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    Les Nuits de Mashhad
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    Christoblog
    Christoblog

    741 abonnés 1 613 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 16 juillet 2022
    Le nouveau film d'Ali Abbasi est un réquisitoire sans pitié contre toute la société iranienne. Lui vit en Suède, l'actrice principale Zar Amir Ebrahimi (justement récompensée à Cannes) à Paris, et la plupart de l'équipe du film ne pourra pas retourner à Téhéran sans risquer beaucoup. Les nuits de Masshad sont donc d'entrée un peu plus qu'un film : un acte politique, un coup de pied dans la fourmilière bien pensante des mollahs.

    Dans un premier temps, le film, tourné en Jordanie, reconstitue le trajet d'un tueur de prostituées dans la ville sainte iranienne de Masshad. Il s'inspire d'un fait divers réel. Les meurtres sont montrés de façon frontale, non emphatique. La mise en scène met en valeur une tension évidente entre mission spirituelle et désir sexuel.

    Certains y voient une certaine complaisance : peut-être leur cerveau leur joue-t-il des tours et trouve -t-il un peu trop d'intérêt au spectacle qui leur est proposé ? Pour ma part, je n'ai vu aucune complaisance dans ces scènes, mais une crudité qui finalement est une sorte d'hommage aux victimes : nul besoin d'édulcorer leur assassinat pour le montrer plus joli et moins cruel.

    Cette première partie est étouffante. Mais elle n'est qu'une introduction pour la deuxième partie, encore plus cinglante et brutale. Le meurtrier ne regrette rien, mais une bonne partie de la société iranienne le défend et le traite en héros, encourageant massivement les meurtres de femmes impures.

    Le pouvoir religieux surfe habilement sur la vague, entretient une sorte de parodie de justice et tire son épingle du jeu en manipulant le meurtrier lors d'une scène extraordinaire.

    On sort du film rincé, haletant et confondu par le rythme effréné imposé par Abbasi, estomaqué par le jeu des acteurs et la beauté de la mise en scène. Et cloué à notre siège par une dernière scène terrible.

    Magnifique.
    traversay1
    traversay1

    3 090 abonnés 4 623 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 14 juillet 2022
    Les nuits de Mashhad n'est absolument pas un film iranien. Il a été financé par 4 pays européens dont le Danemark, le pays de Ali Abbasi, son réalisateur, qui a quitté l'Iran il y a déjà 20 ans. Vu de Téhéran, le long-métrage est assurément perçu comme anti-iranien car à travers l'histoire de tueur en série qu'il raconte, il s'en prend à la société dans son ensemble et pas seulement aux autorités religieuses ou à la justice. L'assassin de prostituées semble en effet comme un instrument du peuple, dans les violences faites aux femmes considérées comme impures, dans son délire phallocrate et religieux. Le film est à charge, très efficace dans son récit partagé entre une journaliste courageuse et le meurtrier, "émissaire" d'un Dieu visiblement misogyne. Ali Abbasi, dont on avait apprécié le très barré Border, ne fait pas dans la dentelle et on peut notamment lui reprocher une insistance suspecte voire complaisante dans les scènes sordides. Contrairement aux cinéastes iraniens (Farhadi, Rassoulof, Panahi ...) qui vivent sur place et doivent ruser avec la censure, Abbasi n'a pas besoin d'user de subtilité et ce côté frontal, s'il peut paraître excessif, s'appuie tout de même sur une réalité sociale incontestable. Par ailleurs, grâce au rôle de journaliste, qui a valu à l'excellente Zahra Amir Ebrahimi de remporter le prix d'interprétation à Cannes, le film acquiert une recul salutaire, en particulier face au fanatisme religieux et à la corruption généralisée, et lui évite un côté trop démonstratif.
    islander29
    islander29

