André Téchiné passe une grande partie de son adolescence provinciale à hanter les salles de cinéma. Il écrit ses premiers articles dans un journal lycéen,
La Plume et l'écran. Monté à Paris à 20 ans, il échoue au concours d'entrée à l'IDHEC, mais intègre la rédaction des
Cahiers du Cinéma -sa première critique porte sur
La Peau douce de
Truffaut. En 1965, il tourne son premier court métrage,
Les Oiseaux anglais. Passionné de théâtre, il fréquente la bande de
Marc'O, travaillant comme assistant sur le film-culte
Les Idoles en 1967.
André Téchiné choisit tout naturellement l'égérie
Bulle Ogier pour être l'héroïne de son premier long métrage,
Paulina s'en va. Présentée à Venise en 1969, cette oeuvre onirique déconcerte les spectateurs lors de sa sortie en salles... six ans plus tard. De facture plus classique, son deuxième
opus Souvenirs d'en France (1975) avec
Jeanne Moreau, reçoit en revanche un accueil chaleureux, tout comme, un an plus tard,
Barocco, polar à l'esthétique expressionniste qui réunit les stars
Adjani et
Depardieu. Il peut alors s'atteler à un projet qui lui est cher,
Les Soeurs Bronte. Mais malgré un gros budget et un casting prestigieux -avec le débutant
Pascal Greggory-, cet austère film d'époque ne convainc guère.
Sorti en 1981, le mélancolique
Hôtel des Ameriques marque un tournant dans la carrière de Téchiné, qui ancre désormais son goût du romanesque dans un univers plus réaliste. Il dirige aussi pour la première fois
Catherine Deneuve, sa comédienne-fétiche, à qui il offrira de beaux personnages de femmes à la fois volontaires et vulnérables (
Le Lieu du crime). Après un détour par la télévision (
La Matiouette), il revient au premier plan en 1985 grâce à
Rendez-vous (Prix de la mise en scène à Cannes), récit initiatique qui révèle une frémissante
Juliette Binoche. Après
J'embrasse pas, nouveau portrait d'un jeune provincial tourmenté, il décroche l'un de ses plus grands succès critiques et publics avec
Ma saison préférée, présenté sur la Croisette en 1993.
Avec
Les Roseaux sauvages, une commande d'Arte en 1994, un vent de liberté souffle sur le cinéma de Téchiné, qui livre une oeuvre limpide et sensuelle sur son adolescence, baignée par la lumière du sud-ouest. Fidèle à certaines thématiques (les liens familiaux, l'homosexualité, l'exil), Téchiné est partagé entre la volonté d'échafauder des récits complexes (le film-puzzle
Les Voleurs en 1996) et une recherche d'authenticité (
Loin, touné en DV au au Maroc). Découvreur de talents (
Elodie Bouchez,
Lubna Azabal), il fait aussi tourner de grandes pointures : le couple mythique
Deneuve-
Depardieu (
Les Temps qui changent, 2004) ou
Emmanuelle Béart, qui traverse la France occupée dans
Les Egarés.
Cette touche glamour ne l'empêche pas d'aborder des sujets de société délicats : après
Les Témoins, oeuvre polyphonique sur les années sida (2007), il s'inspire d'un fait divers retentissant (l'agression imaginaire d'une jeune femme) dans
La Fille du RER en 2009. Vient ensuite
Impardonnables en 2011, un drame oppressant où la fille d'un écrivain en panne d'inspiration disparaît soudainement.
En 2014, André Téchiné signe
L'Homme qu'on aimait trop, un thriller dramatique là encore inspiré d'un fait divers (l'affaire Le Roux en 1977, où une héritière disparaît), emmené par
Adèle Haenel,
Guillaume Canet et
Catherine Deneuve. En 2016, il revient avec
Quand on a 17 ans, une histoire d'amour-haine entre deux adolescents qu'il écrit avec
Céline Sciamma. L'année suivante, il réalise
Nos Années Folles, qui raconte la véritable histoire d'un soldat déserteur (
Pierre Deladonchamps) se faisant passer pour une femme avec l'aide de son épouse (
Céline Sallette).
En 2019, André Téchiné refait équipe avec son actrice fétiche Catherine Deneuve et le très en vogue
Kacey Mottet Klein (Quand on a 17 ans) sur
L'Adieu à la nuit, un drame romanesque dans lequel le cinéaste s'intéresse à un sujet aussi grave qu'actuel : les jeunes cherchant à rejoindre Daech.