependant, par moments on le sent un peu perdu, à attendre qu’on lui dise quoi faire malgré la présence d’animaux grandeur nature "marionnettisés" pour lui servir de repère. Cela dit, ce n’est pas catastrophique (loin de là même) car cette impression ne m’est apparue qu’à une ou deux reprises. En conclusion, mon avis est que cette version live souffre de sa comparaison avec le film d’animation de 1967. D’autant plus qu'à l'instar de l’internaute cinéphile BenoitG80, je m’interroge sur la nécessité de faire un tel film pour rester aussi fidèle que le dessin animé, surtout quand ça sort des mêmes studios. Un coup de marketing pour redonner un souffle supplémentaire à "Le livre de la jungle" millésime 1967 ? Si vous ne le connaissez pas encore, la réalisation de Jon Favreau vous semblera bonne, très bonne même. Mais vous verrez que le dessin animé (et ce n’est qu’un avis qui n’engage que moi), bien que plus court, vous paraitra plus épique, plus drôle, plus dense, et plus complet, même si Favreau nous offre en prime un générique de fin qui sort de l’ordinaire.