    758 abonnés 2 273 critiques Suivre son activité

    4,5
    Publiée le 14 juillet 2022
    Un des meilleurs films "Iranien" (je sais qu'il est tourné en Iran, que le réalisateur est iranien, pour le reste il n'est pas iranien, curieux !!! ) paru depuis une dizaine d'années...Du grand cinéma, du polar, du thriller, filmé avec énormément de maitrise (quellle qualité de l'image, de la photo, du cadrage, de la bande son, etc....) bref c'est millimétré...Le jeu d'acteurs est magistral, que ce soit l'assassin ( Mehdi Bajestani) ou la journaliste ( Zar Amir Ebrahimi) voire les prostituées dont on assiste aux crimes odieux (pas gore, je rassure)...On admirera la précision du scénario (relativement simple) et le suspens inhérent à celui ci....J'avoue que la tension du film ne baisse pas d'un iota, (d'un pouce) pendant les deux heures du film....C'est captivant, humain,et le film se divise en deux parties aussi intéressante l'une que l'autre ( l'enquête puis le tribunal) .....Je ne vois aucun défaut que ce soit dans le fond ou la forme à ce thriller qui en plus fait réfléchir sur la société iranienne et constitue un pertinent miroir de la modernité d'un pays où l'homme hésite entre la vertu et le vice.....On pourra dire beaucoup sur ce film, il offre tant de choses et d'instants précieux de cinéma....Je conseille fortement, .....
    Fabien D
    Fabien D

    167 abonnés 1 102 critiques Suivre son activité

    2,5
    Publiée le 7 août 2022
    J'aurai aimé être captivé par cette histoire de tueur de prostituées en Iran mais les nuits de Mashaad, s'il est sans nul doute un film politique important qui dénonce à la fois la corruption et le fanatique religieux, est cinématographiquement plutôt faible. Le scénario déroule son programme sans surprise d'une manière schématique presque didactique jusqu'à un final qui dans sa volonté de glacer le sang du spectateur, demeure un brin superficiel. Vaguement glauque dans sa description des bas-fonds de Mashhad, le film est néanmoins parfois d'une grande brutalité dans la mise en images des meurtres. Si certains thèmes notamment le lien entre la sexualité et la religion sont assez passionnants, ils sont souvent traités de manière elliptique. On peut aussi se demander les raisons du prix d'interprétation féminin pour une actrice livre une prestation certes correcte mais loin d'être exceptionnelle. Bref, les nuits de Mashhad n'est pas dénué d'intérêt et soulève des problèmes sociétaux importants mais il est avant tout un film de tueur en série des plus communs.
    Ufuk K
    Ufuk K

    465 abonnés 1 398 critiques Suivre son activité

    4,5
    Publiée le 15 août 2022
    "Les Nuits de Mashhad" en compétition cette année au festival de Cannes est un drame criminel passionnant. En effet cette histoire tirées de faits réels ( entre 2000 et 2001 un homme a tué 16 prostituées en Iran pour motif religieux) fait froid dans le dos et envoutante de bout en bout, le réalisateur du film dénonçant une société iranienne corrompue et malade avec un face à face remarquable entre la journaliste du film Zahra Amir Ebrahimi (meilleure actrice au festival de Cannes) et le meurtrier (Mehdi Bajestani), une réussite.
    Pierre Phdb
    Pierre Phdb

    8 abonnés 171 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 21 juillet 2022
    Un thriller... Non ou tellement réducteur...

    Voir ce film comme un thriller est réducteur, terriblement réducteur et décevant pour le spectateur qui s'attend a une enquête un suspens policier. C'est avant tout un film étranger, iranien en l’occurrence. Et là se trouve sont principal intérêt donner une vision de ce pays.

    Une série de meurtres non élucidés une journaliste vient pour enquêter. L’intérêt n'est pas forcément le déroulement de l'enquête mais comment être journaliste et femme en Iran. L’intérêt n'est pas l'enquête mais dans les portraits des personnages la journaliste donc, le juge, l'assassin, des portraits de femmes, une peinture de la société.

    C'est beaucoup mieux qu'un thriller.
    Virginie P
    Virginie P

    43 abonnés 164 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 22 juillet 2022
    Zar Amir Ebrahimi a reçu le prix d'interprétation féminine à Cannes 2022 et c'est grandement mérité. Mehdi Bajestani pouvait également être récompensé tant son interprétation est juste ; d'ailleurs, tous les acteurs sont bons.

    Les Nuits de Mashhad nous plongent dans une traque noire et fascinante ; aucun temps mort.
    Le réalisateur Ali Abbasi, suédois d'origine iranienne, nous propose de le suivre jusque dans les plus sombres recoins de l'humanité.

    Film cru (inspiré de faits réels entre 2000 et 2001), dénonçant l'hypocrisie et la complaisance d’une ville sacrée, où la prostitution ne peut pas exister.

