« Les Misérables » est à coup sûr un reflet très réaliste des conditions de vie des cités et des banlieues, ici celle de Montfermeil en l’occurrence, ce qui ne sera pas un secret ou une découverte pour celui qui l’a déjà connu ou côtoyé, ou encore pour celui qui le vit au quotidien, rien que par le fait d’y habiter ou d’y travailler !
Un film qui a donc déjà le grand mérite de nous ouvrir les yeux sur un monde que beaucoup d’entre nous préfèrent éviter et même occulter, par peur, par confort et par égoïsme...
À ce sujet, plusieurs réalisateurs ont eu le courage de s’y frotter, on pense évidemment à « La Haine » de Mathieu Kassovitz ou encore au bouleversant « Divines » de Houda Benyamina.
Si Ladj Ly qui a vécu là-bas nous plonge littéralement dans cette véritable bombe à retardement, il le fait en connaissance de cause et donc avec un réalisme à couper le souffle, sans qu’aucun cliché d’aucune sorte n’apparaisse, tant les situations et les personnages reflètent exactement ce qui se passe dans ces zones de non-droit.
L’image de ces trois flics de la BAC pourra sembler excessive pour certains et cependant, là aussi, trop de faits récents depuis un an nous prouve la bêtise et la soumission des hommes, rien que dans la volonté de nos dirigeants à vouloir brimer et à faire taire par tous les moyens toute forme de contestation.
Le fameux LBD en est ici très judicieusement l’illustration en étant par définition le fameux et célèbre instrument qui nous le prouve de manière inquiétante à travers cette bavure policière !
Et pourtant, la démarche du cinéaste semble pour autant manquer d’une certaine vue d’ensemble pour se concentrer sur ce jeune adolescent Issa et ceux qui vont être en relation avec lui, tout en montrant les rapports de force complexes qui se jouent autour de ce dernier...
Ce sera évidemment l’instant T, celui de la bavure en question, qui mettra le feu aux poudres et fera basculer encore davantage tous ces individus dans une descente aux enfers dans laquelle les comportements et intérêts personnels seront parfaitement décryptés et analysés, jusqu’à un final franchement explosif dans tous les sens du terme.
Malgré tout et curieusement, on ne ressent pas la même émotion que dans les quelques autres réalisations de la même teneur, comme dans le magnifique « Polisse » de Maïwenn, à la facture également très documentaire.
L’explication tient peut-être à ce que la misère et le désespoir sont en effet visibles dans les yeux de chaque personnage, tous d'ailleurs trop schématisés et laissés à l'état d'ébauche, sans qu’à aucun moment le cinéaste n’arrive à donner ou à insuffler une infime lueur d’espoir, ne serait-ce que pour ouvrir l’horizon, si ce n’est heureusement la belle phrase de Victor Hugo qui apparaît au générique de fin, phrase pourtant o combien évidente et essentielle, que devrait méditer tous ces gouvernants qui ont la capacité et les moyens de changer radicalement ce monde en perte totale de repères, en prenant enfin grand soin de l’ensemble de nos sociétés, tel un bon jardinier qui respecte avec amour toutes ses plantations !