Tourbillon
Un film de François Ozon, c’est devenu un événement, d’abord parce que le bonhomme a du talent et qu’il change de genre à chacun de ses opus. Cette fois, c’est en découvrant une pièce de théâtre éponyme de 1934, qu’il a eu l’envie d’en faire une adaptation, tout en conservant son contexte historique et politique. Mais ces 102 minutes a l’habileté d’évoquer des préoccupations contemporaines autour des rapports de pouvoir et d’emprise dans les relations hommes/femmes. Dans les années 30 à Paris, Madeleine Verdier, jeune et jolie actrice sans le sou et sans talent, est accusée du meurtre d’un célèbre producteur. Aidée de sa meilleure amie Pauline, jeune avocate au chômage, elle est acquittée pour légitime défense. Commence alors une nouvelle vie, faite de gloire et de succès, jusqu’à ce que la vérité éclate au grand jour… Une comédie policière jubilatoire au message féministe à ne rater sous aucun prétexte.
Tout ce film est un hommage non dissimulé à la screwball comedy – une comédie qui combine le burlesque, des dialogues vifs et intrigue centrée sur des questions de mœurs, dont Franck Capra, Howard Hawks, Billy Wilder, Blake Edwards ou Ernst Lubitsch s’étaient fait une spécialité -. Le tour de force de ce film est de transformer une comédie de boulevard plutôt platounette en manifeste féministe – est-ce un hasard qu’on est choisi comme date de sortie le 8 mars, journée internationale des droits des femmes ?-. Ozon s’avère aussi éclectique que productif et comme à chaque fois, ce nouveau film ne ressemble à aucun de ses précédents. Même si, on s’en souvient Potiche ou 8 Femmes, traitaient un peu à leur manière le même type de sujet. Là encore, c’était du théâtre filmé, mais avec tellement de talent et d’invention, qu’on en redemande. Les décors, les costumes, le moindre des accessoires, le dialogues ciselés, le montage virtuose, le scénario tout en rebondissements… un festival !
Le casting, lui aussi, touche à la perfection. D’abord avec un duo de nos jeunes actrices qui n’en finissent pas de monter, Nadia Tereszkiewicz et Rebecca Marder, Isabelle Huppert, dans un numéro ahurissant de diva sur le retour, auxquelles on ajoutera Fabrice Luchini, - qui imite Jouvet, une de ses idoles -, Dany Boon, - qui se prend pour Raimu -, André Dussolier, Félix Lefebvre, - un des jeunes protégés d’Ozon depuis 2020 et Eté 85 -, tous excellents, sans oublier les rôles secondaires, tenus par Régis Laspalès, Michel Fau, Myriam Boyer, Daniel Prévost, Evelyne Buyle, Olivier Broche… du très beau monde qui s’est visiblement autant amusé que le public. Tout le monde cabotine à souhait, joue comme dans un mauvais théâtre des années 30, mais c’est le genre qui veut ça et c’est un régal. Le cinéaste aura donc poussé le souci de la reconstitution de cette période jusque dans la manière de jouer la comédie. Du talent partout, à tous les étages, à chaque minute… Régalez-vous !