    Saeed, ex-soldat de la révolution, mortifié de ne plus être au combat et frustré par son mariage plat, trouve l'opportunité d'exister "au nom de Dieu" en nettoyant la ville de ces femmes incorrectes.

    Cette ville étant particulièrement laxiste sur les massacres en série des travailleuses du sexe ne fait pas une priorité de trouver le coupable.

    L'arrivée de Rahimi, journaliste iranienne venue couvrir l'affaire du "tueur-araignée- fera éclabousser la vérité obligeant ainsi les autorités, d'où qu'elles soient, à prendre leurs responsabilités, au risque de mettre sa propre vie en péril.
    Dois-Je Le voir ?
    Dois-Je Le voir ?

    304 abonnés 1 696 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 18 juillet 2022
    C’est une réalisation de Ali Abbasi dont le dernier film était le particulier Border primé à Cannes. Pour écrire le scénario, il s’est inspiré de l’histoire vraie du tueur Saeed Hanaei. Les Nuits de Mashhad a été présenté en Compétition au Festival de Cannes 2022, où l'actrice Zar Amir Ebrahimi a reçu le prix d'interprétation féminine.

    Le cinéma iranien est en pleine expansion en France. Depuis deux ans, nous avons le droit de plus en plus de films venant de ce pays du Moyen-Orient. La plupart sont sélectionnés dans des festivals et lauréats de prix prestigieux. Cela va être le cas avec Les Nuits de Mashhad. Cette fois-ci, nous n'allons pas être plongés à Téhéran, mais dans une ville de province. Mashhad est une ville sainte pour les chiites. Cela va avoir beaucoup d'importance dans le déroulé de ce drame.

    Nous allons suivre une série d'assassinats de prostituées. Rapidement, le spectateur connaît le coupable. Le but est de comprendre tout le cheminement qui pousse Saeed Hanaei à tuer. Une partie du temps, nous allons être avec la journaliste qui mène l'enquête sur ces morts. Celle-ci est totalement impliquée dedans. Son travail de recherche est très prenant. En parallèle, on aura la vie quotidienne du tueur. On partage avec lui des moments avec sa famille. Il y a comme une normalisation de l'assassin sans que pour autant ses actes soient banalisés. Comment un citoyen “lambda” peut, pour certaines raisons idéologiques, se transformer en un meurtrier sans aucun remords. Dans ce panorama, il manque uniquement le point de vue de la police. Celle-ci sera présente uniquement comme interaction avec la journaliste.

    Cela aurait pu être intéressant, car l'aspect étatique est important. Les Nuits de Mashhad va nous permettre de voir l'influence de la religion en Iran. Si cet homme est poussé à tuer, c'est parce qu'il croit que son acte est juste. Cela le rend d'autant plus dangereux, car il pense être dans son droit. On va voir comment ses actes sont approuvés par une partie de la population justement, car ils rentrent dans la ligne idéologique iranienne. C’est intéressant de voir le positionnement officiel de l'État. Un jeu trouble qui est dénoncé. On remarque l'importance de la médiatisation des affaires qui permet de faire avancer l’enquête.

    Dans ce cas, la journaliste a donc un rôle majeur. On comprend rapidement ses motivations. Rahimi est malheureusement est trop linéaire. Quels que soient les événements, il n'y a pas d'évolution dans sa manière de percevoir les choses. Zar Amir Ebrahimi à un jeu sec même s'il n'est pas mauvais pour autant. Son prix d'interprétation féminine au Festival de Cannes 2022 laisse tout de même perplexe. Le plus intéressant, psychologiquement parlant va être sûrement le tueur. L'influence idéologique va être bien montrée sur lui. Pour autant, la réalisation fait la part des choses en indiquant aussi tous ses antécédents qui le rendent fragile mentalement. L'acteur Mehdi Bajestani est excellent.
    velocio
    velocio

    1 163 abonnés 3 025 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 4 juillet 2022
    Faux film iranien, "Les nuits de Mashhad", film tout à la fois passionnant et instructif, a conquis les spectateurs du festival de Cannes et profondément irrité les autorités iraniennes. Le prix d’interprétation féminine est venu très justement récompenser la très belle interprétation de Zar Amir Ebrahimi. Espérons que la date de sortie du film, au milieu du mois de juillet, ne représente pas un handicap quant à son succès public dans notre pays.
    Arthur Brondy
    Arthur Brondy

    205 abonnés 835 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 29 juillet 2022
    En Iran, une journaliste décide d’enquêter sur un mystérieux tueur en série qui s’attaque aux prostituées. Le spectateur sait dès le début qui est le meurtrier et le suit dans sa folie jusqu’au moment où la journaliste parvient à remonter jusqu’à lui. Le film bascule alors dans une autre phase passionnante. Un thriller très réussit et puissant et porté par une comédienne talentueuse.
    Pascal
    Pascal

    117 abonnés 1 395 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 16 juillet 2022
    Le cinéma iranien se porte bien cette année (du moins à l'international), comme en témoigne, la sortie en 2021-2022, de " la loi de Teheran " de Saeed Roustaee, " un heros" de Afghar Faradi et " le diable n'existe pas" de Mohamed Rassouloff tous trois certainement parmi les meilleurs films d'auteurs récents, sortis en exclusivité depuis un an.



    C'est donc avec intérêt qu'on se rend en salle pour découvrir " les nuits de Mashhad" couronné à Cannes 2022, du prix de la meilleure interprète féminine.

    On sait que la nationalité d'un film ( seule expression artistique qui est dans ce cas) est donnée au regard de ses sources de financement et non pas à celle de la nationalité d'origine de son auteur.

    Rappelons le réalisateur Ali Abassi, est né à Teheran, est réfugié au Danemark ou il a été naturalisé, le film se situe en Iran, traite un fait divers iranien, critique le régime iranien, la langue parlée est le persan et est interprété par des comédiens iraniens . Il a certes été tourné en Jordanie.

    A l'aune de ces éléments, chacun jugera si le film est culturellement " Iranien" ou Suédois, Allemand, Français et Danois d'où viennent les fonds qui furent réunis pour sa production.

    Sous couvert d'un fait divers qui s'est réellement déroulé au début du XXI eme siècle dans le pays ( l'assassinat par un père de famille, maçon, ancien vétéran de la guerre Iran-Irak, de seize prostituées pour des motivations religieuses) le réalisateur nous propose une réflexion sur la place de la religion dans les comportements sociaux, individuels, la frustration sexuelle et une critique frontale des mentalités qui ont cours dans son pays, notamment à l'égard des femmes.


    Si le film est plutôt réussi dans sa première partie qui se suit avec intérêt, il souffre dans sa seconde d'un manque de savoir faire cinématographique du cinéaste, qui n'en fait pas, malheureusement, l'égal des trois réalisateurs des films précités.


    Les abus de gros plans et de caméra à l'épaule ont certes le mérite de faciliter la tâche du metteur en scène qui évite ainsi de devoir travailler la construction de plans, d'arrière plans, de choix de placement de caméra...

    Mais à l'écran, cette facilité lorsqu'on en abuse, donne un résultat insatisfaisant et le film au plan formel, donne dans ses dernières 45 minutes, l'impression de ne pas avoir été suffisamment travaillé.

    Il n'en reste pas moins que "les nuits..." est très recommandable au plan thématique, mais aurait pu être largement peaufiné dans son écriture cinématographique.

    Ajoutons que le casting est à la hauteur et que les acteurs sont vraiment tous très bons.
    Steadyllic
    Steadyllic

    11 abonnés 16 critiques Suivre son activité

    1,0
    Publiée le 16 juillet 2022
    Une vraie déception sur un sujet qui a pourtant un potentiel dramatique incontestable. Cela tient selon moi à une mise en scène putassière qui insiste lourdement sur des scènes pénibles comme une fellation par une pauvre fille droguée ou sur une pendaison jusqu'à plus soif. On ne peut que partager le dégoût du réalisateur pour le régime hypocrite des Mollahs. Mais dénoncer ne suffit pas pour faire un bon film. Il faut aussi un minimum de talent et un scénario qui tienne la route. Si le personnage du tueur en série reste fascinant par une interprétation qui souligne l'ambiguïté d'un pauvre type frustré victime d'un climat religieux poisseux, je ne comprends pas le prix d'interprétation féminine pour une comédienne sans saveur qui passe son temps à rouler de grands yeux inexpressifs. Si l'on veut s'indigner de la théocratie iranienne, il vaut mieux courir revoir "la loi de Téhéran" qui est à des années lumière de ce pensum à la fois racoleur et sans âme. Quelques scènes réussies lors du procès ne dissipent pas l'ennui et la gène de voir une dénonciation nécessaire s'embourber à ce point dans une mise en scène indigente.
    Cinememories
    Cinememories

    439 abonnés 1 432 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 7 juin 2022
    Si le cinéma permet toujours d’appuyer là où ça fait mal dans son positionnement politique, le dernier film d’Ali Abbasi suscite encore plus d’intérêt, à l’heure où le portrait de l’Iran continue son exil sur le grand écran. Il n’est plus étonnant de voir autant de sujets se multiplier à l’égard de femmes, victimes et soumises au patriarcat d’un pays qui en a fait un de ses piliers. La religion et la culture se confondent ainsi, au croisement d’une misogynie embarrassante. Rappelons que le cinéaste danois est d’origine iranienne et que son cinéma évoque les racines perdues au cours du temps. Le lien de parenté est devenu imposant dans ses récits, notamment lorsqu’il a commencé avec « Shelley » et prolongé l’effroi dans un thriller fantastique avec un « Border » triomphant à Un Certain Regard. On le soupçonnait déjà de sonder la nature humaine à travers des personnages qui se faufile dans la masse. Il revient ainsi avec une intrigue toute aussi cohérente, où la mise en scène du thriller gagnera en puissance.

    Avec une thématique aussi contemporaine, il ne cherche pas forcément à justifier l’état d’esprit de l’Iran, mais plutôt à mettre les deux pieds du bon côté de la frontière, aux risques de secouer un essaim moral déroutant. L’atmosphère de l’étrange n’est plus, car on s’installe astucieusement du côté d’un tueur, qui prône le féminicide comme un acte religieux fort et en accord avec une certaine justice divine. Saeed (Mehdi Bajestani) n’est pas non plus le maître de l’effroi qui peut rappeler le « Zodiac » de Fincher. Ici, il aura un visage, une vie. Il n’est qu’un père, qui aime en entretient sa famille comme il se doit. Mais ses activités louches, autour d’un mausolée, déclenchent des pulsions destructrices, qui grognent d’abord à travers le moteur de son deux-roues, avant de rétablir le silence. Et nous aurons beau tourner autour de ce personnage machiavélique, c’est toujours la femme qui reste l’enjeu principal du récit.

    On ouvre avec la détermination d’une mère, à la fois résignée de sa situation, où aucun homme n’est à ses côtés pour la protéger. Ce sera soit pour en abuser, soi pour l’exterminer et cette radicalité peut choquer de ce côté de l’occident, mais il est également possible d’en avoir vu assez ailleurs pour se laisser emporter par une intrigue parallèle. Rahimi (Zar Amir Ebrahimi) est une journaliste qui enquête sur le phénomène. Sa présence est loin de la vérité historique, mais rassemble les maux d’une société qui ne laisse ni droits ni autonomie aux femmes. La désertion des hommes s’affiche comme une conséquence des violences faites aux femmes. Le discours est perceptible, mais faible dans les deux axes narratifs. Soit on se répète, soit on passe à une autre scène de meurtre pour rebondir sur l’âme de Saeed, qui se dégrade, mais qui renaît dans un dénouement particulièrement révoltant. C’est à parti de là que la matière gagne en densité, mais Abbasi ne lui consacrera pas assez de temps pour explorer ses étincelles de fureur, autour d’une société qui allume une mèche avec ses propres martyrs et qui défend la misogynie, dans son élan de folie.

    « Holy Spider » (Les Nuits de Mashhad) n’est sans doute pas la plus prenante de ses œuvres, mais son efficacité n’est pas à bouder. Les quelques plans qui témoignent de l’immensité de la ville sainte nous ramène à l’inéluctable et une détresse évidente, laissant ainsi le spectateur désarmé et impuissant face à une haine qu’il redoute également. Un film coup de poing qui rappelle tous les combats menés dans l’Orient, où le voile ne masque pas assez le désespoir de mères, d’épouses et de femmes qui se soumettent au patriarcat sous toutes ses formes, afin de prolonger leur espérance de vie. Nous sommes ainsi sollicités à discerner la justice de la lâcheté, alors que l’ensemble tend vers un nihilisme absolu, où cette violence semble être un héritage acquis depuis très longtemps.
    Julien Chevillard
    Julien Chevillard

    159 abonnés 181 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 3 juillet 2022
    A Téhéran, en Iran, une journaliste enquête sur le meurtre de seize prostituées et se confronte au machisme de la société patriarcale. Le film est sélectionné en compétition officielle au festival de Cannes 2022. L'atrice Zahra Amir Ebrahimi remporte le prix d'interprétation féminine Le film s'inspire d'un fait divers qui s'est déroulé de 2000 à 2001 à Mashhad. Saeed Hanaei (en), un maçon, père de famille, surnommé « l’Araignée », a assassiné seize prostituées pour « débarrasser la ville sainte de Mashhad de la débauche ». Après un procès très médiatisé, il a été condamné à mort. Le tournage a lieu à Amman en Jordanie en mai 2021 L'Organisation du cinéma iranien et le ministre de la culture iranien Mohammad-Mehdi Esmaïli protestent contre la sélection du film au Festival de Cannes 2022 Si des personnes de l'intérieur de l'Iran sont impliquées dans le film Holy Spider, elles seront sûrement punies par l'Organisation du cinéma d'Iran Ali Abbasi avait vu le documentaire de Maziar Bahari, And Along Came A Spider, qui est sorti en 2002 après la pendaison de Hanaei
    D'une certaine manière, le personnage de la journaliste Rahimi existait dans la réalité
    Ali Abbasi travaille sur cette affaire depuis près de quinze ans. Dans les premières versions du scénario, le metteur en scène était resté très fidèle aux faits.
    Yves G.
    Yves G.

    1 278 abonnés 3 289 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 11 août 2022
    À Mashhad, la ville sainte d'Iran, à la frontière de l'Afghanistan, un tueur en série a assassiné en 2000 et en 2011 une quinzaine de prostituées. Il les attirait chez lui, les étranglait et se débarrassait de leurs dépouilles dans des terrains vagues. Son procès déchira l'opinion publique iranienne, une partie d'entre elle prenant fait et cause pour lui, estimant qu'il faisait œuvre de salubrité publique en libérant la ville de femmes de mauvaise vie.

    Le réalisateur Ali Abbasi, né en Iran, mais aujourd'hui installé en Suède, s'est saisi de ce fait divers. Il n'a pas eu le droit de tourner en Iran et a reconstitué les lieux en Jordanie. Son film  précédent, "Border", m'avait enthousiasmé - au point de figurer dans mon Top 10 en 2019 ; mais "Les Nuits de Mashhad" ne lui ressemble en rien.

    Impressionné par ce fait divers, Ali Abbasi a eu l'idée d'inventer une courageuse journaliste. Palliant l'impéritie de la police qui, par incompétence ou par refus tacite, néglige l'enquête, elle traque elle-même le tueur en série au risque de sa vie. Le rôle joué par Zar Amir Ebrahimi lui a valu le prix d'interprétation féminine à Cannes. Sans doute le personnage est-il courageux et l'actrice l'interprète-t-elle avec une belle conviction. Mais de là à lui décerner un prix, il y a un pas que seule la bien-pensance - et l'absence de toute autre récompense octroyée à ce film au palmarès cannois - permet d'expliquer.

    "Les Nuits de Mashhad" est un film violent. Il est d'ailleurs à bon droit interdit aux moins de douze ans. Il filme longuement l’agonie de trois femmes selon le même modus operandi. Certaines critiques lui reprochent, non sans motif, sa complaisance et son voyeurisme.
    Il ne s'agit pas d'un polar à proprement parler. Il n'y a aucun doute sur l'identité du meurtrier, Saeed, un maçon, marié et père de famille, dont la caméra suit la vie sans histoire. Parallèlement, elle suit cette journaliste qui rencontre plusieurs obstacles pour mener à bien son enquête, le moindre n'étant pas l'inertie des autorités religieuses.

    Quitte à déflorer le scénario - lecteurs allergiques aux spoilers, n'allez pas plus loin - il faut dire que le film compte une seconde partie après l'arrestation de Saeed. Il change de registre : il passe du thriller nocturne et poisseux au procès et aux enjeux politiques qu'il soulève. Hélas, "Les Nuits de Mashhad" est déjà bien entamé et semble manquer de temps pour développer cette partie-là. C'est d'autant plus dommage que c'était peut-être le plus intéressant. On est frustré d'un procès bâclé en quelques minutes à peine. On aurait aimé que le réalisateur prenne son temps pour nous raconter, en changeant peut-être de focale, et en se plaçant cette fois-ci du point de vue des autorités, le défi posé par un meurtrier invoquant la même idéologie moralisatrice et misogyne que celle de ses juges.
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